Chronique de Nicolas Capt
La saga du ballon «d'espionnage» chinois

Me Nicolas Capt, avocat en droit des médias, décortique deux fois par mois un sujet d’actualité ou un post juridique pour Blick. Cette semaine, il revient sur le fameux ballon d'espionnage chinois abattu par les Etats-Unis.
Publié: 07.02.2023 à 11:52 heures
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Dernière mise à jour: 07.02.2023 à 18:48 heures
Nicolas Capt

A l’heure où l’on parle de coloniser mars pour fuir une planète bleue que l’on a maltraitée et où l’on se menace de frappes à coup de missiles hypersoniques et de cyber attaques paralysantes, l’annonce de la saga du ballon, que l’on dit chinois, voguant dans les hautes couches de l’atmosphère américaine, insuffle du Jules Verne dans un siècle qui en manque sans doute.

Ballon espion ou à visée météorologique ?

Tout convoque ici le suranné de l’espionnage d’antan, empreint de lenteur, de hasard et d’inertie. Le ballon, à visées météorologiques et malheureusement dévié de sa trajectoire pour les uns, mouchard rétrofuturiste dûment contrôlé pour les autres, cristallise aussi, et peut-être surtout, le jeu de marionnettes et de dupes qu’a de tous temps été la politique internationale.

Ainsi, aux Etats-Unis, on s’offusque de cet OVNI en provenance de l’Empire du Milieu, tandis que l’on blâme en Chine la surréaction de l’Amérique pour un banal ballon sonde. Même l’ancien président américain Donald Trump y va de son chant, invitant à «shoot down the balloon», un conseil visiblement écouté puisqu’aux dernières nouvelles l’aérostat est en chute libre, à la suite d'une attaque aérienne de l’Oncle Sam.

Notre chroniqueur Nicolas Capt revient sur l'affaire du ballon chinois coupable d'espionnage au-dessus des Etats-Unis.
Photo: keystone-sda.ch

Mais l’affaire ne s’arrête pas là: des visites diplomaties de haut rang se reportent, chacun s’excusant autant qu’il s’offusque. On blâme la violation des conventions, la surréaction. On se réserve de riposter. Œil pour œil, ballon pour ballon.

Attention, toutefois, aux rêves sépia, préviennent les experts: les ballons dont on parle ici sont un concentré de haute technologie. Gonflés à l’hélium, ils emportent des techniques de guidage de pointe, et se dirigent simplement en changeant d’altitude, charrient des panneaux solaires pour leur garantir un approvisionnement constant en énergie et sont faits d’un matériau qui ne réfléchit pas la lumière, les rendant difficilement détectables.

Une histoire qui se répète

En réalité, pas sûr que la nature du ballon, à supposer que l’on ait un jour des certitudes à cet égard, soit véritablement décisive.

S’il s’avérait que ce ballon était fouineur, il ne ferait alors que s’inscrire dans la grande tradition des aérostats de surveillance, étant à cet égard rappelé que c’est en avril 1794 à Meudon que fût fondée la première compagnie militaire d’aérostiers, opérant alors notamment L’Entreprenant (le bien nommé), une montgolfière de renseignement, et que l’usage des ballons espions s’est ensuite envolé lors de la guerre de Sécession américaine.

Ce curieux voyage en ballon aura en tout cas permis de vérifier que la nature humaine, elle, est demeurée tout à fait inchangée.

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