Plus de 5000 morts
«Ce n'est pas une simple catastrophe naturelle» assure un spécialiste

La tempête Daniel a fait des ravages en Libye. Plus de 5000 personnes ont perdu la vie et plus de 30'000 sont sans abri. Un expert explique que cette situation dramatique est bien plus qu'une simple catastrophe naturelle.
Publié: 13.09.2023 à 17:42 heures
Johannes Hillig

Des quartiers détruits, des coulées de boue, des débris et des milliers de morts. Quatre jours après les inondations dévastatrices dans l'est de la Libye, l'ampleur de la catastrophe est devenue claire mercredi. Le nombre exact de morts reste difficile à déterminer, a déclaré un porte-parole du gouvernement. Des centaines de corps non identifiés ont été enterrés dans des fosses communes, alors que plus de 2000 victimes authentifiées avaient déjà été enterrées mardi.

Le gouvernement craint que le bilan monte à 9000 morts. A environ 25 kilomètres de la ville côtière de Derna, des corps flottent toujours dans la mer. La ville portuaire est particulièrement touchée après que deux barrages ont cédé dans la nuit de dimanche à lundi, emportant des quartiers entiers de la ville dans la Méditerranée.

Aucune rénovation faite

Les barrages retiennent normalement l'eau du lit de la rivière qui traverse Derna. Mais les digues n'étaient pas préparées à une telle catastrophe. Les responsables le savaient pourtant parfaitement, explique le politologue Wolfram Lacher.

La tempête Daniel a particulièrement dévasté l'est de la Libye.
Photo: keystone-sda.ch
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Cette situation dramatique n'est pas uniquement la conséquence d'un déchainement météorologique. «Il ne s'agit pas simplement d'une catastrophe naturelle, mais d'un événement très étroitement lié à la situation politique en Libye», explique Wolfram Lacher dans une interview accordée à la chaîne de télévision ZDF. Car les digues étaient déjà en mauvais état depuis longtemps: à l'époque de Mouammar Kadhafi (1942-2011), arrivé au pouvoir par un coup d'État en 1969.

Le spécialiste l'assure: «Kadhafi a puni la ville pour avoir vu des insurgés y prendre les armes dans les années 90. Et après la chute de Kadhafi en 2011, plus rien n'a été investi dans les infrastructures pendant des années.»

Un gouvernement chaotique

L'argent pour l'assainissement était pourtant dans les caisses de l'Etat, mais il n'a pas été utilisé à cet effet. Les responsables ont simplement empoché l'argent pour leurs propres besoins.

La situation n'est pas meilleure aujourd'hui. Après la chute du dirigeant Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye a sombré dans le chaos et des gouvernements rivaux sont désormais au pouvoir à l'ouest et à l'est du pays.

L'est du pays est dirigé par le général Khalifa Haftar. Lui et ses hommes seraient tristement célèbres pour leur corruption. «On peut craindre qu'il s'agisse surtout pour eux d'apparaître comme des apporteurs d'aide, d'influencer l'opinion publique et beaucoup moins d'apporter réellement quelque chose de concret.»

La situation est «choquante et dramatique»

Pendant ce temps, les habitants de la zone sinistrée souffrent. Et beaucoup. Selon l'Organisation météorologique mondiale (OMM), des quartiers entiers ont disparu, des habitants ont été emportés par les masses d'eau.

La situation dans la ville est «choquante et dramatique», a déclaré un porte-parole des services de secours locaux. La télévision libyenne a montré des dizaines de corps enveloppés dans des couvertures et des draps sur la place centrale de la ville.

Le Comité international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge craignait plusieurs milliers de morts dans toute la Libye. Environ 10'000 personnes seraient encore portées disparues. L'aide nécessaire dépasse de loin les capacités de la Croix-Rouge et du gouvernement libyen, a souligné le représentant de l'organisation humanitaire, Tamer Ramadan.

(Avec AFP)

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