«Toxiques», selon un ancien banquier
Ce conseiller aux États PLR défend les bonus chez Credit Suisse

Le conseiller aux États PLR Ruedi Noser s'engage en faveur des salariés de Credit Suisse qui ont fait du «bon travail» jusqu'à la fin. Mais un ancien banquier de l'entreprise rachetée par UBS s'y oppose: les bonus seraient toxiques pour la culture d'entreprise.
Publié: 27.03.2023 à 09:06 heures
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Dernière mise à jour: 27.03.2023 à 09:31 heures
Peter Aeschlimann

Le verdict est sans appel: selon un sondage commandé par Blick, 61% des personnes interrogées sont favorables à une interdiction des bonus dans les banques suisses d'importance systémique. Il est clair que la mentalité de self-service du monde bancaire fait grogner la population.

Le Conseil fédéral l'a désormais remarqué. Après avoir appris que Credit Suisse voulait maintenir ses bonus, la ministre des Finances Karin Keller-Sutter a pris la parole mardi: plus de bonus pour les cadres de la banque rachetée par UBS.

Tous les partis sont étonnamment d'accord sur un point: il faut un changement de culture dans les établissements financiers. «Fini le statu quo», tel est le cri de guerre des socialistes. Et sur Twitter, le chef du PLR Thierry Burkart a exigé «qu'aucun bonus ne soit versé».

Le conseiller aux États PLR Ruedi Noser s'engage en faveur des salariés de Credit Suisse qui ont fait du «bon travail» jusqu'au bout et qui doivent maintenant s'attendre à des suppressions de bonus.
Photo: Keystone
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Ruedi Noser, membre du conseil d'administration de Credit Suisse Asset Management AG, estime lui aussi qu'il est juste de ne plus verser de bonus de plusieurs millions. Mais, interrogé par Blick, le conseiller aux États radical zurichois nuance: «Le fait de supprimer les bonus de tous les employés dont le salaire dépasse 250'000 francs – y compris les parts de salaire variables – est une décision erronée qui doit être rectifiée.»

Ruedi Noser prend la défense des employés

Les employés de banque ayant de grandes responsabilités et des contacts importants avec la clientèle reçoivent souvent jusqu'à un an de salaire en bonus s'ils atteignent leurs objectifs, une partie étant à chaque fois versée en actions que les bénéficiaires ne peuvent pas vendre pendant trois ans.

Ruedi Noser veut surtout s'engager pour les collaborateurs de Credit Suisse qui ont fait un «bon travail» jusqu'à la fin et qui seraient maintenant punis. «Ceux qui ont provoqué la débâcle et qui ont été assez intelligents pour partir à temps sont récompensés. C'est pervers!»

À la question de savoir quels employés de la banque à deux voiles sont concernés par les suppressions de bonus, une porte-parole de l'entreprise décline de répondre: «No comment.» Pas de commentaire non plus sur les 250'000 francs mentionnés par Ruedi Noser. Credit Suisse renvoie simplement à un communiqué de presse du département des finances. On y lit: «Il faut éviter de toucher des collaborateurs qui ne sont pas eux-mêmes à l'origine de la crise.»

Les bonus auraient un effet toxique

Pour les employés, l'incertitude est extrêmement pesante, explique l'Association suisse des employés de banque: «Une tempête se prépare, mais personne ne sait s'il sera touché.» Pour les salariés normaux, le bonus fait partie intégrante du revenu et remplace le 13e mois de salaire habituel dans d'autres branches. «Vis-à-vis de ces employés, la banque doit tenir ses engagements et verser les bonus promis», revendique l'association syndicale. Ce n'est pas le cas pour les cadres supérieurs: «La loi sur les banques prévoit pour eux des mesures que le Département des finances a désormais ordonnées.»

Il est clair que les bonus ont un effet négatif, explique un ancien banquier de Credit Suisse à Blick. Celui qui veut atteindre ses objectifs par tous les moyens est prêt à prendre des risques plus élevés: «Pour la banque, cela peut devenir dangereux.»

Le «cirque» commence chaque automne, raconte l'ancien collaborateur. «C'est à ce moment-là que les banquiers ont le sourire.» Tous veulent faire bonne impression auprès du chef, car l'enveloppe contenant le bonus arrive bientôt. «Les uns s'en servent pour payer leurs impôts ou leur appartement de vacances à la montagne, les autres se précipitent sans tarder à la Bahnhofstrasse pour s'acheter une nouvelle Rolex à 35'000 francs.»

«Irresponsabilité collective»

L'un de ceux qui luttent contre cette tendance «Wall Street» est le conseiller national vert Gerhard Andrey. Il s'engage pour un marché financier viable, orienté vers l'économie réelle et ayant un impact positif sur l'homme et l'environnement: «Le reste doit être transféré au casino pour personnes aisées, où l'on joue avec des produits fantaisistes.»

Mi-avril, le Parlement se réunira en session spéciale sur la chute de Crédit Suisse. Au menu des débats figurent les régulations, le droit d'urgence ainsi que la culture des bonus. Il s'agira également de déterminer qui est réellement responsable de tout ce gâchis. Gerhard Andrey annonce la couleur: «Il s'agit maintenant de construire un marché financier qui ne nous explose pas à la figure tous les dix ans.»

Selon l'entrepreneur fribourgeois, la manière de fonctionner jusqu'à présent est inacceptable: «Il y avait une irresponsabilité collective.» Selon lui, les systèmes d'incitation ne sont pas gravés dans la pierre. «D'autres branches s'en sortent sans bonus exorbitants – et fonctionnent parfaitement.» À l'avenir, il ne doit plus y avoir de systèmes d'incitation monétaire qui encouragent la prise de risques dangereux. La chute de Credit Suisse serait un signe clair que «ce système a vécu».

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