Meurtre dans la Garde suisse
Une avocate italienne s'en prend au Vatican

Il y a 25 ans, un garde suisse commet un acte de violence tragique en abattant son supérieur hiérarchique, la femme de ce dernier, avant de se donner la mort. Aujourd'hui, l'avocate italienne Laura Sgrò souhaite rouvrir l'enquête.
Publié: 30.04.2023 à 14:00 heures
Raphael Rauch

En 1998, un garde suisse frustré a commis un acte tragique en tuant son chef et la femme de ce dernier avant de se suicider. Aujourd’hui, Laura Sgrò, une avocate italienne, souhaite rouvrir le dossier de cette affaire, critiquant les enquêtes superficielles menées par l’État pontifical.

Samedi prochain, Viola Amherd, ministre suisse de la Défense, devrait faire une grande apparition au Vatican. Cette visite est due à la prestation de serment des nouveaux gardes suisses qui jureront leur fidélité éternelle au pape François. Le président de la Confédération, Alain Berset, ne pouvant pas se rendre à Rome pour cet événement, la ministre de la Défense prendra sa place.

Rumeurs et théories du complot

Cependant, cette visite suscite de vives réactions de la part de Laura Sgrò. Elle estime que la politique suisse devrait faire pression sur le Vatican pour rouvrir une affaire de meurtre qui a eu lieu au sein de la Garde suisse il y a 25 ans. Selon elle, trois Suisses ont perdu la vie de manière peu claire et il est urgent de rouvrir l’enquête. Le Vatican, pour sa part, considère l’affaire comme étant résolue depuis un quart de siècle. En effet, le 4 mai 1998, Cédric Tornay, vice-caporal de la Garde suisse, a assassiné son commandant Alois Estermann et sa femme Gladys, originaire du Venezuela, avant de se suicider.

Pour l'avocate Laura Sgrò, de nombreuses questions restent aujourd'hui encore sans réponse dans une affaire de meurtre commis au Vatican le 4 mai 1998.
Photo: Agenzia Romano Siciliani
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Jusqu’à ce jour, la conviction persiste au sein de la Garde suisse que Cédric Tornay s’est vengé de son supérieur hiérarchique et de sa femme pour avoir refusé de lui octroyer la médaille du mérite «Benemerenti». Les raisons invoquées étaient que le garde suisse avait fumé du cannabis, était en retard au service et avait manqué de zèle, ce qui ne cadrait pas avec l’image d’un garde responsable et consciencieux. Toutefois, malgré cette version officielle, de nombreuses rumeurs et théories du complot circulent encore aujourd’hui. Certaines personnes se demandent si le commandant Estermann entretenait une liaison avec le jeune Cédric. D’autres se demandent si le véritable meurtrier court toujours en liberté.

Les dossiers soulèvent des questions

Les circonstances entourant la mort du commandant Alois Estermann et de son épouse en 1998 continuent donc de susciter des interrogations. L’avocate italienne, qui représente la mère de Cédric Tornay, est convaincue que l’enquête menée à l’époque était trop superficielle. Elle estime que la culpabilité du fils de sa cliente n’a pas été prouvée et qu’il doit être réhabilité.

Dans son livre «Sangue in Vaticano» (Sang au Vatican), Laura Sgrò soulève plusieurs questions sur l’enquête. Par exemple, pourquoi a-t-on d’abord appelé une ambulance italienne qui a fait demi-tour devant les murs du Vatican? Ou encore, pourquoi la scène du crime était-elle contaminée par plus de 20 personnes et aucune équipe médico-légale professionnelle n’était présente? Les photos de preuves auraient été prises par un photographe du journal du Vatican «Osservatore Romano», mais Laura Sgrò déplore qu’elles ne répondent pas aux normes de la criminologie.

L’avocate se demande également pourquoi le Vatican n’a pas confié l’affaire à des enquêteurs italiens, comme il l’avait fait pour l’attentat déjoué contre le pape en 1981. Elle estime que l’affaire doit être rouverte car, même si elle ne peut pas prouver l’innocence de Cédric Tornay, elle soupçonne qu’il y a eu dissimulation.

D’autres cas mystérieux ouverts

Laura Sgrò n’est pas seulement impliquée dans l’affaire Tornay: elle s’oppose également au Vatican sur d’autres cas mystérieux. L’un d’entre eux concerne la disparition de la jeune Emanuela Orlandi, il y a 40 ans. Une disparition récemment relatée dans la série de Netflix «Vatican Girl».

Emanuela était la fille d’un employé du Vatican et vivait dans l’enceinte de la papauté. Le 22 juin 1983, l’adolescente de 15 ans a disparu après ses cours de musique et n’a plus jamais été vue depuis. Son corps n’a jamais été retrouvé, mais des théories du complot ont émergé, allant de l’implication de la mafia à l’organisation de fêtes sexuelles au Vatican.

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