Petit événement!
Robin Adet, première personne trans et non binaire à chroniquer sur la RTS

Vidéaste, politologue et journaliste bien connu·e de la scène culturelle romande, Robin Adet vient de faire son coming-out trans et non binaire. Ex-codirecteur·ice du festival féministe «Les Créatives», iel tient une chronique sur le cinéma dans le «12h45» de la RTS.
Publié: 28.01.2022 à 17:17 heures
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Dernière mise à jour: 28.01.2022 à 18:50 heures
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Amit JuillardJournaliste Blick

Sans forcément s’en rendre compte, les téléspectatrices et téléspectateurs du «12h45» de la RTS ont assisté à un événement historique ce 26 janvier. En prenant la parole à 12h59, la·le cinéaste Robin Adet est devenu·e la·le premier·ère chroniqueur·se ouvertement trans et non-binaire (qui ne se reconnaît dans aucun genre) à travailler pour la RTS. L’espace de trois ou quatre émissions, iel remplacera l’une des habituées du plateau de la journaliste Claire Burgy pour parler… cinéma.

Avant de poursuivre le récit, précisons: dans cet article, afin de respecter l’identité de genre et le souhait de Robin Adet, Blick utilise le langage inclusif et le pronom «iel». Reprenons. Encore récemment chargé·e de communication pour le théâtre du Grütli à Genève, iel est une personnalité de la scène culturelle alternative et militante romande, notamment pour avoir codirigé le festival féministe «Les Créatives» entre 2017 et 2020 et avoir été primé·e pour le documentaire «Bunkers», immersion dans les abris de la Protection civile où séjournent des requérantes et requérants d’asile.

Prise de conscience pendant le semi-confinement

Revenons en 2022. Plus précisément mardi 25 janvier, jour avant son apparition au «12h45». La·le journaliste indépendant·e publie un message sur son profil Facebook en guise de coming-out public: «Bonjour, je m’appelle Robin. (iel/il)». «C’est le terme d’un long chemin, explique Robin Adet à Blick. Pendant des années, je me suis identifié·e comme lesbienne cisgenre (genre qui correspond à celui assigné à la naissance, ndlr.), tout en me rendant compte quelque chose ne jouait pas tout à fait.»

La vie de Robin Adet a changé durant le premier semi-confinement de 2020.
Photo: DR

La prise de conscience intervient progressivement à partir du premier semi-confinement de 2020. «J’ai alors pu me poser, raconte l’ancien·ne employé·e du Festival du film et forum international sur les droits humains de Genève (FIFDH). J’ai beaucoup réfléchi, après des années à lire beaucoup de choses sur les questions de transidentité et de non-binarité. Et tout à coup, la question a émergé. Je me suis dit: 'L’assignation femme ne me correspond pas et je ne me reconnais dans aucun des deux genres: peut-être que je suis non-binaire'.»

«Au début, ça fait flipper»

Une révélation pas forcément facile à encaisser. «Au début, ça fait flipper, confie l’ex-étudiant·e de l’Institut de hautes études internationales et du développement. Ça prend du temps de l’accepter pour soi. Mais quand ce coming-in intervient, tu ne peux plus te voiler la face. A presque 35 ans, j’entame une transition pour me désidentifier du genre féminin.» Ses proches comme le grand public l’acceptent bien. «Mais je suis conscient·e d’être un·e privilégié·e. J’évolue dans des cercles progressistes et dans une grande ville cosmopolite (Genève, ndlr.). Je viens de Neufchâteau, petite ville rurale des Vosges, en France. A l’époque de mes 20 ans, je n’avais pas les outils pour comprendre et tout cela n’aurait pas été possible.»

Notamment à travers le «12h45», Robin Adet, qui travaille actuellement sur une websérie dédiée aux questions de genre avec la Youtubeuse La Carologie, participe à la visibilisation positive des personnes non binaires. «Aujourd’hui, je suis tellement plus serein·e et ancré·e. J’aurais bien aimé pouvoir avoir des modèles trans et non binaires lorsque j’étais plus jeune. Les livres de Paul B. Preciado ou la page Instagram de Léon Salin m’ont aidé·e. C'est grâce à ces modèles que j'ai pu me présenter en tant que Robin sur le plateau de la RTS.»

Point médian à l'écran

Fait piquant, l’équipe du «12h45» a dû s’adapter le jour même. «L’engagement de Robin Adet pour ce remplacement a été décidé l’an dernier, éclaircit Claire Burgy, présentatrice, contactée par Blick. Avant sa venue, nous nous sommes parlé·e·s et mis·e·s d’accord sur la manière de la·le genrer ou nommer.» D’où l’apparition à l’écran de ce synthé en écriture inclusive: «Robin Adet, journaliste indépendant·e». «Je me suis dit que le plus simple et le plus juste était de respecter ses demandes et son identité.»

Pour l’instant en tout cas, la question du point médian n’a pas fait trop de remous à l’interne. «Ce cas est un peu particulier puisque c’est une nécessité, note Elisabeth Logean, corédactrice en chef de l’actu TV, également jointe par téléphone. Après l’émission, nous avons eu une rapide discussion à ce propos. De manière générale, il y a à la RTS une sensibilisation à l'écriture inclusive.»

Mais plus globalement, est-ce important pour le service d’engager des personnes trans et non binaire à des postes exposés? «Pour nous, l’important est avant tout d’engager une personne compétente, appuie-t-elle. Robin Adet est là pour parler de cinéma, son domaine de compétence. A mes yeux, nous ne devons pas devenir les porte-drapeaux d’une cause, mais être à l’image de la société dans laquelle nous évoluons. Et surtout, nous voulons éviter toute discrimination à l’embauche, notamment en rapport avec l’identité de genre.»

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