Emploi à 270'000 francs
Ignazio Cassis a promu un ami de son parti sans mettre le poste au concours

L'Office fédéral du personnel voulait mettre au concours le poste de délégué à l'Ukraine, mais le Conseil fédéral en aurait décidé autrement. C'est un homme du PLR – le parti d'Ignazio Cassis – qui a obtenu ce poste à 270'000 francs annuel.
Publié: 15:33 heures
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Dernière mise à jour: 17:16 heures
Jacques Gerber (à g.) est le délégué du Conseil fédéral pour l'Ukraine.
Photo: keystone-sda.ch
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Raphael Rauch

Jacques Gerber fait partie des rares fonctionnaires de l'administration fédérale à ne pas devoir se soucier de l'argent. Alors que d'autres postes doivent faire des économies, il lui est permis de dépenser presque sans compter. Le 1er janvier, le Jurassien prendra ses nouvelles fonctions de délégué à l'Ukraine.

Le Conseil fédéral veut soutenir l'Ukraine à hauteur de cinq milliards de francs jusqu'en 2036. L'économie privée suisse va jouer un rôle central dans la reconstruction de l'Ukraine. Jacques Gerber est l'homme de la situation, ont estimé les conseillers fédéraux compétents Ignazio Cassis (PLR) et Guy Parmelin (UDC).

Un poste à 270'000 francs annuel sans mise au concours

Un dossier passionnant attend Jacques Gerber, encore conseiller d'Etat dans le canton du Jura – ainsi qu'un joli salaire de plus de 270'000 francs par an. Pourtant, un détail gêne: le poste n'a pas été mis au concours. Blick a appris, en usant de la loi sur la transparence, que l'Office fédéral du personnel, qui dépend de la ministre des Finances Karin Keller-Sutter (PLR), avait insisté en vain pour que ce poste lucratif soit mis au concours publiquement.

«J'aimerais faire remarquer que le poste devrait être mis au concours publiquement», écrit une fonctionnaire de l'Office du personnel dans une correspondance interne – et de poursuivre: «A ma connaissance, cela n'a pas été fait.» Les chefs du personnel du département des affaires étrangères et du ministère de l'Économie auraient aussi attiré l'attention des conseillers fédéraux Ignazio Cassis et Guy Parmelin sur la mise au concours – mais ceux-ci en auraient «décidé autrement». Apparemment, cet aspect doit être mentionné dans la demande adressée au Conseil fédéral.

«Le Conseil fédéral était informé»

La tentative de Jacques Gerber de conquérir un siège au Conseil des Etats avait échoué en 2023. Ignazio Cassis a-t-il ainsi voulu aider un ami de parti à la recherche d'un emploi? Le DFAE fait savoir que «le poste a été pourvu par une procédure sur invitation en raison de l'urgence élevée et de la durée limitée du poste». Jacques Gerber ne prendra ses fonctions qu'en janvier – et la décision du Conseil fédéral de créer le poste de délégué pour l'Ukraine avait déjà été prise en avril.

En huit mois, n'aurait-il pas été possible de mettre le poste au concours en bonne et due forme? «Le Conseil fédéral était informé de cette procédure, souligne le DFAE. On cherchait une personnalité capable de représenter la reconstruction de l'Ukraine tant au niveau national qu'international et de mener des négociations avec un large éventail de parties prenantes.»

Mais ce n'est pas le seul point qui suscite l'interrogation. A l'avenir, le délégué pour l'Ukraine n'aura pas seulement affaire à la Direction du développement et de la coopération (DDC), mais aussi au Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco). Comme Blick l'a révélé avant Noël, les deux offices se disputent pour savoir qui est compétent en matière de promotion de l'économie privée dans de nombreux cas.

La révision interne demande des améliorations

L'article de Blick a fait réagir en interne. Le DFAE a entre-temps attesté du bon travail de la DDC, mais il estime qu'il y a lieu d'agir: «Les propositions d'amélioration ponctuelles ont été prises en compte par la DDC et sont mises en œuvre de manière continue.»

Mais certains voient les choses différemment: «Le rapport de la révision interne aurait pu être plus critique, déclare une personne impliquée. Le problème fondamental des recoupements thématiques dans le domaine de la promotion du secteur privé demeure.» De plus, la question de savoir ce qu'il adviendra du financement public du développement de l'institution Swiss Investment Fund for Emerging Markets (SIFEM) reste ouverte.

Le DFAE reste vague sur cette question: «La DDC travaille continuellement à l'amélioration de la coordination avec les autres services fédéraux de la coopération internationale. Nous ne pouvons pas donner d'informations sur les objectifs stratégiques du Conseil fédéral pour le SIFEM à l'heure actuelle, ceux-ci sont encore en cours d'élaboration.»

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