Poussé hors de Genève
Le salon de l'auto de Genève 2023 sera un festival... au Qatar

Le fameux (et depuis quelques années polémique) salon de l'auto genevois renaîtra de ses cendres en 2023... dans le désert, au Qatar. Les organisateurs tentent de se réinventer en s'exportant, et en privilégiant les événements outdoor. À quel prix?
Publié: 20.10.2022 à 10:10 heures
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Dernière mise à jour: 20.10.2022 à 12:03 heures
Daniella Gorbunova

C’est presque sûr: le salon de l’auto, tel que nous le connaissions avant le Covid, ne reviendra plus jamais. Mais ses organisateurs n’ont pas baissé les bras, comme le souligne un article de «24 heures» publié mercredi.

Il est, certes, devenu bien moins acceptable, aujourd’hui en Suisse, de célébrer les moteurs à énergies fossiles venus des quatre coins du globe dans la plus grande ignorance des problèmes écologiques qu’ils posent. Mais le Geneva International Motor Show (GIMS) n’a pas dit son dernier mot.

La Cité de Calvin ayant annulé, en son sein, le salon de l’auto 2022, le GIMS s’exportera donc, pour son édition 2023… au Qatar. Et cela ressemblera plutôt à un festival indoor et outdoor, avec des expériences plus interactives, écrit le média romand.

Photo: Getty Images

La Genève internationale moins attractive

Le Geneva International Motor Show n’est pas le seul à subir une crise existentielle. Partout en Europe, les salons à voitures doivent se réinventer – ou disparaître. A l’image du Mondial de l’auto de Paris, qui a ouvert ses portes lundi. Sur le devant de la scène de l’Hexagone: une majorité d’acteurs périphériques de la mobilité – bornes de recharge, équipementiers, experts en biocarburants, énumèrent nos confrères.

Un peu partout sur le continent, les exposants tentent de se mettre au vert, et privilégier leurs marques locales. Ainsi, pas de véhicules allemands, japonais ou américains en vue à Paris (malgré une forte présence chinoise, qu'il faut noter).

Dans le contexte que nous connaissons tous aujourd’hui, cela fait sens. Mais une telle préférence nationale quant aux marques d’autos exposées n’est pas à la portée de la Suisse: car nous n’en avons tout simplement pas, de marques. Justement: le succès du salon de Genève reposait sur cette neutralité – tous les concessionnaires de tous les pays étaient traités sur un pied d’égalité (ou presque).

Sandro Mesquita, directeur du Geneva International Motor Show, précise que «cela reste un argument, mais il ne suffit plus. Il faut désormais repenser le contenu.»

Un festival dans le désert

Se réinventer. C’est la raison pour laquelle le GIMS s’exportera, en 2023, à Doha, au Qatar. Cette formule sera un mélange d’expositions «classiques» dans des halles, et d’un circuit de F1 mis à disposition des visiteurs qui souhaiteraient tester un bolide. Avant de revenir, si tout va bien, à Genève en 2024 pour tester la nouvelle recette à la maison: «C’est tout l’enjeu, confirme Sandro Mesquita. La nouvelle formule du GIMS (ndlr: à Genève) ne sera pas forcément outdoor. Nous explorons différentes options sur la forme que l’événement devrait prendre.»

Ce qui a inspiré les organisateurs? L’Angleterre et de la Californie. «Le rendez-vous de Goodwood et celui du Monterrey Car Week sont davantage des festivals que des salons, explique le directeur dans les colonnes de nos confrères. Non seulement ils sont outdoor, mais surtout les voitures sont mises en action sur des routes réservées. Les visiteurs peuvent les voir rouler et même les conduire, ce qui attire énormément de monde et plaît aux constructeurs.»

Au Mondial de l’auto de Paris, on teste déjà ce genre de structures, avec un «centre d’essais XXL». L’objectif de ce parcours, ouvert aux visiteurs: 100’000 km parcourus dans la semaine, à bord de 100 véhicules différents.

Retour à l'édition Doha 2023, qui risque, si l’on en croit ses chevilles ouvrières, de ne pas passer inaperçu: «Il y aura (...) la possibilité de tester des 4x4 dans le désert, précise Sandro Mesquita. Plusieurs marques prestigieuses ont déjà fait part de leur intérêt, alors même que l’inscription officielle n’est pas encore ouverte.»

500 millions de tonnes de CO2

Une chose est certaine: ce que les organisateurs risquent d’avoir, à Doha, en plus d’un parcours F1 professionnel déjà tout prêt, c’est la paix. Le Qatar n’est pas connu pour ses activistes écologistes et ses ONG environnementales… (quasi) inexistantes.

Malgré les vives critiques qu’il a essuyées depuis sa dernière édition en 2019 (et auparavant déjà), cela fait en réalité longtemps que le salon de l’auto de Genève n’a pas fait l’objet d’une sérieuse étude quant à son impact écologique. Le dernier rapport de Greenpeace datant de 2008.

On peut seulement affirmer que, s’il s’agit, l’année prochaine, d'effectivement tester des 4x4 dans le désert, il sera difficile de qualifier ce salon de vert, ou même de responsable. Car ces bolides en particulier, s’ils ne sont pas électriques, sont les plus polluants de l’industrie automobile. Ils sont par exemple responsables de rien de moins que 500 millions de tonnes d’émissions de carbone entre 2010 et 2018. C’est plus que les avions et les cargos.

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