Le MCG Mauro Poggia, en tête pour le Conseil des États
«Je n’ai pas d’étiquette, je peux aller chercher des solutions de bon sens»

Élections fédérales à Genève: à la surprise générale, le Mouvement citoyens genevois (MCG) fait une percée. Sa figure de proue, Mauro Poggia, est en tête de liste pour le Conseil des États, d'après les résultats provisoires. Interview à chaud.
Publié: 22.10.2023 à 16:53 heures
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Dernière mise à jour: 24.10.2023 à 11:09 heures
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

Surprise, à Genève. Après une hégémonie de la gauche au Conseil des États — qui a duré seize ans — il semblerait que le vent soit en train de tourner. D’après les résultats préliminaires du premier tour de l’élection au Conseil des États, c’est Mauro Poggia, figure de proue du Mouvement citoyens genevois (MCG), qui caracole en tête des suffrages.

Avec 37’852 voix, l'ancien conseiller d'Etat est suivi par la Verte Lisa Mazzone qui comptabilise 36'741 votes aux premiers dépouillements. Le socialiste sortant, Carlo Sommaruga, arrive quant à lui en troisième position, avec 36'689 bulletins à son actif. Vient ensuite… la conseillère nationale Céline Amaudruz (UDC) avec 27'7168 suffrages. Un coup dur pour le PLR et le Centre.

D'après les termes de l'alliance que la droite genevoise avait promis de constituer au second tour de l'élection aux États, les deux noms qu'elle devrait présenter pour le sprint final sont ceux de ses deux leaders, soit Mauro Poggia et Céline Amaudruz. À noter que, sur le plateau télé de Léman Bleu, la vice-présidente de l'UDC Suisse a directement confirmé se présenter au second tour, dans la foulée des premiers résultats.

D'après les résultats préliminaires du premier tour de l'élection au Conseil des Etats, c'est Mauro Poggia, figure de proue du MCG, qui caracole en tête de liste.
Photo: keystone-sda.ch
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Quoi qu'il en soit, c'est un coup d’éclat pour les «populistes» du MCG. Et, si tant est que le score de Mauro Poggia se confirme, ce serait une percée historique. Le MCG a déjà siégé à Berne, au Conseil national en 2011, grâce au même Mauro Poggia, puis à Roger Golay. Mais il n’a, jusqu’à présent, jamais obtenu de siège à la chambre haute. Interview à chaud du ténor du parti genevois.

Mauro Poggia, vous caracolez en tête de l’élection au Conseil des États, d’après les résultats préliminaires. Vous vous y attendiez, à ce score canon?
Je suis convaincu que c’est le résultat du bon travail qui a été fait. Si je dis que c’était attendu, c’est prétentieux. Donc, je dirai simplement que j’attendais un bon résultat. Bien qu’il y ait encore des incertitudes, c’est une belle reconnaissance après dix années passées au gouvernement genevois.

À l’annonce des résultats, face à sa montée en puissance, le MCG s’est tout de même fait fortement huer par la gauche, sur le plateau de Léman Bleu. Une scène assez rare.
J’ai l’habitude de la stupidité des gens. Je crois qu’ils huaient plutôt les personnes qui ont mis les bulletins dans les urnes. Et puis eux-mêmes, puisque c’est leur résultat qui les a insatisfait, avant toute chose. Mais je n’ai pas la mémoire courte: je sais d’où je viens, d’où vient le MCG. Il y a dix ans, lorsque j’entrais au Conseil d’État genevois, on disait déjà ce que j’entends aujourd’hui, dans la bouche de la gauche. À savoir qu’il ne sert à rien de voter pour moi, puisque j’aurai tout le monde contre moi, et n’arriverai à rien. Dix ans plus tard, c’est le contraire qui s’est avéré vrai: comme je n’ai pas d’étiquette de droite ou de gauche, je peux aller chercher des solutions de bon sens, et rassembler des gens autour de ces solutions.

Justement, en parlant d’étiquettes, le conseiller aux États socialiste sortant Carlo Sommaruga vous a récemment accusé, sur le plateau de la RTS, de piquer le programme de la gauche...
Je crois qu’en matière de système de santé et d'assurance maladie, cela fait depuis la fin du siècle passé que je porte le même programme. Quand on constate que Carlo Sommaruga n’a quant à lui pas déposé un seul texte dans ce domaine en quatre ans, on peut se demander s’il est à Berne pour suivre docilement le programme de son parti, ou pour être une force de proposition.

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«Il ne faudrait pas me faire passer pour un incapable alors que je pense avoir démontré le contraire»
Mauro Poggia, MCG
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C'est la Verte Lisa Mazzone qui vous emboîte le pas, pour le Conseil des États, d'après les résultats préliminaires. Mais il est encore probable que vous finissiez par gouverner à la chambre haute aux côtés de Carlo Sommaruga, justement… Si c'est le cas, vous allez réussir à vous entendre?
Oui, je travaille avec toute personne intelligente. Et il l’est. Maintenant, il lui faudra faire attention à ce qu’il dit pendant la campagne. Je ne suis pas rancunier, mais j’ai de la mémoire. Il ne faudrait pas me faire passer pour un incapable alors que je pense avoir démontré le contraire.

Autre point sur lequel la gauche risque de vous tacler: vous n’avez pas de groupe parlementaire, à Berne. Lorsque vous aviez été élu au Conseil national en 2011, vous n’aviez pas conclu d’accord avec un autre parti pour rejoindre un groupe. Un scénario isolant, qui risque de se répéter?
Je serai dans un groupe parlementaire quoi qu'il arrive, si je vais à Berne à l'issue de ces élections. Des discussions sont en cours.

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«Tout dépendra de si le Centre et le PLR vont respecter les accords que nous avons passés»
Mauro Poggia, MCG
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Votre grande thématique, c'est la santé. Pourtant, lorsque vous étiez au Conseil national, il y a dix ans, les dossiers liés à l’assurance maladie n'ont pas beaucoup bougé, pendant votre mandat… Pourquoi ce serait différent, cette fois?
J’ai siégé à Berne pendant moins de deux ans, à ce moment (ndlr: élu au Conseil d’Etat genevois, Mauro Poggia avait alors laissé son siège au National à Roger Golay dès 2013). De plus, je siégeais à la chambre basse, où j’étais un parmi 200. Si je suis élu aux États, je serai un parmi 46. Mais ce n’est pas encore fait: il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Aussi, tout dépendra de si le Centre et le PLR vont respecter les accords que nous avons passés.

Justement: on vous qualifiait, avec l’UDC, de «porteurs d’eau» de cette même alliance de droite, qui a connu un succès au niveau cantonal lors des élections de ce printemps. Des rapports de force qui semblent s’être inversés. Une belle revanche?
Ce n’est pas une revanche, puisqu’une revanche est un acte délibéré qui a un effet. Ce sont les électeurs, qui ont choisi avant tout des personnalités, aux États. Pour ce qui est du National: nous avons en effet obtenu deux sièges, que personne n’espérait. Même pas nous.

Le PLR va tout de même devoir ravaler sa fierté, au second tour. Puisque, d’après ces résultats préliminaires, c’est Céline Amaudruz et vous-même qui serez les deux candidats de la droite au Conseil des États.
Le but, c’est que personne ne se sente dévalorisé à la suite de cette élection. Si on veut construire quelque chose ensemble, il n’y a rien de pire que de se penser en victime. Le MCG n’a, en tout cas, jamais voulu utiliser qui que ce soit. Mais il est vrai que, lorsque nous avons conclu cette alliance, beaucoup pensaient que ce serait une alliance en faveur du Centre et du PLR. Donc on ne peut pas accuser le MCG d’avoir rejoint l’alliance pour tirer la couverture à soi.

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