Son second a pris la relève
Le Chat Botté sans Dominique Gauthier, c'est toujours aussi bon?

Dominique Gauthier, emblématique chef du Chat-Botté, a écrit l'histoire des cuisines du Beau-Rivage à Genève durant trente ans. Son second Mathieu Croze, 39 ans, a la lourde tâche de pérenniser son héritage en amenant sa propre patte.
Publié: 10.10.2023 à 12:35 heures
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Dernière mise à jour: 10.10.2023 à 15:02 heures
Nouhad Monpays

Connu pour avoir été l’une des résidences de villégiature favorites de l'impératrice Sissi, qui y mourut en 1898, ainsi que d'autres personnalités de premier plan, le Beau-Rivage Genève est un lieu chargé d'histoire. On pénètre à pas feutrés dans ce joli hôtel de la rade genevoise, où une autre page importante vient de se tourner, en cuisine cette fois, avec le départ du chef Dominique Gauthier, en place depuis trois décennies.

À la table de son restaurant, le Chat Botté, on a longtemps savouré sa cuisine impeccable et millimétrée. Celle-ci était récompensée d’un magnifique 18/20 au Gault & Millau et d’une étoile au Guide Michelin. Outre son talent culinaire, l’affable Dominique Gauthier a aussi prouvé qu’il possède une qualité rare: celle de savoir dénicher les futurs talents. Et avec le recrutement en 2019 de son second Mathieu Croze (une valeur sûre auvergnate, passée par la triplement étoilée Maison Pic à Valence et le Quinzième de Cyril Lignac à Paris), Dominique Gauthier aura eu du nez, puisque c’est à lui que l’hôtel a donné la dure tâche de faire ronronner le Chat-Botté.

Comment assurer la relève, périlleux exercice lorsqu'il s'agit de conserver l'assise d'une institution, tout en apportant de nécessaires innovations? Pour le savoir, Blick a répondu présent à invitation donnée pour aller goûter tout ça dans une des suites de l'établissement.

L'Auvergnat Mathieu Croze (au premier plan) a la lourde tâche de succéder à Dominique Gauthier au Chat Botté.
Photo: Nouhad Monpays

Des plats sans risque

Après des amuse-bouches un peu trop généreux, malgré une surprenante cuillerée de gelée d’olive mariée à l’orange, on débute avec une magnifique assiette de saumon, avocat et kimizu, une mayonnaise japonaise. Cette assiette ciselée, aux goûts relevés, valorise à merveille la simplicité du saumon suisse.

Vient ensuite l’entrée chaude à base de langoustine. L’assiette, plus classique, présente le crustacé en deux façons, tartare et grillé. Surmonté de foie gras, celui-ci est coiffé d’une fine gelée de langoustine et arrosée par une bonne sauce albuféra, parfaitement émulsionnée et légèrement acidulée. Délicieux, y’a pas à dire, quoiqu'un peu «planplan»: on attendait quelque chose de moins classique de la part de Mathieu Croze. Mais nous sommes au Chat Botté, ne l'oublions pas.

Ma joie revient à la vue du plat de poisson, ici l’omble chevalier travaillé en mousse. Inséré dans un fond de tartelette croustillante, il est bordé d’une fine duxelle de champignons et surmontée de caviar osciètre. Cette excellente assiette est arrosée d'un bouillon d’oignons caramélisés: au top! Mathieu Croze, en bon technicien, maîtrise l’art des sauces.

Omble chevalier, champignons, caviar
Photo: Nouhad Monpays

Puis, il y a eu le veau, parfaitement cuit, généreusement servi, accompagné d’un panais et d’une sauce parfaite au cacao de la marque locale Orfèvre. Exquis certes: un bon classique réconfortant.

Veau et panais
Photo: Nouhad Monpays

Des desserts gourmands

Pour le dessert, c’est au tour du discret Kevin Ollivier, l'acolyte pâtissier de Mathieu de faire le show. Son élégant dessert, aux goûts puissants est une mousse «grand-mère» (sans les jaunes). Elle associe un chocolat corsé avec du vinaigre de miel de châtaignes, on la retrouve servie tout en douceur avec une glace de vanille fumée: une belle suite. Enfin, on note les excellentes mignardises de fin de repas, une guimauve colorée et une pâte de fruits lovées sur une belle assiette d'écorces d’orange qui parfument magnifiquement le tout.

Mousse au chocolat grand-mère
Photo: Nouhad Monpays

C’est une évidence, si un dur labeur attend Mathieu, il a dans sa cuisine du beau, de la couleur, de la gourmandise et une belle émotion. Il y aura de la superbe - à n’en pas douter - s’il réussit, à asseoir son audace et sa créativité, et à s'émanciper des griffes du Chat pour lui enfiler une nouvelle paire de bottes.
Menu dégustation en 5 services à 220 francs
Quai du Mont-Blanc 13, Genève

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