Investissements polluants
«La BNS agit comme un climato-sceptique»

Les nouvelles estimations de l'Alliance pour le climat visent à illustrer l'impact des investissements de la Banque nationale suisse sur le changement climatique. Celle-ci est très critiquée pour son manque de conscience écologique.
Publié: 16.01.2023 à 06:03 heures
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Dernière mise à jour: 16.01.2023 à 08:23 heures
Dana Liechti

La Banque nationale suisse (BNS) continue d'alimenter la crise climatique. C'est du moins ce qu'affirme l'Alliance pour le climat, une coalition de plus de 140 organisations - dont le WWF, Pro Natura et l'Union syndicale suisse.

Manque de transparence

L'Alliance pour le climat a effectué pour la première fois des estimations sur l'ensemble des investissements de la BNS. «Elle gère des actions d'une valeur d'environ 203 milliards de dollars américains, explique Stephanie Wyss, membre du bureau de l'Alliance climatique. Sur 23% de cette somme d'investissement, on ne connait pas la part d'action réellement détenue par l'institution.» Ce pourcentage correspond à une somme d'investissement de 47 milliards de dollars américains.

«Malgré un manque de transparence, une estimation peut aussi être effectuée pour cette partie des investissements, car la BNS investit de manière passive et reproduit ainsi de larges indices de marché», poursuit-elle. L'Alliance climatique publie donc ces jours-ci le résultat de ses investigations sur le site web notre-bns.ch. «Toutes les personnes intéressées peuvent ainsi se faire une idée par elles-mêmes des entreprises dans lesquelles la BNS investit», indique Stephanie Wyss.

L'exploitation du pétrole par Shell a laissé un marais pétrolier dans le delta du Niger.
Photo: Bloomberg via Getty Images
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On peut y trouver des groupes qui comptent parmi les plus gros émetteurs de CO2 au monde. Selon elle, il est incompréhensible que la banque centrale investisse dans de telles entreprises: «Ce faisant, elle agit comme un climato-sceptique», affirme-t-elle.

Investissements dans le pétrole et le gaz

La BNS détient entre autres des actions des producteurs de pétrole et de gaz Shell ou Repsol, qui causent de graves dommages environnementaux et outrepassent régulièrement les droits de l'homme. Avec son exploitation, Shell a par exemple transformé le delta du Niger au Nigeria en un marais pétrolier. Les protestations de la population locale ont été réprimées avec violence.

L'année dernière, Repsol a provoqué au Pérou l'une des plus grandes catastrophes écologiques du pays sud-américain, lorsque près de deux millions de litres de pétrole brut ont été déversés dans la mer.

La BNS estime ne pas enfreindre ses règles

Du point de vue de l'Alliance climatique, la BNS enfreint ses propres directives de placement en investissant dans des entreprises comme Repsol. La banque nationale y stipule qu'elle n'acquiert pas de titres d'entreprises qui «violent massivement les droits humains fondamentaux» ou qui «causent systématiquement de graves dommages à l'environnement».

Pour Stephanie Wyss, il est également choquant que la BNS, grâce aux «énormes paquets d'actions» qu'elle détient dans de tels groupes, puisse en réalité avoir les cartes en main pour influencer leur stratégie climatique, sans le faire pour autant.

Interrogée par Blick, la BNS souligne qu'elle n'a pas enfreint ses directives de placement. La loi ne lui donne pas non plus le pouvoir d'influencer l'évolution de certains secteurs économiques par sa politique de placement.

De plus, la Banque nationale n'investit pas dans des entreprises dont le modèle d'affaires repose principalement sur l'exploitation du charbon pour la production d'énergie, car il existe en Suisse un large consensus sur l'abandon de son utilisation. «Un tel consensus n'existe pas pour le pétrole et le gaz», précise encore l'institution.

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