Les deux camps donnent leurs versions
112 morts à Gaza: Le Hamas dénonce un «massacre» d'Israël

Tôt jeudi matin, au moins une centaine de Gazaouis affamés ont perdu la vie dans le nord de Gaza. Les circonstances précises de ce drame restent encore floues, mais le Hamas et Israël donnent chacun leurs versions des faits.
Publié: 01.03.2024 à 15:56 heures
Samuel Schumacher

Nouvel épisode d'horreur à Gaza: jeudi, au moins 112 Palestiniens ont perdu la vie, alors qu'ils attendaient des convois humanitaires. La foule s'est retrouvée face aux chars de l'armée israélienne 

Israël et le Hamas se tiennent mutuellement responsables de cette catastrophe. Le Hamas parle d'un «massacre», Israël d'une «panique collective». Le drame montre à quel point il est si difficile de trouver une solution à la guerre à Gaza.

Les faits

Jeudi matin, peu avant 5 heures, un convoi d'aide comprenant au total 38 camions a été accueilli par plusieurs centaines de Palestiniens affamés le long de la route côtière Al-Rashid dans la ville de Gaza. La caméra de vision nocturne d'un drone israélien montre des dizaines de personnes essayant de grimper sur les camions pour accéder à l'aide.

112 personnes ont été tuées lors d'une attaque contre un convoi humanitaire dans le nord de Gaza, affirme le Hamas.
Photo: keystone-sda.ch
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Sur la vidéo du drone montée par Israël, on peut voir plus tard des dizaines de corps sans vie ou blessés gisant dans le sable le long de la route. Peu après le drame, l'hôpital al-Awda au nord de Gaza a annoncé avoir traité 161 blessés, la plupart souffrant de blessures par balle.

Ce que dit le Hamas

Le Hamas, qui dirige la bande de Gaza et ses presque 2,5 millions d'habitants depuis 2007, parle d'un «massacre» perpétré par les soldats israéliens contre la population civile innocente. Les soldats auraient ouvert le feu sans raison. 112 personnes ont été tuées et au moins 280 blessées, dont certaines grièvement.

Le Hamas parle d'«assassinat systématique» de personnes innocentes et accuse l'armée israélienne d'avoir «tiré directement sur des civils». Il demande à la Cour pénale internationale de demander des comptes à Israël pour ce «crime odieux».

Ce que dit Israël

Le porte-parole du gouvernement Avi Hyman parle de «chauffeurs palestiniens dépassés par les événements» qui ont été débordés par la foule. «Ils ont traversé la foule en voiture et ont tué des dizaines de personnes.» Lors d'un incident séparé, un groupe de Palestiniens se serait approché trop près de soldats israéliens, qui auraient alors tiré et blessé dix personnes.

Le porte-parole de l'armée Daniel Hagari souligne que les forces israéliennes «n'ont pas tiré sur le transport d'aide». Il renvoie à la vidéo des drones de vision nocturne qui ne montre aucun soldat à proximité du convoi d'aide. Plusieurs sources, dont le «New York Times», font toutefois remarquer que les images des drones ont été montées et ne montrent pas les moments centraux de l'incident. La version des faits d'Israël reste également difficile à valider, tant le décompte des victimes est impressionnant, et les déclarations de l'hôpital al-Awda sur les blessés par balles vont à l'encontre des affirmations de Tsahal.

Itamaer Ben-Gvir, ministre israélien de la Sécurité nationale, a appelé à un arrêt immédiat de toutes les livraisons d'aide à Gaza suite à l'incident. Toute aide est de «l'oxygène pour le Hamas».

Les conséquences

Les négociations sur un cessez-le-feu à Gaza pendant le mois de jeûne musulman du ramadan (10 mars au 8 avril), qui étaient en bonne voie selon la Maison Blanche, semblent avoir échoué. Le Hamas accuse Israël d'utiliser la couverture des négociations pour commettre des crimes graves. Les Etats-Unis et Israël portent l'«entière responsabilité» de ce «massacre».

L'incident a provoqué des cris de protestation à l'international. Le président français Emmanuel Macron a fermement condamné l'action d'Israël. Le président colombien Gustavo Petro a parlé de «génocide» et a annoncé l'arrêt immédiat de toutes les ventes d'armes avec Israël. L'ONU a rappelé à Israël qu'en tant que puissance occupante à Gaza, l'Etat hébreu était responsable de la sécurité publique de la population civile.

Entre-temps, la catastrophe humanitaire se poursuit pour les habitants de Gaza. Selon l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour la Palestine, au lieu des quelque 500 camions chargés d'aide humanitaire d'avant la guerre, seule une centaine de camions parvient actuellement chaque jour dans la bande côtière dévastée. Selon les données palestiniennes, 30'035 personnes ont été tuées et plus de 70'000 blessées depuis le 7 octobre. Plus de 7000 personnes sont toujours portées disparues. L'ONU craint une famine imminente qui pourrait toucher 500'000 personnes. Une fin prochaine de l'horreur n'est pas en vue.

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