Foot suisse, Hamas et élection
Le président du Centre tacle le Socialiste Carlo Sommaruga sur sa venue au match de Servette

Le stade de foot, pas un lieu pour faire campagne? C'est ce que pense le président du Centre, Gerhard Pfister. Il moque la présence au stade de Genève du candidat aux États socialiste Carlo Sommaruga. Mais le foot est loin d'être apolitique, explique un historien.
Publié: 30.10.2023 à 17:30 heures
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Dernière mise à jour: 07.11.2023 à 12:32 heures
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Lucie FehlbaumJournaliste Blick

Gerhard Pfister qui tacle Carlo Sommaruga dans l'entre-deux tour des élections aux États, rien de bien surprenant. Mais que le président zougois du Centre s'attaque au candidat genevois socialiste sur sa présence à un match de foot, c'est une surprise que, d'ordinaire, seul le sport est capable d'offrir.

Sur X (anciennement Twitter), le conseiller aux États sortant a partagé dimanche des photos depuis les gradins du stade de Genève, au match du championnat Servette-Lucerne, remporté par les Grenat (4-2). Le Genevois encourage le club et ajoute: «Dans la vie, il n'y a pas que la politique, il y a aussi le foot!»

«Un peu désespéré»

Pas pour Gerhard Pfister, visiblement. Le Zougois juge cette manœuvre tout à fait opportuniste. En repartageant les images, il tance le socialiste: «Il fait tout pour être réélu. Il semble un peu désespéré.»

Le socialiste genevois Carlo Sommaruga va au stade? Ça n'a pas plus au président du Centre, Gerhard Pfister. Il aimerait un football apolitique. Hypocrite? Un historien réfute l'idée d'un sport «neutre».
Photo: DR

L'Alémanique, membre de la commission de politique extérieure du National, mêle aussi politique et ballon rond. «Les supporters de football n'ont guère de sympathie pour les partis de gauche et pour le Hamas. Mais il se raccroche à tout ce qu'il peut.»

Tacleur taclé

Sur le réseau social d'Elon Musk, les commentateurs s'en donnent à cœur joie. «Quand on est allié à L'UDC, on ironise pas sur ce que les autres sont prêts à faire pour un mandat histoire de pas ajouter le cynisme à l'absence de race, Gerhard», écrit l'un deux. «Vous êtes supporters des Grenat pour si bien les connaître?» ironise un autre.

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Contacté, Carlo Sommaruga botte en touche. Visiblement habitué des piques de Gerhard Pfister, il ne souhaite pas commenter. Le député alémanique, lui, juge finalement au téléphone que politique et sport n'ont pas à être mis dans le même sac.

«C'est exagéré de faire de la publicité pour la campagne pendant un match de foot, estime l'élu centriste. Ce n'est pas le lieu pour se faire photographier et instrumentaliser la rencontre à des fins politiques.»

Le foot, apolitique?

Quant à savoir s'il pense que les fans de la discipline sont tous de droite, il élude: «Les supporters de foot n'ont d'intérêt que pour le foot dès qu'ils sont au stade.»

Vraiment? L'historien à l'université de Lausanne Grégory Quin, notamment maître d'enseignement à l'institut des sciences et du sport, contredit cette idée. Pour lui, le sport est plutôt ancré à droite de l'échiquier politique. Pas le meilleur des calculs donc, si s'agissait d'un calcul, pour le sénateur socialiste Carlo Sommaruga.

«L'ami noir» ou «l'ami homosexuel»

«Pour le dire rapidement, il y a des clubs de gauche, oui, mais le sport est plutôt un fait social de droite, détaille Grégory Quin. Les valeurs du sport sont en phase avec des valeurs néolibérales et conservatrices. Aller plus loin, toujours gagner, et être une nation opposée à une autre.»

Mais alors, les clubs de gauche, ça n'existe pas? «Les clubs de gauche, cela ressemble au fameux 'ami noir' ou à 'l'ami homosexuel', selon que l'on soit raciste ou homophobe», affirme l'universitaire.

Les événements militants dans les stades, comme lors du match du Celtic Glasgow contre l'Atlético Madrid du 25 octobre dernier, sont plutôt du fait de petits groupes. Les supporters du club écossais avaient agité des drapeaux palestiniens, pourtant interdits par leur club. «Ça ne veut pas dire que 40'000 personnes d'un coup sont affiliées à un parti, ou 'de gauche', précise Grégory Quin. Il y a un effet mégaphone.»

Tous au stade

Il n'est donc pas innocent pour un politicien de se rendre au stade lors d'une campagne politique. Entre la foule et la popularité du sport, c'est une garantie de visibilité. Ça n'est pas le libéral-radical vaudois Pascal Broulis, candidat aux États aperçu samedi 28 octobre à la confrontation entre Yverdon Sport et Winterthour, qui dira le contraire.

Or, selon les dires de l'historien Grégory Quin, le stade ne serait pas le terrain de jeu idéal pour un politicien de gauche. Ni Gerhard Pfister ni Carlo Sommaruga ne remporteront le ballon d'or de la communication politique lundi soir...

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