Les centres de conseil tirent la sonnette d'alarme
Trop de Suisses se font avoir par l'endettement, et n'en sortent jamais

Rien qu'en 2023, plus de 6000 ménages surendettés ont demandé de l'aide auprès des services compétents. Nombreux sont ceux qui ne peuvent pas rembourser leurs dettes. C'est majoritairement l'État qui s'en charge. Le monde politique l'a enfin reconnu et souhaite agir!
Publié: 03.08.2024 à 06:01 heures
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Dernière mise à jour: 03.08.2024 à 07:59 heures
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Daniel Ballmer

Tout commence souvent par un coup de malchance: une maladie, un accident, une perte d'emploi ou une séparation. Mais les travailleurs de la classe populaire, les anciens indépendants ou les joueurs compulsifs sont aussi concernés. En Suisse, de plus en plus de personnes tombent dans le piège de l'endettement. Alors qu'en 2022, les services spécialisés avaient conseillé 5216 ménages pour la première fois, ils étaient déjà 6169 en 2023.

«Nous constatons une évolution croissante», déclare Pascal Pfister, directeur de Dettes Conseils Suisse (DCS). «Certains services spécialisés enregistrent une véritable ruée.» L'une des raisons est sans doute l'inflation, qui s'est certes à nouveau ralentie mais qui a touché les personnes à bas revenus. Problème: une fois que l'on est tombé dans le piège de l'endettement, il est difficile d'en sortir. «En ce sens, la situation est préoccupante», ajoute Pascal Pfister.

61'459 francs de dettes en moyenne

Plus l'endettement dure longtemps, plus les personnes concernées s'enfoncent dans les dettes. Contrairement à d'autres pays, les dettes restent jusqu'à la fin de la vie en Suisse. Et les dettes ne fonctionnent pas comme d'autres délits: il n'y a pas de délai de prescription. Les personnes condamnées doivent pouvoir se réinsérer dans la société. Pour les personnes endettées, en revanche, il n'y a souvent pas de deuxième chance.

En Suisse, de plus en plus de personnes tombent dans le piège de l'endettement.
Photo: Siggi Bucher
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La valeur moyenne des dettes est de 61'459 francs. La moitié des personnes qui ont demandé conseil au service compétent sont endettées à hauteur de 12'577 à 70'963 francs. Les valeurs des années précédentes se situaient à des niveaux comparables. Près des trois quarts des personnes concernées ont des dettes fiscales. Trois cinquièmes ont des dettes envers la caisse maladie. Les frais de santé non payés sont également très répandus. Les dettes de crédit et de carte de crédit s'élèvent à environ 22% chacune.

Les dettes à long terme restent souvent à la charge de l'État. Lorsqu'une personne s'endette au point d'être saisie, elle ne peut garder que l'argent nécessaire. Par exemple pour le loyer ou la caisse maladie… ce que l'on appelle le minimum vital.

Jusqu'à présent, les impôts n'en font pas partie. Conséquence: les personnes saisies ne peuvent pas payer les impôts courants et contractent donc inévitablement de nouvelles dettes auprès de l'administration fiscale. Sans qu'ils ne commettent la moindre faute. L'État est le créancier pour environ 55% de toutes les dettes.

La nécessité d'agir!

La situation est donc loin d'être indifférente à l'État. Le Conseil national et le Conseil des États l'ont également reconnu: les débiteurs ne doivent pas accumuler de nouvelles dettes à cause des impôts. Le Parlement estime que le calcul du minimum vital des débiteurs au regard du droit des poursuites devrait à l'avenir tenir compte de leurs impôts. Pour les personnes endettées, c'est un grand soulagement. «C'est un pas important pour les personnes endettées», estime également le directeur de l'ASPAS Pascal Pfister. Le Parlement a reconnu le problème, mais d'autres mesures sont nécessaires.

Une possibilité serait d'introduire des procédures d'assainissement avec une libération des dettes résiduelles. Le Conseil fédéral a reconnu la nécessité d'agir dans ce domaine et un projet est attendu au Parlement d'ici la fin de l'année. Parallèlement, le service de conseil en matière d'endettement souhaiterait une prévention plus efficace. «Tout cela améliorerait nettement la situation des personnes endettées en Suisse, estime Pascal Pfister. Nous devrions donner une deuxième chance aux gens!»

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