Les retraités de l'étranger se défendent contre les accusations de l'UDC
«Les rentiers AVS à l'étranger sont une plus-value pour l'économie suisse»

Dans le cadre de la campagne de votation sur la 13e rente AVS, les retraités résidant à l'étranger sont pris à partie. Ils se défendent contre ces accusations et expliquent les raisons d'un départ à la retraite à l'étranger ainsi que les difficultés qu'ils rencontrent.
Publié: 02.02.2024 à 06:04 heures
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Dernière mise à jour: 02.02.2024 à 09:02 heures
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Jean-Claude Raemy et Ruedi Studer

Cela ne devrait pas être du goût de la direction de l'UDC: 57% des partisans de l'UDC veulent voter oui à l'initiative pour une 13e rente AVS, comme le montre le dernier sondage de la SSR sur le référendum attendu le 3 mars 2024.

La direction du parti rejette l'initiative et prend pour cible les retraités qui se sont installés à l'étranger. Plus de 126'000 citoyens suisses et environ 660'000 étrangers qui travaillaient auparavant en Suisse perçoivent aujourd'hui leur retraite suisse à l'étranger.

Ils sont présentés comme des profiteurs qui reçoivent plus d'argent et qui profitent du franc fort mais qui «ne contribuent aux coûts supplémentaires ni par une TVA plus élevée ni par des déductions salariales plus importantes», écrit la conseillère nationale UDC Martina Bircher dans une newsletter. Elle ajoute qu' «avec une 13e rente AVS, ce sont les étrangers et les Suisses de l'étranger qui en profiteraient en premier lieu». C'est profiter de «l'artisanat suisse et de la population qui travaille en Suisse», dénonce Martina Bircher qui parle de «rentes de luxe à l'étranger».

La vie de retraité à l'étranger a de bons côtés – mais pas seulement, dit Klaus Oegerli, qui vit à Hua Hin en Thaïlande.
Photo: zVg
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Une offre de prestations moins étoffée

Les Suisses de l'étranger s'y opposent avec véhémence. «Les rentiers AVS à l'étranger sont une plus-value pour l'économie suisse», déclare au Blick Klaus Oegerli, qui vit à Hua Hin, en Thaïlande. Il constate que tous les bénéficiaires de l'AVS à l'étranger – les Suisses de l'étranger ainsi que les étrangers qui ont travaillé et cotisé à l'AVS en Suisse et qui sont rentrés dans leur pays pour leurs vieux jours – subissent divers désavantages. «Nous n'avons pas droit aux prestations complémentaires, à l'aide sociale ou à des prestations comme l'allocation pour impotence et l'aide financière aux moyens de soutien.»

Tout aussi important, ils ne génèrent pas de coûts pour le système de santé suisse. «A l'étranger, nous payons peut-être des primes d'assurance-maladie moins élevées, mais nous avons généralement un système de santé moins bon, qui peut même être plus cher qu'en Suisse pour des interventions plus importantes.»

Klaus Oegerli exprimera son opinion via un bulletin de vote. Il demande pourquoi l'UDC s'en prend aux Suisses de l'étranger alors que le milliardaire Christoph Blocher, loin d'être dans le besoin, a fait valoir son droit de rente.

Les Suisses de l'étranger ont contribué à la création de valeur

Joe Bühler a 75 ans. Il est domicilié à Shelton (USA) non loin de New York et trouve également ces reproches injustes: «Tous ont cotisé pendant des années ou des décennies et ont légitimement droit aux versements de l'AVS.» Selon lui, ces derniers sont exposés aux fluctuations des taux de change, qui peuvent aussi être désavantageuses. «Cela ne fait des Suisses de l'étranger ni des profiteurs ni des victimes, c'est simplement la réalité», poursuit-il.

De plus, les Suisses de l'étranger contribuent à la création de valeur en Suisse. Joe Bühler fait référence à son activité de près de 25 ans chez Suisse Tourisme. «J'ai apporté une contribution à l'économie suisse de l'export qui, si elle n'était pas directement mesurable, n'en était pas moins réelle.»

Les banques profitent

A 63 ans, Marcel Frey est préretraité depuis mai 2023 et réside désormais à Athènes, la capitale de la Grèce. Il souligne plusieurs problèmes concernant les expatriés: «Les caisses maladie suisses n'accordent pas de garantie de paiement pour les traitements à l'étranger tant que le processus d'admission n'est pas terminé. En Grèce, cela prend environ un an!» Ainsi, il doit payer toutes les factures médicales à l'avance et la caisse maladie «regarde ensuite s'il faut procéder à un remboursement».

Il y a aussi le problème des virements à l'étranger. «Ma banque Avera ne veut pas de clients résidant à l'étranger, c'est pourquoi j'ai dû clôturer mon compte», explique Marcel Frey. Actuellement, il fait virer sa rente sur un compte en euros auprès de la banque en ligne Wise.

En raison des conventions de sécurité sociale, les paiements de rentes à l'étranger sont généralement effectués dans la monnaie du pays de résidence. La caisse de compensation effectue les paiements par l'intermédiaire de Postfinance. Selon Marcel Frey, Wise lui a proposé un taux de change de 1 franc pour 1,054 euro, alors que Postfinance se basait sur 1,036 euro. «Certains se font un peu d'argent sur le dos des Suisses de l'étranger», juge-t-il.

Il s'agit notamment de banques qui proposent encore des comptes aux Suisses de l'étranger. A la ZKB par exemple, les frais de tenue de compte s'élèvent à 450 francs par an, selon le préretraité. La Banque cantonale de Genève offrait l'alternative la moins chère avec «seulement» 120 francs par an.

Intervenir ailleurs?

Marcel Frey, un initié des assurances sociales, est «heureux qu'on puisse encore vivre avec une rente AVS en Grèce». A cause de son séjour à l'étranger, de son statut d'indépendant et de son activité d'homme au foyer à temps partiel, il perçoit une rente modeste.

Il se demande néanmoins si la 13e rente AVS est la bonne approche. «En fait, la discrimination des couples devrait être abolie, car en tant que couple, on ne reçoit que 150% de la rente individuelle fractionnée», explique Marcel Frey. Par ailleurs, les cotisations AVS seraient, selon lui trop faibles.

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