Un président sous pression?
Une réunion surprise du Parlement russe sème le doute sur les intentions de Poutine

À la surprise générale, une réunion extraordinaire de la Douma, le Parlement russe, aura lieu le 15 juillet prochain. Il s'agit d'un événement rare. A Moscou, les rumeurs vont bon train sur les intentions du président, Vladimir Poutine.
Publié: 12.07.2022 à 08:05 heures
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Dernière mise à jour: 12.07.2022 à 14:20 heures
Daniel Kestenholz

Lorsqu’une session extraordinaire de la Douma russe a lieu, ce n’est pas un événement anodin. Même en 2020, en pleine pandémie, la chambre basse de l’Assemblée fédérale avait passé tout l’été en vacances. Lundi, une session spéciale pour le 15 juillet a été convoquée à la surprise générale, comme le confirme l’agence «Reuters». Cette annonce intervient quelques jours après que le président Vladimir Poutine a affirmé que l’opération militaire spéciale en Ukraine «n’avait pas encore réellement commencé».

Même les médias russes se perdent en conjectures sur la raison de cette réunion spéciale organisée dans un délai inhabituellement court. Certains s’attendent à une mobilisation générale, d’autres à un remaniement du gouvernement. Il est également question d’une déclaration de guerre officielle. Tout le monde s’accorde toutefois sur le fait que Poutine tentera de consolider son pouvoir.

Bien que les forces armées russes enregistrent actuellement des succès en Ukraine, l’avancée sur le front doit être payée au prix fort. En Russie, les rumeurs de tensions au sein du gouvernement ne cessent de circuler. La réunion spéciale de la Douma ne va pas calmer les spéculations.

Vladimir Poutine a récemment participé au défilé du Jour de la Victoire. Jeudi, le président russe a déclaré que l'opération militaire en Ukraine n'avait «pas encore réellement commencé».
Photo: KEYSTONE
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«Confrontations au sein des élites»

Le canal Telegram General SVR, proche du Kremlin, évoque des «confrontations au sein des élites». Les dirigeants russes se disputeraient sur «ce qui peut être considéré comme la victoire et l’objectif final» de l’opération en Ukraine.

La lutte voit donc s’affronter un camp modéré et un autre plus radical. Le président Poutine connaît leurs positions et doit peser le pour et le contre avec prudence. Les partisans d’une ligne dure souhaiteraient une «escalade brutale», avec les prises successives de Kharkiv, Louhansk, Donetsk, Zaporijjia ainsi que de Mykolaïv, Odessa et même de la République de Moldavie.

Selon Nikolaï Patrouchev, influent secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, cette avancée pourrait être réalisée avant le début de l’hiver.

Poutine sous pression

De son côté, Poutine lui-même n’a pas encore prononcé le moindre mot sur ce qu’il considère comme la «victoire finale». L’Ukraine préparerait désormais une offensive d’un million d’hommes contre les Russes. Si la contre-attaque réussit sur au moins deux fronts, le «mécontentement des élites s’intensifiera», analyse le canal General SVR. Les lance-roquettes Himars de haute précision et les obusiers blindés allemands 2000, désormais livrés par l’Occident, permettront probablement aux Ukrainiens de retourner une situation actuellement tendue sur le front.

«Puisque Poutine ne sait pas lui-même quel type de 'victoire' il peut obtenir, il ne sera pas en mesure de gagner cette guerre» poursuit l’analyse. Le problème du président est qu’il essaie de «trouver les limites de ses agissements sans contrarier, décevoir ou monter les élites contre lui». Cette attitude «conduira assurément le pays avec vers un fiasco».

Les médias russes s’attendent donc à ce que Poutine profite de la session spéciale de la Douma pour tenter de consolider sa position auprès des élites. La «Komsomolskaya Pravda» écrit attendre «de grandes décisions» à la suite de cet événement.

(Adaptation par Thibault Gilgen)

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