Exit, le chef des armées!
Volodymyr Zelensky est-il en train de tout perdre?

Avec le limogeage de son commandant des forces armées, Zelensky a pris un risque énorme. Car en plus d'être un fin stratège, Valeri Zaloujny jouissait d'une solide réputation auprès de la population. Le président ukrainien risque désormais de le payer sur le terrain.
Publié: 09.02.2024 à 15:59 heures
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Dernière mise à jour: 09.02.2024 à 16:04 heures
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Samuel Schumacher

Coup de théâtre au sein du gouvernement ukrainien: Volodymyr Zelensky a envoyé balader son chef des armées, Valeri Zaloujny! Cet ingénieur en mécanique a pourtant remporté plusieurs grands succès dans la guerre contre l'armée russe, en dressant notamment un mur de défense autour de Kiev au début de la guerre.

Mais dernièrement, des conflits ont éclaté entre Volodymyr Zelensky et son général. Les rumeurs d'une destitution imminente de Zaloujny circulaient depuis une semaine. Mardi soir, la sentence est tombée: sur Telegram, le président ukrainien a remercié son général pour «chaque victoire que nous avons remportée ensemble» et a fait savoir qu'il l'avait remplacé par Oleksandr Syrsky, ancien commandant des forces terrestres ukrainiennes.

Cette destitution cache en fait trois vérités, loin d'être de bon augure pour le président ukrainien.

En congédiant son commandant des forces armées, Volodymyr Zelensky prend un énorme risque.
Photo: AFP
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Volodymyr Zelensky est politiquement affaibli

Certes, l'ancienne vedette de la télévision était autrefois considérée comme quasiment intouchable. Sur la scène internationale, le président ukrainien, en fonction depuis 2019, est devenu un fin stratège en communication à qui l'on a déroulé le tapis rouge, de Varsovie à Washington. Mais en Ukraine, sa cote de popularité a récemment chuté. Et de façon dramatique.

Valeri Zaloujny, lui, caracolait en tête des sondages. Alors que 62% des Ukrainiens interrogés déclaraient soutenir Volodymyr Zelensky, 88% des personnes sondées avaient exprimé leur confiance en Valeri Zaloujny. Au fil du temps, le général a publié plusieurs articles d'opinion et il semble s'être imposé comme une figure politique présidentiable – les élections étant prévues cette année dans le pays.

Tout ceci n'a manifestement pas plu à Volodymyr Zelensky, qui ne souhaite d'ailleurs pas organiser d'élections cette année. Oleksy Danilov, le chef du conseil de guerre du Président ukrainien, a récemment souligné dans une interview à Blick qu'il était «impossible» d'organiser des élections politiques en pleine guerre.

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Valeri Zaloujny avait raison

En novembre, Valeri Zaloujny a affirmé dans une interview au magazine britannique «The Economist» que la confrontation avec la Russie était «au point mort» et que l'Ukraine risquait de tomber dans le piège d'une guerre éternelle. Volodymyr Zelensky a alors vivement démenti cette affirmation, y compris lors de son intervention au Forum économique mondial de Davos en janvier.

Près de deux ans après le début de la guerre, Volodymyr Zelensky doit aujourd'hui admettre que des «changements à la base de notre défense» sont nécessaires pour que l'année 2024 soit une réussite. La pénurie de munitions et le tarissement de l'aide venue des alliés obligent désormais l'Ukraine à revoir ses certitudes.

Et pour ne pas s'effondrer devant l'armée russe, il faut manifestement, aux yeux de Volodymyr Zelensky, de nouvelles têtes pour coordonner le plus grand conflit en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

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Oleksandr Syrsky est déjà sous pression

La situation sur le front ukrainien ressemble de plus en plus à la guerre des tranchées de la Première Guerre mondiale. Les deux camps sont bloqués, n'avancent pas et consacrent leur énergie à renforcer leurs fortifications. Une chose est sûre: sans percée à travers les lignes russes, l'Ukraine ne gagnera pas la guerre contre la Russie.

La dernière grande percée de l'armée ukrainienne date de l'automne 2022 dans la région de Kharkiv, la grande ville du nord-est de l'Ukraine. Un fait d'armes attribué à Oleksandr Syrsky, que Zelensky vient de nommer commandant en chef.

Les attentes sont claires: le nouveau chef des armées doit désormais offrir sur un plateau le miracle que Valeri Zaloujny n'a pas pu fournir à Zelensky. Une pression énorme pèse désormais sur les épaules de cet homme, qui a terminé sa formation militaire en 1982 à l'école de commandement militaire soviétique de Moscou.

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