Couacs à la Défense
Les politiques demandent une enquête sur le cas de Jean-Daniel Ruch

Comment se fait-il que le département des affaires étrangères n'ait pas remarqué que son ambassadeur Jean-Daniel Ruch représentait un risque pour la sécurité, au point que la ministre Viola Amherd doive l'écarter? Les parlementaires demandent des explications.
Publié: 25.10.2023 à 18:43 heures
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Dernière mise à jour: 25.10.2023 à 19:05 heures
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Daniel Ballmer et Pascal Tischhauser

Le secrétaire d'Etat à la sécurité nouvellement élu aurait-il constitué un risque pour la sécurité de la Suisse? Cette suspicion pourrait avoir coûté le poste de Jean-Daniel Ruch. Le 1er janvier 2024 ce dernier ne prendra pas les fonctions auxquelles il avait été nommé. L'enquête de Blick a mis en lumière le passif qui le rendrait vulnérable au chantage. Le Département fédéral de la défense (DDPS) confirme que Jean-Daniel Ruch a décidé de ne pas devenir secrétaire d'Etat. La ministre de la Défense Viola Amherd n'aurait prévenu ses collègues du Conseil fédéral qu'à la dernière minute, avant la séance du gouvernement de mercredi.

En tant qu'ambassadeur, Jean-Daniel Ruch avait passé en juin 2019 un contrôle de sécurité personnel (CSP) élargi, le niveau le plus élevé des contrôles de sécurité au sein de la Confédération. Au cours de cette procédure, les personnes interrogées doivent, par exemple, aller jusqu'à donner des informations sur leur vie sexuelle. Ce CSP doit être effectué tous les cinq ans. La Chancellerie fédérale avait effectué ces CSP et transmis leurs résultats à la Direction des ressources humaines du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE).

Selon les informations de la Chancellerie fédérale, le DDPS aurait pu faire passer un nouveau CSP à Jean-Daniel Ruch, avant que ce dernier ne se voie attribuer le poste de direction. Mais le département de la conseillère fédérale du Centre Viola Amherd ne l'a cette fois pas exigé.

Jean-Daniel Ruch. ne prendra finalement pas ses fonctions.
Photo: keystone-sda.ch
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Pas de réserves

En revanche, une commission d'enquête a été mise en place, dans laquelle siégeait entre autres le secrétaire général du DFAE Markus Seiler. Ce dernier, ancien chef des services secrets, n'avait apparemment pas exprimé de doutes, du moins pas graves, sur la personne de Jean-Daniel Ruch, si bien que la commission a fini par jeter son dévolu sur l'ambassadeur.

Après l'annonce de la nomination de Jean-Claude Ruch à la mi-septembre, des doutes ont toutefois rapidement vu le jour, notamment sur son mode de vie. Selon les informations de Blick, le DDPS a confronté Jean-Daniel Ruch à ces rumeurs. Jean-Daniel Ruch aurait alors nié les reproches adressés.

Les informations ont dû évoluer pour le DDPS car la nomination du secrétaire d'Etat à la sécurité n'est visiblement plus tenable. La question est maintenant de savoir si le fameux CSP a été mal mené ou si elle a mis en évidence des risques qui n'ont pas été pris au sérieux au DFAE et/ou qui n'auraient pas été transmis au DDPS.

Enquête demandée

Selon le conseiller national UDC Mauro Tuena, président de la commission de sécurité, le fait qu'un nouveau CSP n'ait pas été mené, et ce uniquement pour Jean-Daniel Ruch, a été une négligence grossière. «Ce poste concerne le plus haut responsable de la sécurité dans ce pays. De graves erreurs ont manifestement été commises lors de l'évaluation.» Selon lui, le Conseil fédéral doit d'urgence revoir sa copie en ce qui concerne ses mesures de sécurité. La commission de sécurité se penchera certainement sur le sujet.

Le président du PLR Thierry Burkart demande de la clarté: «Il est difficile de juger si l'évaluation de la sécurité a échoué dans ce cas sans connaître les reproches concrets. Mais nous devrons certainement enquêter sur ce point», déclare le politicien en charge de la sécurité. Il s'intéresse déjà à la manière dont cela s'est passé.

Et le politicien de sécurité du Centre, Alois Gmür, en partance du Parlement, veut lui aussi savoir ce qu'il s'est exactement passé: «Il faut maintenant une enquête administrative au DFAE pour déterminer où des erreurs ont été commises.»

Pour la conseillère nationale verte Marionna Schlatter, la Confédération doit également revoir sa copie. Il est étonnant que de tels problèmes puissent survenir à un poste clé dans la sécurité, prévient-elle. Et d'ajouter: «Il faut maintenant examiner à la loupe la procédure d'évaluation et regarder les contrôles effectué sur les personnes.» Par ailleurs, il s'agit désormais de savoir comment trouver une nouvelle personne à la tête du Secrétariat d'Etat à la politique de sécurité... si possible sans couacs.

De son côté, la conseillère nationale PS Priska Seiler Graf ajoute: «Une personne occupant un tel poste doit être absolument intègre. Si les contrôles de sécurité actuels ne peuvent pas le garantir, la commission de gestion doit s'en charger. Et pour le cas de Jean-Daniel Ruch, il faut une enquête au DFAE.»

Jean-Daniel Ruch quitte le DFAE

Interrogé à ce sujet, le DFAE a indiqué avoir pris connaissance de la décision de Jean-Daniel Ruch de renoncer au poste de secrétaire d'État à la politique de sécurité. «Il quitte également le DFAE à sa demande», a déclaré un porte-parole. Jean-Daniel Ruch restera ambassadeur dans la capitale turque Ankara jusqu'à la fin de l'année. Il quittera définitivement le département le 30 juin 2024, a-t-il ajouté, avant de conclure: «Jean-Daniel Ruch ne s'exprimera plus sur ce sujet. Pas non plus sur les accusations concrètes portées contre sa personne.»

Interrogé à son tour, le DDPS souligne qu'il est toujours prévu que le nouveau secrétariat d'État entre en fonction le 1er janvier 2024.

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