Le voyagiste est en danger
Mais qu'est-ce que Migros va faire d'Hotelplan?

Migros annonçait il y a quelques mois la vente de sa filiale de voyage Hotelplan. Une démarche pour laquelle Migros prend son temps. Et pour cause: trouver un acheteur n'est pas chose aisée. Mais il existe tout de même plusieurs scénarios. Blick les a tous analysés.
Publié: 25.03.2024 à 15:58 heures
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Jean-Claude Raemy

Le 2 février dernier, Migros a rendu public son projet de vente. Une annonce qui a fait grand bruit. Depuis, le géant orange cherche un acheteur pour le voyagiste Hotelplan, créé par le fondateur de Migros Gottlieb Duttweiler (1888-1962) en avril 1935. Mais depuis, le silence est roi autour de cette icône du secteur suisse du voyage. Mardi encore, le grand distributeur ne pourra pas donner de nouvelles officielles concernant Hotelplan lors de sa conférence de presse annuelle sur le bilan.

«Le processus de vente va probablement prendre du temps», explique brièvement Migros. Et c'est inévitable. Car les acheteurs potentiels intéressés par Hotelplan ne se bousculent pas au portillon, comme le rapporte une source interne que Blick a pu consulter. Et du côté du géant orange, il semble même que personne ne s'attend à une vente complète.

Découper Hotelplan en morceaux?

Des concurrents suisses comme Tui Suisse et Kuoni, qui ont des sociétés mères allemandes derrière eux, pourraient certes supporter l'achat. Mais quel serait leur intérêt? Il n'y en a pas. Une fusion engendrerait inéluctablement une réduction massive du personnel. Et ni Migros, ni les acheteurs le souhaitent. Pour ces derniers, seules certaines parties d'Hotelplan sont intéressantes. Mais Migros aimerait idéalement vendre sa filiale dans son ensemble...

Le siège d'Hotelplan à Glattbrugg (ZH): sera-t-il maintenu en cas de scission de l'entreprise?
Photo: Jean-Claude Raemy
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De leur côté, des sociétés pourraient découper Hotelplan en morceaux et en tirer une somme plus élevée que le prix d'achat. Migros pourrait également le faire. Mais le géant orange ne le fera qu'en cas d'urgence.

Trop peu d'intérêt pour l'activité principale

L'unité d'Hotelplan la plus convoitée est sans nul doute Interhome, la plateforme spécialisée dans les appartements de vacances, qui a réalisé des résultats records ces dernières années. Régulièrement, des intéressés ont frappé à la porte de la direction de Migros avant même l'annonce de la vente. Des repreneurs auraient en outre exprimé leur intérêt pour Hotelplan UK, qui regroupe des spécialistes en matière de vacances de ski et de randonnée en Grande-Bretagne.

Mais Hotelplan Suisse comprend également 82 agences de voyages, Travelhouse (spécialiste des voyages sur mesure), le secteur Volume Tour Operating (vacances balnéaires et voyages en ville) et les deux entreprises de voyages d'affaires BTA First et Finass. Ensemble, elles réalisent certes plus de 71% du chiffre d'affaires du groupe. Mais personne ne sait exactement ce qui reste en fin de compte: Hotelplan n'est pas coté en bourse et ne communique pas publiquement ses bénéfices. Le fait est qu'entre 2010 et 2019, les bénéfices ont rarement été au rendez-vous. Et quand c'était le cas, le niveau était faible.

Peu de poids dans le groupe

Le patron de Migros Mario Irminger, qui siège aussi au conseil d'administration d'Hotelplan depuis avril 2023, a sans doute décidé de mettre un terme à l'activité de la filiale. La marque Hotelplan – dont le nom même semble désuet – n'apporte rien à l'image de la marque principale Migros. L'ère Duttweiler inspire-t-elle au moins un peu de nostalgie? Non, l'ère actuelle est celle de la «nouvelle» Migros. La perte d'importance de la filiale de voyage est également illustrée par le fait que la directrice d'Hotelplan, Laura Meyer, a été informée la vente à venir, seulement deux semaines avant qu'elle ne soit officiellement annoncée.

«Migros va insister pour que les dettes d'Hotelplan accumulées pendant la pandémie de Covid soient remboursées dans une large mesure. Sinon, il y aura des amortissements spéciaux dans le bilan, ce que personne ne souhaite», déclare un autre initié à Blick. Les chiffres actuels d'Hotelplan semblent toutefois rendre la vente moins urgente qu'il n'y paraît: la marche des affaires en 2024 serait bonne, malgré le mauvais timing de l'annonce de Migros, en plein milieu de la saison des réservations pour les vacances.

Qu'est-ce que Hotelplan a à offrir?

Mais le problème demeure: le secteur classique des voyages d'Hotelplan n'est pas assez sexy pour les acheteurs potentiels. Et de nombreuses questions restent sans réponse: un acheteur pourrait-il continuer à louer les locaux au sein même des centres commerciaux Migros à des tarifs préférentiels? Pourrait-il continuer à placer des annonces à bas prix dans «Migros Magazine»? Que se passerait-il vis-à-vis de la marque bien établie Vacances Migros? Une unité suisse d'Hotelplan amputée d'Interhome et d'Hotelplan UK pourrait être rentable. Mais qui prendrait le risque d'un tel rachat?

Trois scénarios sont envisageables:

  1. Une société de participation courageuse prend le relais.
  2. Une fondation ou une association rachète Hotelpan. On pourrait imaginer la fondation F.G.-Pfister, qui s'engage pour le maintien des emplois en Suisse. Ou le TCS, qui a vendu «son» voyagiste Kuoni en 2010, et qui caresserait l'idée d'un retour dans le secteur du voyage.
  3. Hotelplan tente de se transformer en société ouverte au public, c'est-à-dire d'entrer en bourse, peut-être avec des participations plus importantes.

Le service de presse d'Hotelplan ne veut rien dire sur ces scénarios. Idem chez Migros. Le géant orange ne se laisse aucunement approcher. Jusqu'à présent, la directrice d'Hotelplan Laura Meyer aurait cependant réussi à rassurer ses collaborateurs. Ces derniers seraient confiants quant au fait que le patron de Migros Irminger saura prendre la bonne décision. En conséquence, le personnel ne fuit pas. Si Blick peut attester de tentatives de débauchage, il n'y a, jusqu'à présent, pas eu de vague de licenciements.

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