Troubles politiques au Bangladesh
Des manifestants ont usé la force pour empêcher un rassemblement pro-Hasina

Des violences ont éclaté jeudi à Dacca, la capitale du Bangladesh. Des manifestants tentaient d'empêcher les partisans de la Première ministre déchue, Sheikh Hasina, de participer à un rassemblement politique.
Publié: 15.08.2024 à 16:45 heures
sda-logo.jpeg
ATS Agence télégraphique suisse

La Première ministre déchue du Bangladesh, Sheikh Hasina, a fui en hélicoptère vers l’Inde le 5 août, alors que les rues de Dacca étaient remplies de manifestants exigeant son départ, après plus de quinze ans de pouvoir abusif. Un départ qui survient peu avant le 15 août, date de l'anniversaire de l’assassinat en 1975 du père de l'ancienne ministre, le héros de l’indépendance Sheikh Mujibur Rahman, lors du coup d'Etat militaire. 

Sous la présidence de Sheikh Hasina, cette date avait été déclarée fête nationale. Elle engendrait des manifestations de masse en faveur du pouvoir, tandis que tous les fonctionnaires étaient sommés de se recueillir devant la résidence familiale où avait eu lieu l’assassinat. Une obligation que le nouveau gouvernement provisoire, mis en place après la chute du régime, a abrogé.

Une barricade humaine

Sheikh Hasina avait demandé publiquement mardi à ses partisans de venir sur place pour «prier pour le salut de toutes les âmes en offrant des guirlandes de fleurs». Mais les étudiants à l’origine du mouvement de contestation ne l’entendaient pas de cette oreille. «La fugitive et dictatrice Sheikh Hasina a ordonné à ses larbins et ses milices de se rendre sur place afin de faire une contre-révolution», a déclaré à l’AFP Imraul Hasan Kayes, 26 ans. «Nous sommes ici en gardiens de notre révolution afin qu’elle ne nous échappe pas.»

Des manifestants violentent un sympathisant du parti Awami League de la Première ministre déchue Sheikh Hasina. Il est soupçonné de rendre hommage au père de l'ancienne dirigeante devant sa résidence à Dhaka, au Bangladesh.
Photo: keystone-sda.ch
1/2

En l’absence de la police, des centaines d’étudiants et de soutiens ont alors formé une barricade humaine dans la rue menant à la résidence familiale Hasina. Plusieurs personnes soupçonnées d’être partisanes de la Ligue Awami, le parti de l’ancienne Première ministre, ont été rouées de coups de bâton et d’autres ont été emmenées de force, ont observé des journalistes de l’AFP. La résidence, transformée depuis en musée à l’honneur de Sheikh Mujibur Rahman, a été incendiée et vandalisée par les manifestants quelques heures après la fuite de Sheikh Hasina.

Dans le viseur de la justice

Un tribunal de Dacca a ouvert une enquête en début de semaine pour meurtre contre Sheikh Hasina, deux hauts responsables de la Ligue Awami et quatre officiers de police, dans le cadre de la répression des manifestations antigouvernementales. Les troubles ont fait plus de 450 morts, dont 42 policiers, selon un décompte de l’AFP basé sur des sources hospitalières et policières. 

Plusieurs autres dignitaires de la Ligue Awami ont été arrêtés dans le cadre d’autres enquêtes, dont l’ancien ministre de la Justice Anisul Huq et le conseiller économique Salman Rahman. Les deux hommes ont comparu devant un tribunal mercredi sous haute surveillance policière, menottés et portant des casques pour leur protection. 

Le gouvernement de Sheikh Hasina a été accusé de violations systématiques des droits humains, notamment les arrestations massives ou exécutions extrajudiciaires de milliers d’opposants politiques.

Le prix Nobel de la paix Muhammad Yunus est rentré d’Europe le 8 août pour prendre la tête d’un gouvernement transitoire, qui doit relever le défi colossal de mener des réformes démocratiques. Il a déclaré jeudi qu’il s’était entretenu avec le responsable des droits de l’homme des Nations unies, Volker Türk, «afin d’ouvrir une enquête», sans donner plus de détails.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la