Adieu les vins gâchés!
Comment les producteurs de liège combattent le goût de bouchon

Jochen Michalski est le fondateur de l’un des plus importants producteurs de bouchons en liège naturel dans le monde. Cet Allemand d’origine se confie à Blick sur l’avenir du bouchon tel qu’il le voit.
Publié: 15.02.2023 à 17:32 heures
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Nicolas Greinacher

Les amphores scellées avec du liège retrouvées dans les ruines de Pompéi ont démontré que l’utilisation du liège pour fermer des récipients remontait déjà à 2000 ans au moins. Il a fallu néanmoins attendre le XVIIe siècle et l’invention des bouteilles de verre avant d’en arriver à l’usage principal que l’on fait du liège naturel aujourd’hui.

Les bouchons en liège ont commencé à tomber en disgrâce à partir des années soixante. Le 2,4,6-trichloroanisole (TCA), agent de contamination des vins bouchonnés, en a été le premier responsable. De plus, la négligence dont ont souffert certains marchés, tels que l’Australie, les a amenés petit à petit à se tourner vers les bouchons à vis.

Une industrie en pleine mutation

N’en déplaise aux fabricants de bouchons en liège qui ont souvent minimisé le problème des vins bouchonnés, certaines entreprises se sont au contraire penchées très tôt sur ce problème et ont déclaré la guerre au TCA. L’une d’entre elles fut la société portugaise Cork Supply, fondée en 1981 par Jochen Michalski et devenue l’un des principaux producteurs de liège naturel au monde.

La société Cork Supply, fondée en 1981 par Jochen Michalski, est devenue l’un des principaux producteurs de liège naturel au monde.
Photo: Cork Supply
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«Chaque étape de fabrication, depuis le chêne-liège jusqu’à la production en passant par le transport vers l’usine, a été passée à la loupe. Nous nous étions donnés pour objectif d’éradiquer le TCA et de laver la réputation, jusqu’alors excellente, du liège naturel», se souvient Jochen Michalski. Dans la foulée, Cork Supply et d’autres ont investi des sommes importantes dans toute la chaîne de fabrication et dans les contrôles de qualité.

«Grâce à la chromatographie en phase gazeuse, nous sommes en mesure de connaître tous les éléments chimiques qui entrent dans la composition d’un bouchon. Cela nous permet d’être à l’affût de la moindre trace de TCA et d’éliminer les bouchons contaminés. La distillation à la vapeur d’eau est un autre moyen d’éliminer le TCA des bouchons contaminés», explique Jochen Michalski.

Il propose par ailleurs à ses clients d’effectuer un test olfactif. Un bouchon en liège est placé dans un verre fermé avec peu d’eau. L’atmosphère humide permet de faire ressortir le TCA si les bouchons sont affectés. Plusieurs collaborateurs s’affairent ensuite à renifler le même bouchon pour exclure toute possibilité de contamination au TCA. «Ce ne sont là que quelques-unes des mesures que nous avons mises en place pour arriver aujourd’hui au score de 99,5 pour cent de bouchons exempts de TCA.»

La durabilité, un argument qui porte

Comparés aux capsules à vis métalliques ou aux bouchons synthétiques, les bouchons en liège naturel présentent un avantage déterminant: leur production est plus respectueuse de l’environnement. Elle est même tellement durable qu’elle laisse une empreinte écologique négative. En effet, les chênes-lièges, qui peuvent vivre jusqu’à 200 ans, contribuent à la qualité de l’air grâce à la photosynthèse, ce qui retire du dioxyde de carbone de l’atmosphère au lieu d’en ajouter. Le bouchon en liège naturel compense à lui seul les émissions générées par la production de la bouteille de verre.

Autre avantage du liège naturel: le bouchon peut être réutilisé de multiples façons, par exemple pour les loisirs créatifs. Jochen Michalski juge toutefois utile de préciser: «Il est totalement inutile de collecter des bouchons usagés pour les transporter par camion je ne sais où: cela ne fait que générer des émissions superflues et dégrader l’empreinte écologique du bouchon naturel.»

«Des marchés clés pour le vin, comme les États-Unis ou la Chine, exigent des bouchons en liège, notamment pour les vins de grande qualité. On se retrouve alors dans une situation où les vins haut de gamme australiens, par exemple, sont dotés d’un bouchon en liège pour l’exportation en Chine et d’un bouchon à vis pour le marché intérieur», relève Michalski.

Même si d’autres systèmes de fermeture se sont imposés, en particulier pour les vins bon marché, et que des pays comme l’Australie misent majoritairement sur le bouchon à vis, l’avenir du liège naturel semble de nouveau promis à un bel avenir grâce à des contrôles de qualité exhaustifs. Quant à l’intérêt de ce matériau pour la préservation de l’environnement, il est aujourd’hui plus important que jamais.

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