«Mourir serait plus avantageux pour moi»
Ce retraité n'arrive plus à payer ses frais de traitement pour son cancer

Rolf Meyer souffre d'un cancer. Sa maladie lui a déjà fait perdre beaucoup de forces, mais aujourd'hui, il est à bout de ressources financières. Une des raisons? Le forfait repas de 15 francs qu'il doit payer pour chaque jour hospitalisé. A ses frais.
Publié: 15.02.2024 à 12:31 heures
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Gina Krückl

Le cancer fait toujours plus de ravages. En 2022, la maladie a tué plus de 10 millions de personnes dans le monde. D'ici 2040, le nombre de cas devrait encore doubler. Ce patient en sait quelque chose: son cancer de l'abdomen et les complications qui ont suivi lui ont rendu la vie compliquée. Rolf Meyer a passé près de cinq mois entre son lit d'hôpital et la rééducation durant l'année dernière.

Sa prochaine grande opération est prévue pour bientôt, mais celle-ci ne l'inquiète pas plus que ça. Il y a autre chose qui le tracasse davantage. Malgré son assurance maladie, le patient s'est ruiné pour le traitement de son cancer.

Ce n'est ni la chimiothérapie, ni les médicaments qui ont mis à mal son portemonnaie, mais... la nourriture de l'hôpital! La faute à une taxe particulière que peu de patients connaissent: la «contribution aux frais hospitaliers».

Rolf Meyer souffre depuis un an d'un cancer de l'abdomen et ne sait plus comment payer ses frais d'hospitalisation. Le retraité vit avec sa famille avec 2800 francs par mois de l'AVS et des prestations complémentaires (PC).
Photo: JEAN-GUY PYTHON
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Plus de 1000 francs de frais supplémentaires

La semaine dernière, Blick a rendu visite à Rolf Meyer dans son appartement à Lausanne. Désespéré, le retraité regarde ses nombreuses factures d'hôpital en secouant la tête: «Je me sens arnaqué.» Et pour cause: il doit payer 15 francs pour chaque jour d'hospitalisation à sa caisse maladie. En prenant en compte le séjour à l'hôpital, les frais supplémentaires s'élèvent à près de 2000 francs. Et cet argent, le retraité vaudois ne l'a pas.

L'homme malade a travaillé toute sa vie pour s'assurer un avenir serein. Ingénieur en mécanique de formation, il a dédié sa vie à la construction de machines destinées à la Nasa et aux pompiers dans une entreprise américaine. Après avoir acquis assez d'expérience, le senior a décidé de rentrer en Suisse et s'est mis à son compte.

En arrivant à l'âge de la retraite, Rolf décide de travailler encore comme consultant. Un revenu non négociable de 3000 francs par mois en moyenne lui permet de tourner, en plus de sa rente AVS. Mais il y a un an, sa maladie le force à tout arrêter.

Les frais de repas ne sont pas remboursables

Lors de la première opération, la vessie de Rolf Meyer, déjà rongée par le cancer, a dû être entièrement retirée. Peu de temps après, la prostate, les canaux déférents, divers ganglions lymphatiques et le tissu musculaire environnant ont suivi. En l'espace de quelques mois, le malade a perdu une bonne partie de ses organes. 

Son traitement a été lourd et coûteux. Il a dû en partie le payer lui-même en raison de sa franchise de 2500 francs et de la quote-part de 10%. Les prestations complémentaires (PC) de l'AVS, quant à elles, ne dépassent pas les 1000 francs de contribution.

Mais les PC ne suffisent pas à contribuer aux frais d'hospitalisation de Rolf. Selon la loi, ces frais ne peuvent pas être pris en charge ni par une caisse maladie, ni par d'autres institutions. Une loi qui indigne le patient. «Je vis avec 2800 francs par mois, je finance encore ma fille étudiante et ma femme ne travaille pas», se désole Rolf.

Rien que la base de la contribution aux frais d'hospitalisation est totalement absurde pour lui. «Bien sûr, je dois aussi payer mes repas quand je suis à la maison. Mais c'est différent: quand je ne suis pas à l'hôpital, je suis en bonne santé, je peux travailler et gagner de l'argent.» Le forfait devrait – s'il est nécessaire – être fixé à un niveau nettement plus bas, selon lui. «Les repas pour toute ma famille ne me coûte pas 15 francs par jour. Si c'est uniquement pour moi, alors c'est encore moins.»

Le malade ne veut plus payer ses factures

Entre-temps, les deux reins de Rolf ont commencé à montrer des signes potentiels de métastases. Cette semaine, il devra subir une nouvelle intervention pour confirmer les soupçons. Dans le pire des cas, le rein le plus malade devrait directement être enlevé. Après l'opération, Rolf devra rester une vingtaine de jours à l'hôpital, au minimum – et payer 15 francs par jour pour ses repas.

«Cela représente de nouveaux frais de minimum de 300 francs. Je n'ai pas cet argent», se désole Rolf Meyer. Le malade hésite même à ne pas y aller, tant il redoute les factures qui suivront: «Je peux encore annuler l'opération. Je peux leur dire que je ne veux plus vivre. Il n'y aura plus de coûts. En fait, mourir serait plus avantageux pour moi.»

Si son opération est maintenue, Rolf Meyer retournera à l'hôpital vendredi. Il ne sait pas encore comment il paiera les frais supplémentaires pour ce nouveau séjour. Pour l'instant, il a décidé de ne pas se préoccuper de ça. «J'ai annulé tous mes paiements.» Le patient est conscient que cette décision pourrait lui attirer des ennuis, des rappels et des poursuites. Mais Rolf s'en fiche. «Ce n'est pas grave. Au moins, ils comprendront qu'il y a quelque chose qui cloche.»

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