Pour créer sa cyber-milice
Viola Amherd veut mettre le grappin sur de jeunes geeks

L'armée veut gonfler ses rangs pour faire face aux cyberattaques qui visent le secteur public et privé en Suisse. Elle a décidé de s'adresser aux jeunes talents dès la sortie de l'école obligatoire en proposant une formation à 20 ados triés sur le volet.
Publié: 25.10.2021 à 05:57 heures
|
Dernière mise à jour: 25.10.2021 à 17:49 heures

Des années plus tard, on ignore encore l’origine précise de la faille qui avait permis la cyberattaque contre l’entreprise d’armement Ruag en 2014. Ce n’est d’ailleurs qu’en 2016 que les services de renseignement se sont aperçus qu’il y avait eu un vol de données au sein de l’entreprise, propriété de l'armée. Cet été, Ruag parlait encore de «sérieuses failles en matière de sécurité» informatique.

L’espionnage et les frappes militaires touchent de plus en plus souvent le domaine informatique. Le nombre de cyberattaques ciblées est en constante augmentation en Suisse. Outre les installations de l’armée, les compagnies d’électricité, les CFF et les entreprises de télécommunication font partie des cibles. En septembre, le Conseil fédéral a donc décidé de créer une «cyber-milice» pour combler le manque de personnel, de formation et de coopération avec d’autres pays en matière de cybernétique.

L’armée veut recruter de jeunes «cyber-soldats»

L’armée, et plus précisément la ministre de la Défense Viola Amherd, veut agir. Elle compte mettre le grappin sur de jeunes prodiges de l’informatique dès leur sortie de l’école obligatoire.

En 2014, l'entreprise de défense Ruag, propriété de l'armée suisse a été victime d'une cyberattaque. À ce jour, on ignore quelles données ont été volées et qui est à l'origine de cette attaque.
Photo: Andrea Brunner
1/7

Une vingtaine de jeunes âgés de 16 à 20 ans au maximum seront invités à participer à une formation dans le domaine informatique. Une formation préalable similaire existe déjà pour les femmes pilotes militaires, les maîtres de chiens ou les conductrices automobiles. Avec cette nouvelle offre, l’armée cherche à dénicher des talents en matière de sécurité informatique et les recruter avant l'heure.

Divers scénarios de cyberattaques serviront de base à un «live-event» (événement pilote en direct) qui débutera cet automne. Les jeunes, avec leurs différents niveaux de connaissances préalables, devront, en petits groupes et accompagnés de spécialistes, étudier les aspects techniques, les informations de base et les effets possibles d’une attaque informatique.

Bien connaître les cyberattaques pour mieux les prévenir

«Ils apprendront, par exemple, comment se déroule une cyberattaque en détail, comment la détecter et quelles peuvent être les conséquences en matière de défense», explique Stefan Hofer, porte-parole de l’armée. Ils apprendront également à connaître certains outils informatiques dans ce domaine et seront initiés à leur utilisation. De cette manière, ils seront formés pas à pas pour devenir des «cyber-soldats». Pour rejoindre cette «cyber-milice», les candidats peuvent encore postuler sur le site de la Confédération. Pour l’instant, l’armée semble se réjouir des premières inscriptions.

Après le «live-event», les participants auront accès à une formation en ligne pour approfondir leurs connaissances. À l’avenir, la formation initiale sera également établie comme base du cours de cybernétique pour améliorer le niveau des futurs cyber-soldats. L’objectif est également de passer de 20 à 40 élèves par session.

La Suisse a du retard

La Suisse a fait des progrès dans la cyber-formation des forces armées. Malgré cela, elle est toujours à la traîne par rapport à d’autres pays. Les superpuissances comme les États-Unis se concentrent depuis des années sur la guerre du net. Le «United States Cyber Command» œuvre depuis octobre 2010. Depuis 2013, il s’est agrandi avec 5000 postes.

Israël est encore plus avancé. Les militaires y recrutent dès l’école secondaire. Dans des programmes spéciaux, même les jeunes de 14 ans peuvent apprendre les rudiments du cyber-combat. Pendant trois ans, ils accumulent des connaissances et des aptitudes qui peuvent leur servir dans le secteur civil. Certains sont d’ailleurs devenus très riches grâce à cette formation.

L'armée israélienne recrute depuis longtemps des cyber-soldats dès l'école secondaire.
©IDF

La Suisse a fait des progrès dans la cyber-formation des forces armées. Malgré cela, elle est toujours à la traîne par rapport à d’autres pays. Les superpuissances comme les États-Unis se concentrent depuis des années sur la guerre du net. Le «United States Cyber Command» œuvre depuis octobre 2010. Depuis 2013, il s’est agrandi avec 5000 postes.

Israël est encore plus avancé. Les militaires y recrutent dès l’école secondaire. Dans des programmes spéciaux, même les jeunes de 14 ans peuvent apprendre les rudiments du cyber-combat. Pendant trois ans, ils accumulent des connaissances et des aptitudes qui peuvent leur servir dans le secteur civil. Certains sont d’ailleurs devenus très riches grâce à cette formation.

plus

L'attaque comme meilleure défense

Ce nombre relativement faible s’explique également par les exigences imposées aux candidats. «Actuellement, environ 200 à 250 personnes intéressées s’inscrivent à un cours de cybernétique, indique Stefan Hofer. Avec la sélection actuelle, seuls 20 candidats répondent vraiment aux critères d’admission».

En tant que cyber-soldats, ces jeunes seront amenés un jour à protéger les centres informatiques et les systèmes de communication militaires, mais pas que. Les adolescents seront formés en parallèle à être de véritables petits pirates informatiques capables de mener eux-mêmes à bien des cyberattaques pour riposter en cas de conflit. Le tout pour les services de renseignement du pays et pour le gouvernement.

Selon l’armée, cette opportunité devrait également profiter aux diplômés dans leur future vie professionnelle. La formation, assortie d’un certificat de compétence en tant que spécialiste de la cybersécurité, sera également utile et reconnue dans le secteur privé. De cette manière, l’armée veut contribuer à pallier le manque de travailleurs qualifiés dans la cybernétique au sein du secteur privé.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la