«Je ne me chauffe que lorsque c'est nécessaire»
Une liaison amoureuse plonge une Suissesse de 62 ans dans le surendettement

Dans la cadre d'une liaison amoureuse, une Suissesse de 62 ans a acheté une maison avec son conjoint. L'histoire d'amour aurait été parfaite, si le conjoint n'avait pas joué un mauvais tour à la sexagénaire. Cette dernière est aujourd'hui criblée de dettes.
Publié: 27.03.2024 à 18:10 heures
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Katharina Siegrist

Rosmarie Michel, une Lucernoise de 62 ans, est assise à la table de la cuisine, penchée au-dessus de deux classeurs dans lesquels sont rangés ses documents administratifs. «Tout revoir, ça remue beaucoup de choses en moi», dit-elle en ramenant une mèche de cheveux gris derrière son oreille.

Certes, il fait frais dehors. Mais à l'intérieur aussi: «Je ne chauffe plus que lorsque c'est absolument nécessaire», dit-elle en resserrant un peu plus sa petite veste en laine autour de ses épaules. Sans parler du nombre incalculable de factures que Rosmarie Michel ne sait pas comment payer.

L'intéressée a demandé à rester anonyme, parce que dans le quartier, tout le monde se connaît. Et ici, les gens parlent, dit-elle.

En septembre 2009, Rosmarie Michel a acheté une maison avec son compagnon de l'époque... «Ça a été la plus grande erreur de ma vie» explique la Lucernoise (image symbolique)
Photo: KEYSTONE

Elle tombe follement amoureuse

Tout commence en 2008, lorsque Rosmarie Michel feuillette le journal local. Par le biais d'une annonce, elle fait la connaissance de Werner Stucki*. L'homme est charmant. Elle tombe rapidement amoureuse. Puis baisse la garde...

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«L'achat de cette maison a été la plus grande erreur de ma vie»
Rosmarie Michel, 62 ans
»

Des années auparavant, Werner Stucki et sa partenaire de l'époque avaient acheté une maison mitoyenne dans le canton de Lucerne. Après leur séparation, Rosmarie Michel rachète alors la part de l'ex-compagne en septembre 2009, avec les 30'000 francs de sa caisse de pension. Elle entre ainsi dans le contrat hypothécaire qui la lie désormais à la banque. Plus rien ne s'oppose désormais à une vraie vie de couple avec Werner Stucki... «Mais l'achat de cette maison a été la plus grande erreur de ma vie» lâche-t-elle, amère.

Elle finit par quitter de force sa propre maison

Car peu après l'emménagement, Werner Stucki montre son vrai visage. Non content de ne pas participer à l'entretien du logement, Rosmarie Michel découvre en effet que Werner Stucki lui aurait également caché des dettes. Lui, reproche à sa compagne d'avoir «installé un couple d'étrangers» chez eux à son insu.

Début décembre 2009, la situation s'envenime. Il s'en prend à elle, des coups sont échangés. Elle appelle la police. Celle-ci expulse le compagnon de la maison et lui interdit de s'y rendre pendant quelques jours. Werner Stucki affirme qu'il n'a fait que se défendre. Tous deux finissent par porter plainte l'un contre l'autre. Les procédures sont ensuite abandonnées.

Rosmarie Michel quitte sa maison, mais Werner Stucki ne lui rachète pas sa part. Elle prend alors une avocate pour rompre le contrat de propriété commune. En 2012, un tribunal décide alors que la maison mitoyenne doit être vendue aux enchères.

Cette décision aurait pu signer la fin de l'histoire. Au contraire.

Les coups du sort se succèdent

Depuis, Rosmarie Michel a perdu son emploi. Certes, elle reçoit une rente AI de 50%, mais elle continue aussi de payer l'impôt foncier sur la maison commune, ainsi que sa part du loyer, bien qu'elle n'habite plus dans le logement.

Rosmarie Michel a longtemps insisté pour que la maison soit vendue aux enchères... Jusqu'en 2014, date à laquelle la maison est mise aux enchères: 19 personnes se pressent pour jeter un coup d'œil aux conditions de la vente aux enchères, ainsi qu'au rapport d'estimation. Mais «en fin de compte, c'était juste des voisins qui voulaient savoir ce qu'il se passait» se plaint Rosmarie Michel, qui ne recevra finalement aucune offre d'achat.

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«Je suis très isolée socialement»
Rosmarie Michel, 62 ans
»

Pire: l'office en charge de l'enchère envoie une facture pour l'organisation de la vente: près de 10'000 francs. Rosmarie Michel et Werner Stucki doivent payer. La sexagénaire rembourse sa part par mensualités de 250 francs. «J'ai eu peur de devoir payer d'autres frais, donc je n'ai plus insisté pour vendre la maison.» Pendant des années, rien ne se passe.

La maison est aujourd'hui devenue un poids dont Rosmarie Michel n'arrive pas à se débarrasser. Les choses ont même empiré. Rosmarie Michel dispose aujourd'hui d'environ 3000 francs par mois.

Problème: lorsqu'elle veut toucher des prestations complémentaires, sa demande est refusée, car la moitié de la maison lui est comptée comme fortune. «Je suis très isolée socialement», renchérit Rosmarie Michel.

Aujourd'hui, ils se rejettent la faute

Pourquoi la maison n'a-t-elle pas trouvé d'acquéreur pendant toutes ces années? L'ancien couple se rejette mutuellement la faute. Rosmarie Michel dit avoir trouvé un acheteur potentiel qui aurait voulu acheter la maison pour un demi-million. Seulement, son ex-compagnon n'aurait pas été d'accord sur le prix. Selon lui, la sexagénaire aurait également refusé d'envoyer au notaire certains documents.

«Maintenant, j'attens le 10 avril», date à laquelle l'office des poursuites a exigé la vente de la maison pour payer d'anciennes dettes de Werner Stucki.

*Nom d'emprunt

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