On lui confisque son chalet
Un Grison puni par sa commune après avoir fait tomber un cartel de construction

L'autochtone doit céder le terrain sur lequel sa famille a construit un chalet d'alpage et qu'elle a pu utiliser pendant des décennies. Bien que l'assemblée communale de Valsot (GR) ait approuvé une prolongation du contrat de droit de superficie.
Publié: 02.09.2024 à 14:57 heures
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Dernière mise à jour: 02.09.2024 à 15:21 heures
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Andreas Schmid

Le 14 décembre 2020, les électeurs de Valsot en Basse-Engadine ont pris une décision lors de l'assemblée communale: sept familles peuvent continuer à utiliser pendant 30 ans en droit de superficie des terrains de la commune sur lesquels elles avaient construit des chalets d'alpage. Les contrats de 1990 pour les parcelles ont été prolongés. Parmi les parties figurent Adam Quadroni et sa sœur qui, comme les autres, peuvent rester dans leur petite maison au-dessus de Ramosch pour un intérêt annuel de 500 francs. Pour l'assemblée communale, la prolongation des contrats de droit de superficie était une formalité, le point à l'ordre du jour n'a pas suscité beaucoup de discussions.

Mais pour une partie, il y a tout de même eu une mauvaise surprise. Adam Quadroni et sa sœur ont reçu quelque temps plus tard un courrier du président de la commune, Victor Peer, qui exigeait qu'ils rendent le terrain avec leur chalet d'alpage. Ce courrier n'est parvenu qu'à eux seuls, malgré la décision de l'assemblée communale de prolonger tous les contrats.

Intérêt non annoncé

Le président de la commune a expliqué qu'Adam Quadroni et sa sœur avaient omis de faire part de leur intérêt à continuer d'utiliser la parcelle avec leur chalet d'alpage. Curieusement, six familles occupant une parcelle de Valsot en droit de superficie ont reçu une lettre leur demandant de confirmer la prolongation du contrat. Une partie n'a toutefois pas reçu cette lettre: celle d'Adam Quadroni. C'est en tout cas ainsi qu'il présente les choses, raison pour laquelle il s'est opposé au retrait du droit de superficie en engageant des démarches juridiques.

Adam Quadroni voit dans la démarche de la municipalité une action de vengeance.
Photo: Linda Käsbohrer
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Adam Quadroni veut savoir que le président de la commune avait déjà dit à des habitants avant l'assemblée communale qu'il veillerait à ce qu'Adam Quadroni et sa sœur doivent céder la parcelle. Pourtant, il a investi beaucoup de temps et d'argent dans son chalet d'alpage au fil des ans, et selon une estimation officielle qu'il a lui-même commandée, celui-ci vaudrait 400'000 francs.

Le tribunal régional de Prättigau Davos va statuer sur le litige à la fin de l'année, la commune veut imposer avec son avocat son intention de ne pas prolonger le contrat d'Adam Quadroni – bien que le même tribunal ait donné raison à Adam Quadroni dans une procédure simplifiée. «L'insistance de la commune est liée à une vendetta contre moi», déclare Adam Quadroni. Il rappelle qu'en Basse-Engadine, il est largement considéré comme un pollueur de nid, «parce que j'ai fait éclater le cartel de la construction dont beaucoup ont profité dans la région».

Adam Quadroni s'était adressé à la Commission de la concurrence (Comco) en 2012 et lui avait fourni des indications et des documents. Les documents montrent qu'entre 2004 et 2012, de nombreuses entreprises se sont mises d'accord, lors de réunions dites préliminaires, sur l'entreprise qui se verrait attribuer des marchés ultérieurs et sur les offres à soumettre. Il s'agissait de plusieurs centaines de projets publics et privés avec un volume d'achat d'au moins 190 millions de francs.

De nombreuses questions en suspens

Le président de la commune Victor Peer ne s'exprime pas sur les circonstances pour lesquelles il ne veut plus accorder à Adam Quadroni l'utilisation du chalet d'alpage. Il ne répond pas aux questions concernant la raison pour laquelle Adam Quadroni est le seul à se voir retirer le droit de construire, pourquoi il veut renverser la décision de l'assemblée communale et quelle est sa position personnelle par rapport au lanceur d'alerte du cartel de la construction.

L'ancien entrepreneur Adam Quadroni a lui-même participé à des ententes illégales sur les prix avant de se retirer et de s'adresser à la Comco. Celle-ci a infligé une amende de onze millions de francs au total à sept entreprises de construction en 2019.

L'entente systématiquement pratiquée pendant des années a en outre incité le Grand Conseil grison à mettre en place la première commission d'enquête parlementaire (CEP) de l'histoire du canton. Les conclusions de la CEP et de la Comco ont permis à plusieurs entreprises d'avouer plus tard leurs agissements déloyaux. Elles ont versé au canton des indemnités d'un montant total d'environ sept millions de francs.

Un gouvernement réticent

Tout cela est dû au mérite d'Adam Quadroni, s'accordent à dire de plus en plus de cercles dans les Grisons. Le canton devrait lui rendre hommage. D'autant plus que le lanceur d'alerte a également été victime d'une opération policière opaque à l'été 2017. Une unité spéciale a emmené Adam Quadroni, ligoté, dans une clinique psychiatrique à Coire GR, dans le cadre d'une procédure de protection de l'union conjugale. Les tribunaux se demandent encore aujourd'hui pourquoi il a été traité de la sorte.

Il n'est pas certain que le gouvernement grison se montre un jour reconnaissant envers le lanceur d'alerte pour les services qu'il a rendus dans le cadre des accords sur les prix. Le directeur de la chancellerie Daniel Spadin déclare: «Il y a des exigences de la part d'Adam Quadroni. Le gouvernement ne prend pas position tant que des procédures juridiques sont en cours.» Daniel Spadin souligne toutefois que tous les incidents concernant le cartel de la construction «ont été traités et clos».

D'autres ennuis menacent toutefois: la Comco s'occupe actuellement d'accords sur les prix dans le secteur de la construction dans la région de Moesa, au sud des Grisons. L'ampleur de l'affaire est similaire à celle du cartel de Basse-Engadine et les résultats de l'enquête devraient être disponibles l'année prochaine.

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