«Extrêmement problématique»
Le climatologue Reto Knutti critique la nouvelle loi sur le CO₂

Le Conseil des États s'est penché sur une nouvelle loi sur le CO₂. Après un refus par la population d'il y a deux ans, il se montre prudent. Trop prudent, selon Reto Knutti.
Publié: 01.10.2023 à 17:58 heures
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Dernière mise à jour: 01.10.2023 à 17:59 heures
Tobias Bruggmann

La nouvelle est tombée jeudi matin: au cours des deux dernières années, les glaciers suisses ont perdu pas moins de 10% de leurs surfaces. C'est l'équivalent du double du volume du lac de Bienne qui a disparu. Le changement climatique est en partie à l'origine de cette situation. Décidé à enrayer ce phénomène, le Conseil des États s'est penché la semaine dernière sur une nouvelle loi sur le CO₂. Cela fait maintenant plus de deux ans que la Suisse a rejeté une mise à jour de ce texte.

Aujourd'hui, la prudence est de mise. Pas de taxes plus élevées, pas d'interdictions, mais davantage de moyens pour l'assainissement des bâtiments et davantage de stations de recharge. Tout pour éviter un nouveau non.

Mais le Conseil des États a également réduit la portée du projet. Il ne veut par exemple pas de promotion supplémentaire des stations de recharge pour les voitures électriques dans les immeubles collectifs. Et l'intervention de la conseillère aux États membre des Vert-e-s Lisa Mazzone pour une taxe sur les billets d'avion pour les jets privés n'a eu aucune chance.

Le Conseil des États a revu ses ambitions à la baisse en ce qui concerne la nouvelle loi sur le CO2.
Photo: imago/Christian Ohde
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«La loi est insuffisante»

Reto Knutti, chercheur en climatologie à l'EPFZ, porte un regard critique sur ces décisions. «Les signaux envoyés par le Conseil des États sont extrêmement problématiques.» Pour lui, il est clair que «ces mesures ne nous permettront pas d'atteindre les objectifs climatiques à long terme. De fait, la loi est insuffisante.»

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«Les signaux envoyés par le Conseil des États sont extrêmement problématiques»
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Reto Knutti est critique face aux intentions de la Confédération. Le Conseil des États veut atteindre les deux tiers des objectifs par des mesures prises en Suisse. Pour le reste, des certificats de protection climatique seront achetés à l'étranger. «On laisse ainsi la porte ouverte à ne rien faire soi-même et à s'acquitter en contrepartie de la dette à l'étranger.» Reto Knutti ne voit pas les compensations à l'étranger d'un bon œil. «L'utilité de projets tels que celui-ci pour le climat est très difficile à mesurer.» Selon l'expert, les bénéfices économiques seraient plus importants si la Suisse investissait dans l'innovation et la transformation des infrastructures dans son propre pays.

Des nouvelles taxes d'incitation

Il y aurait encore une chance d'atteindre l'objectif de zéro émission nette d'ici 2050, mais seulement si des mesures plus efficaces étaient prises. Reto Knutti est, par exemple, favorable à de nouvelles taxes d'incitation: «Il y a deux ans, les taxes d'incitation ont été mal expliquées. Des études montrent qu'elles peuvent être acceptées par la majorité avec une redistribution complète, du moment qu'elles sont comprises.» Le principe d'une taxe d'incitation: chacun paie pour les émissions de CO2, mais l'argent est ensuite redistribué. Ainsi, cela peut même rapporter pour les personnes qui consomment le moins de CO2.

En Suisse, il existe déjà une taxe d'incitation sur le CO2. Mais d'autres subventions sont également envisageables pour Reto Knutti. Il est aussi favorable à la promotion des stations de recharge pour les voitures électriques et au mélange de kérosène durable.

Proche du Conseil fédéral

De son côté, le conseiller aux États grison Martin Schmid, membre du PLR, ne cache pas son agacement face à ces débats. Selon lui, les décisions du Conseil des États vont dans le bon sens. «Une loi sur le CO2 plus sévère a été rejetée par le peuple», rappelle-t-il. Selon lui, l'économie fera des progrès dans les années à venir, ce qui permettra d'atteindre les objectifs climatiques.

Le président des Vert'libéraux, Jürg Grossen, n'est pas du même avis. «La chambre haute a malheureusement perdu un peu le nord en fin de législature et n'a pas fait ses devoirs proprement.» Le manque de soutien pour les voitures électriques le déçoit particulièrement. «Cela nous fait prendre encore plus de retard dans le passage à l'électromobilité.» Jürg Grossen craint que de nombreux propriétaires de voitures électriques n'aient pas accès à la recharge à domicile. «Cela rend le passage aux voitures électriques plus difficile, voire impossible. Le Conseil national doit absolument corriger cela.»

Martin Schmid, lui, n'est pas du tout inquiet à ce sujet. «La voiture électrique va se généraliser. Les constructeurs automobiles qui en proposent y veilleront.»

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