Céline, maîtresse de chai
La relève des vignerons est assurée en Valais

Quelles sont les motivations profondes des viticulteurs de demain? Nous avons suivi la maîtresse de chai Céline Zuber dans son parcours et nous nous sommes entretenus avec elle de sa philosophie en matière de vin.
Publié: 14.05.2023 à 19:03 heures
Isabelle Thürlemann-Brigger

Chaudement emmitouflée et rayonnant d’un sourire communicatif, Céline Zuber nous reçoit au domaine viticole de son maître d’apprentissage Serge Roh dans le village de vignerons de Vétroz (VS). Ici, dans le nord de la vallée du Rhône, les vignobles s’étendent à perte de vue. Rien d’étonnant à ce que la jeune Céline ait grandi dans l’univers du vin.

L’héritage viticole lui a été transmis dès le berceau. Sa famille est originaire du Val d’Anniviers, où l’on pratique l’élevage du vin dans des tonneaux en mélèze depuis des centaines d’années pour produire le «vin du Glacier». Un usage également en cours dans la famille Zuber. Ses parents ont gardé le souvenir des heures de dur labeur passées dans les vignes du temps de leur enfance. Ils ont donc pris soin d’avertir leur fille de ce qui l’attendait avant qu’elle commence son apprentissage.

Peur de l’avenir dans le secteur du vin

Après l’école secondaire, Céline n’avait pas de plan précis. Mais elle a très vite compris qu’elle souhaitait travailler au grand air. L’occasion se présenta alors de commencer un apprentissage chez un ami vigneron. Les débuts furent difficiles, notamment les variations de température extrêmes qui lui donnaient du fil à retordre. Mais Céline a du caractère et le plaisir de travailler l’a toujours emporté. Ce fut d’autant plus pénible pour elle d’apprendre qu’elle ne pourrait plus travailler dans les vignes pour des raisons de santé. Il fallait absolument trouver une solution de rechange. Elle s’est donc tournée vers un apprentissage de maîtresse de chai: «C’est ma vocation», ajoute-t-elle sans hésiter une milliseconde.

Vétroz est connu pour le cépage blanc amigne.
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Un esprit d’entreprise inventif

Avec son diplôme en poche, Céline Zuber pourra ouvrir sa propre exploitation viticole. Femme d’affaires jusqu’au bout des ongles, elle a déjà créé une entreprise. Son nom, «Le monde à l’enverre» est un jeu de mots auquel fait écho son logo original: une grappe de raisins qui, une fois retournée, montre un verre de vin. «Il faut savoir sortir du lot visuellement», lance la jeune Bas-Valaisanne. Créer représente une forme d’accomplissement pour elle. Il est d’autant plus heureux qu’elle puisse libérer sa fibre créatrice dans son métier et dans ses loisirs. Elle adore photographier les vignes au fil des saisons et faire des essais avec des drones.

«Je ne suis pas bio»

Même si elle vit en harmonie avec la nature, Céline Zuber ne souhaite pas se lancer dans la viticulture biologique. Cela tient au fait qu’il faut parfois pulvériser plus souvent qu’en culture conventionnelle. Le sol reçoit alors davantage de substances de type soufre ou cuivre. C’est pourquoi elle privilégie une culture raisonnée. «Pour moi, traiter les plantes et les sols de façon respectueuse, c’est faire une croix sur les produits chimiques pour lutter contre les mauvaises herbes et les champignons et miser sur le travail manuel. Je veux élaborer des vins honnêtes, les moins altérés possible», explique Céline Zuber.

Un style limpide

«Faciles d’accès, frais et sans ajout de bois», tels sont les termes choisis par Céline Zuber pour décrire ses vins. Elle a déjà procédé à trois vinifications, dont un muscat ottonel en dernier, guidée à chaque fois par son propre goût. Sa préférence va aux vins secs et fruités, dotés d’une belle souplesse. Elle s’est prise d’affection pour l’humagne rouge, une variété au caractère bien trempé enracinée dans le Valais. Ces vins rouges ont un profil aromatique de petits fruits sauvages, souvent accompagné d’une note florale et de touches de feuilles séchées.

«Valais. Gravé dans mon cœur»

La devise du tourisme valaisan colle parfaitement à la peau de Céline Zuber. Bien qu’elle se réjouisse de son prochain voyage d’étude en Champagne et qu’elle souhaite découvrir les régions viticoles de Californie, elle voit son avenir dans le Valais. «Mon rêve serait d’avoir une cave à vins en pleine nature, comme une petite forteresse entourée de vignes où je pourrais travailler au calme. De préférence dans la région de Sierre.» Si l’on en croit sa devise, elle ne s’arrêtera certainement pas là: «Tout vient à point à qui sait attendre»…

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