La stratégie du loud quitting
Pour se faire augmenter, ils menacent de démissionner... ce qui est risqué

Si l'employeur refuse d'écouter, cela peut devenir bruyant: de plus en plus d'employés se lâchent pour obtenir une augmentation de salaire et menacent de démissionner.
Publié: 01.05.2023 à 14:01 heures
Martin Schmidt

On pourrait s'attendre à ce que les employés aient le dernier mot dans les négociations en raison de la pénurie actuelle de personnel qualifié. Mais en réalité, ils se cassent souvent les dents sur la question des augmentations de salaire. Cela génère de la frustration et, depuis peu, une attitude moins tolérante. Certains collaborateurs se lâchent et menacent même de démissionner s'ils n'obtiennent pas une augmentation de salaire: un phénomène que l'on nomme le «loud quitting».

Un coup d'œil sur les chiffres montre que les employeurs ont tendance à se montrer radins en matière d'augmentations de salaire. L'année dernière, l'augmentation générale des prix de 2,8% a plus que mangé l'augmentation moyenne des salaires de 2,2%. En Allemagne et aux Etats-Unis, les salaires réels ont même baissé de plus de 3%. Il n'est donc pas surprenant qu'aux Etats-Unis, les jeunes travailleurs soient plus nombreux à taper du poing sur la table.

Risque de licenciement pour les trop audacieux

«En règle générale, seuls les travailleurs très recherchés sur le marché du travail et qui trouveraient immédiatement un autre emploi font usage de ce moyen», explique Matthias Mölleney, expert du marché du travail, au «Tagesanzeiger».

La pénurie de personnel qualifié ne cesse de s'aggraver: que ce soit dans les soins...
Photo: Luisa Ita
1/5

En effet, celui qui surestime sa position de négociation peut rapidement se retrouver sur le carreau. Car les employeurs peuvent aussi considérer l'attitude chahuteuse comme un manquement de loyauté. Ce qui peut se solder par un avertissement, voire, dans le pire des cas, par un licenciement.

Pénurie attendue de 365'000 spécialistes dans deux ans

Mais la pénurie de personnel qualifié a désormais touché pratiquement tous les secteurs en Suisse: les restaurants et, depuis peu, le groupe hospitalier de Fribourg, réduisent leurs horaires d'ouverture. Les entreprises informatiques et les groupes industriels cherchent désespérément du personnel. Selon une étude de l'agence de placement Dynajobs AG, il manquera 200'000 personnes cette année. Dans deux ans, ce sera 365'000 personnes.

«En période de grave pénurie de main-d'œuvre qualifiée, les travailleurs ont généralement plus de pouvoir, et c'est pourquoi le groupe qui peut se permettre un 'Loud quitting' est inhabituellement important», explique Matthias Mölleney au «Tagesanzeiger».

La semaine à 4 jours pour attirer les salariés

Si certains employeurs sont réticents à accorder des augmentations, d'autres tentent en revanche d'être plus attractifs en proposant des meilleures conditions d'emploi. Blick avait notamment traité de ceux qui mettaient en avant la semaine à 4 jours.

Si une telle démarche semble a priori très coûteuse, elle serait en réalité viable, selon ses précurseurs, car la productivité gagnée semble compenser le jour de travail perdu. D'ailleurs, la population helvétique semble être majoritaire à soutenir un tel rythme de travail. Comme le relaye le «Tagesanzeiger», deux-tiers de la population soutiendrait ce modèle, que l'Islande a d'ailleurs récemment introduit.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la