Les présidents des autres partis réagissent aux «affaires» Dugerdil
Le président de l'UDC Genève ne démissionne pas? «C’est de la politique de cow-boy!»

Le président de l'UDC Genève Lionel Dugerdil a été au centre de plusieurs affaires, depuis un an. Épinglé par son parti pour son casier judiciaire, il n’a pas l’air sur le départ. Circulez, y'a rien à voir? Les présidents des autres partis genevois réagissent.
Publié: 13.02.2024 à 16:15 heures
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Dernière mise à jour: 13.02.2024 à 17:06 heures
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

Lionel Dugerdil va-t-il rester à la tête de l’Union démocratique du centre (UDC) genevoise? C'est la question que nous avons posée aux présidents et présidentes des autres partis politiques représentés à Genève.

Avant de donner la parole aux gorges chaudes, rappelons les faits. Le politicien a été reconnu coupable de lésions corporelles simples en 2022, pour avoir cogné un homme avec une fourche jusqu'au sang deux ans plus tôt — entre autres affaires, successivement révélées par Blick depuis un an.

Le viticulteur de profession est également accusé d’avoir «menti» à son propre parti quant à son casier judiciaire, en amont des élections fédérales, où il se profilait comme candidat (avant de se retirer). Quelques-uns de ses camarades politiques affirmaient, au début de ce mois de février sur nos plateformes, qu’il était ainsi sur la sellette à l’interne, d’après eux, depuis nos dernières révélations.

Lionel Dugerdil, actuel président de l'UDC Genève, serait dans la tourmente à l'interne, à force d'«affaires» successives et «mensonge» présumé quant à son casier judiciaire. Qu'en pensent les autres présidents de parti? (Image d'archives)
Photo: Keystone

Silence radio à l'UDC Genève

Pourtant, le nouveau président du parti conservateur du bout du Léman, en place dès le mois de décembre, n’a pas bougé d’un iota depuis. Malgré la supposée fronde d'une partie de ses collègues, qui nous avaient parlé sous couvert d'anonymat, officiellement, c'est le silence radio, à l'UDC Genève. Aucun communiqué, par exemple, ne parle du cas Lionel Dugerdil, peut-on constater sur le site web de la section cantonale.

Interrogée, une source bien rencardée au sein du parti, qui n'a pas souhaité être nommée, nous confie cependant: «Il y a clairement une bagarre entre l’ancien Comité directeur — qui était sous l’égide de Céline Amaudruz (ndlr: conseillère nationale et vice-présidente de l’UDC Suisse) — et le nouveau Comité de Lionel Dugerdil. Tout le monde attend de voir comment ça va tourner.»

La parole aux autres présidents

C’est-à-dire? «Tout va dépendre de si l’UDC Suisse se manifeste, avance notre interlocuteur. Mais, pour moi, c’est clair: on ne peut pas avoir un type qui ment sur son casier judiciaire à la tête du parti, je ne devrais même pas avoir besoin de le dire tellement ça me semble évident.»

Le parti au niveau national, à l’image de la section de Genève, n’a pas commenté publiquement le dernier volet des affaires Lionel Dugerdil. Les présidents de l’UDC vaudoise et neuchâteloise se sont quant à eux (timidement) exprimés, vantant les mérites de leurs «commission d’éthique» ou du processus de recrutement, censés éviter que des profils non adéquats ne se retrouvent à des postes à responsabilité.

Nous avons voulu donner la parole aux homologues de Lionel Dugerdil au sein des six autres partis représentés au parlement genevois. Que signifie ce silence de la part de l’UDC, et qu’est-ce que cela dit du climat politique général?

Sans surprises, les formations de droite, alliées (pour la plupart) au parti conservateur lors des deux précédentes échéances électorales, font de la langue de bois. Le Parti socialiste (PS) et les Vert-e-s sont quant à eux ouvertement critiques. Tour d’horizon.

Une banalisation de la violence?

Leader des socialistes de Genève, Tomas Wenger trouve-t-il légitime que le président de l’UDC conserve son siège, au vu de la situation? Celui qui est aussi député au Grand Conseil rétorque, de manière aussi succincte que catégorique: «Je doute sérieusement que les démêlés avec la justice et la condamnation récente du nouveau président de l’UDC soient compatibles avec une telle fonction. Il devrait à mon avis en tirer les conséquences, ou son parti le faire pour lui.»

Thomas Wenger, président du parti socialiste genevois et député, se montre critique envers le fait que Lionel Dugerdil a conservé sa position de chef de l'UDC Genève. (Image d'archives)
Photo: keystone-sda.ch

Contactée à son tour, la conseillère nationale et présidente des Vert-e-s genevois, Delphine Klopfenstein Broggini, estime elle aussi que Lionel Dugerdil devrait probablement tirer sa révérence, après les dernières révélations: «Bien sûr que le bagage du nouveau président de l’UDC Genève me choque.»

Qu’il reste en place malgré tout, voire qu’il soit encensé pour le fait d’assumer ses condamnations? «C’est de la politique de cow-boy. Cela engendre la banalisation et la légitimation de ce genre d’actes (ndlr: de violence physique, en référence au coup de fourche donné au promeneur).»

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«On avait déjà une vue d’ensemble»

Bien qu’on ne lui ait pas demandé son casier judiciaire lorsqu’il a été nommé à la présidence de la section cantonale du parti, la patronne des Vert-e-s estime par ailleurs qu’«il y avait beaucoup d’informations (ndlr: quant à son passif) qui existaient déjà, même si on n’avait pas tout le détail» – en référence aux précédentes «affaires» Lionel Dugerdil relatées dans les médias.

Delphine Klopfenstein Broggini, conseillère nationale et présidente des Vert-e-s genevois, ne mâche pas vraiment ses mots, concernant le cas Lionel Dugerdil. (Image d'archives)

L’écologiste poursuit: «Pour moi, l’UDC Genève devait donc être en mesure d’apprécier la situation. On avait déjà une vue d’ensemble du profil de Lionel Dugerdil» avant sa nomination. «Si le grand public était au courant, j’imagine que le parti devait l’être davantage encore.»

«Laver son linge sale en famille»

À droite de l’échiquier politique, c’est un peu le même son de cloche de toutes parts: le cas Lionel Dugerdil ne regarde personne d’autre que l’UDC, soutiennent de concert nos interlocuteurs. Sollicitée, Florence Florenza-Decurtins, présidente de Libertés et Justice sociale (LJS), le parti de Pierre Maudet entré au Grand Conseil en 2023, se fend d’une réponse écrite: «Notre mouvement n’entend pas commenter une affaire interne à une autre formation politique.»

Francois Baertschi, président du Mouvement citoyens genevois (MCG) et député, reste dans les clous et se garde de tout commentaire critique envers l'UDC, qui souvent, est son alliée au parlement. (Image d'archives)
Photo: KEYSTONE

Du côté du Mouvement citoyens genevois (MCG), François Baertschi, à sa tête, affirme: «Chacun doit laver son linge sale en famille. Ce sont des questions qui ne nous concernent pas directement. Ce genre de problèmes peuvent arriver dans un parti comme un autre, d’ailleurs. Si je peux parler de manière générale, c’est un peu le jeu de la politique, d’avoir des 'difficultés à l’interne'», avance le politicien. Le président du Centre genevois, Jacques Blondin, n’a tout simplement pas souhaité faire de commentaires sur son homologue de l’UDC.

À la population d’en juger?

Pierre Nicollier, président du Parti libéral-radical (PLR), est à peine plus bavard: «Chaque parti doit gérer ses propres affaires, ce n’est pas aux autres de s’en mêler», avance l’homme de droite.

Le député et président du Parti libéral-radical (PLR) genevois, Pierre Nicollier, ne se mouille pas trop non plus. Tout en se permettant de souligner l'impact potentiel de toutes ces «affaires» Dugerdil sur l'image de l'UDC. (Image d'archives: capture d'écran Léman Bleu)

Mais il ajoute: «Au final, ce sera à la population d’en juger, le poste de président étant lié à l’image que renvoie le parti. Nous verrons, aux prochaines élections, comment la population le perçoit.»

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