Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’est pas nécessaire d’être expert en œnologie pour constituer sa propre cave à vin. «L’essentiel est d’en avoir envie, car avec le vin, c’est le plaisir qui importe!» affirme Romain Cellery, responsable de l’École du vin de Changins, organisme de formation en œnologie à l'adresse des particuliers et des professionnels. Il n’est cependant pas toujours facile de s’y retrouver, car l’offre est très large. Sans compter que pour conserver des bouteilles dans de bonnes conditions, il y a quelques règles à connaître. Mais pas de panique, on passe ici en revue toutes ces questions. Suivez le guide!
La cave idéale…
Avant de vous lancer, mieux vaut vous assurer de disposer d’un local adéquat. Car plusieurs paramètres sont importants pour conserver le vin, à commencer par la température. «Le vin est moins fragile qu’on le croit», explique Romain Cellery. «Il faut éviter les écarts de température importants et rapides, mais il n’est pas nécessaire d’avoir une cave garantissant une température de 12°C toute l’année.» Le spécialiste recommande toutefois de vérifier que la température n’excède pas 20°C en été. «Les écarts de température peuvent être assez importants, du moment que la variation se fait lentement au fil des saisons et que la température maximale est acceptable», ajoute-t-il. Si la plupart des caves d’immeuble peuvent donc a priori faire l’affaire, on évitera en revanche de stocker du vin dans un garage pas isolé.
L’hygrométrie est moins importante, mais il faut quand même éviter un environnement trop sec, et ce, afin de préserver les bouchons. «Ils gardent ainsi leur souplesse et restent bien hermétiques, ce qui favorise la bonne conservation du vin», précise-t-il. C’est pour cette raison aussi qu’il faut toujours stocker les bouteilles en position couchée. Idéalement, il faudrait que la cave affiche un taux d’humidité de 80%. «Le bouchon et le vin supportent même 100% ; ça risque juste de faire moisir les étiquettes.»
Deux points encore à vérifier: la présence éventuelle d’odeurs et de vibrations peu favorables à la conservation du vin. On évitera donc de ranger les bouteilles à côté de pots de peinture – mieux vaut de toute façon un lieu ventilé – ou à proximité immédiate d’un lave-linge. Enfin, le vin s’épanouissant dans le noir, pensez à occulter les éventuels fenestrons ou soupiraux de la cave. Et si vraiment aucun endroit chez vous ne coche ces cases, il y a toujours la solution des caves frigorifiques. C’est efficace, même si elles ont un coût, consomment de l’électricité et offrent un espace de stockage limité.
…et les vins à mettre dedans
Vous avez la cave, maintenant il faut la remplir. Où s’approvisionner? «Pour débuter une cave, je conseillerais de commencer par la région dans laquelle on vit», répond Romain Cellery. «On a la chance en Suisse de trouver des vignes quasiment partout! Et la plupart des domaines sont ouverts au public.» Acheter du vin directement chez un vigneron permet d’échanger avec lui, de voir ses vignes, de visiter sa cave, ce qui donne indéniablement un supplément d’âme à ces bouteilles. L’inconvénient toutefois est que ces domaines ne proposent généralement que leur propre production. Pour davantage de choix en un lieu unique, on peut se tourner vers les cavistes indépendants ou les rayons spécialisés des supermarchés qui sont souvent de bon conseil. «Les foires aux vins sont intéressantes aussi, c’est l’occasion de déguster une large gamme de vins en peu de temps», ajoute-t-il.
Dans une cave de base, le spécialiste conseille d’avoir au moins du vin rouge et du vin blanc. «C’est intéressant aussi de varier les styles, entre vins légers et vins plus puissants.» Fiez-vous surtout à vos goûts et n’achetez pour débuter que des vins que vous aimez. Réfléchissez enfin à vos habitudes de consommation: prévoyez des vins à boire en apéritif, des vins faciles pour les repas improvisés, de belles bouteilles à partager avec des amateurs, etc. Une cave bien pensée est une cave variée qui vous permet d’y piocher une bouteille pour chaque occasion. «On peut commencer tranquillement à composer sa cave avec une vingtaine de bouteilles», précise-t-il. «Si on se prend au jeu, ça peut ensuite aller très vite!»
Quels vins laisser vieillir?
Vient également la question de savoir s’il faut plutôt opter pour des vins à boire rapidement ou des vins à faire vieillir. Il peut être prudent, dans un premier temps, d’acheter des vins à ouvrir dans les 2 à 5 ans, pour tester sa consommation et les conditions de garde. Et puis, on n’a pas non plus toujours envie d’attendre longtemps pour ouvrir une bouteille à maturité. On peut aussi décider d’acquérir quelques vieux millésimes à boire dans l’année, pour faire la différence. «Il faut expérimenter, mettre de côté certains vins pour voir leur évolution au fil du temps», recommande Romain Cellery.
Il ne vous reste plus qu’à ranger tout cela et à trouver votre propre organisation pour vous y retrouver. «C’est une question vraiment personnelle», affirme le spécialiste, qui avoue avoir lui-même tout essayé. Étiquettes sur bouteilles ou les casiers, livre de cave, logiciel: il existe plusieurs façons de gérer ce qui rentre et ce qui sort de la cave, et de déterminer ce qui est à boire ou à conserver. «Quand on a peu de bouteilles, c’est assez facile. Mais plus on achète, plus on doit choisir des vins avec une bonne capacité de garde (une dizaine d’années), car il y a toujours le risque d’oublier quelques bouteilles.» Bon à savoir: plus le contenant est grand, mieux le vin se garde. On privilégie donc l’achat de magnums (1,5 litre), voire de jéroboams (3 litres) si on veut le faire vieillir longtemps – pour les déboucher pour une grande occasion.
Sachez enfin que pour faire vivre une cave, il faut acheter régulièrement du vin. Petit à petit, on apprend à bien doser ses achats par rapport à sa consommation. Et pour Romain Cellery, il faut surtout savoir rester curieux et ouvert. «Au fil du temps, les goûts s’affinent et on sait de mieux en mieux ce qui nous plaît», conclut-il.