Vers une année record?
Les glaciers valaisans fondent encore plus vite à cause de la canicule

Les glaciers du Valais fondent comme jamais auparavant. Les températures caniculaires font des dégâts importants et accélèrent le processus. Si aucune mesure n’est prise, ils disparaîtront complètement avant la fin du siècle, avertit un glaciologue.
Publié: 30.06.2022 à 06:25 heures
|
Dernière mise à jour: 30.06.2022 à 09:12 heures
Fabian Vogt

Les glaciers valaisans sont célèbres dans le monde entier. Même en été. Des superstars du ski comme Mikaela Shiffrin ou l’as du slalom Ramon Zenhäusern se préparent habituellement à Saas-Fee et Zermatt pour la nouvelle saison. En automne 2021, les responsables des remontées mécaniques de la vallée de Saas comptaient jusqu’à 1000 athlètes par jour. Mais cette année, s’entraîner sur la neige valaisanne risque d’être compliqué, rapporte le «Walliser Bote».

«La situation est dramatique»

Il n’y a jamais eu aussi peu de neige sur les glaciers à la fin du mois de juin. Rien qu’entre le 15 et le 21 juin, les glaciers suisses auraient perdu quelque 300 millions de tonnes de glace et de neige, comme le montrent les dernières données du réseau suisse de mesure des glaciers Glamos. Les glaciologues qualifient la situation de dramatique.

Mais qu'est-ce que cela signifie exactement? Interrogé par Blick, Matthias Huss, professeur en glaciologie à l’EPF de Zurich, n’y va pas par quatre chemins: «Je n’ai encore jamais vécu une situation comme celle d’aujourd’hui. Elle est dramatique et me préoccupe personnellement beaucoup.»

Les experts tirent la sonnette d'alarme: il n'y a jamais eu aussi peu de neige sur les glaciers de Saas-Fee et de Zermatt en juin.
Photo: Getty Images
1/5

Trop peu de neige et trop de soleil

L’expert explique que, normalement, la neige qui tombe en hiver sur un glacier fond en été. Mais le bilan n’est déjà plus équilibré depuis longtemps en raison du changement climatique. Les glaciers perdraient actuellement chaque année environ 2% de leur volume total. Cette année pourrait être encore pire: «Nous nous dirigeons malheureusement vers un record», avertit Matthias Huss.

Trois facteurs sont en cause: un hiver au cours duquel il est tombé extrêmement peu de neige sur le versant sud des Alpes – au Tessin et dans le sud du Valais – ce qui a rendu la couverture protectrice au-dessus de la glace des glaciers plus mince que les années normales. Une vague de chaleur très précoce avec des températures supérieures à 30 degrés dès le mois de mai, suivie d’un mois de juin record. Et de grandes quantités de poussière du Sahara qui se sont déposées sur la neige en mars et l’ont rendue plus foncée. Avec pour conséquence une moindre réflexion du rayonnement solaire et une fonte encore plus rapide de la neige.

Si cela continue, le record négatif de l’année 2003 pourrait être battu, le spécialiste en est convaincu. A l’époque, les glaciers avaient perdu près de 4% de leur masse totale.

Un été frais pour sauver les glaciers

Lors d’une année normale, les glaciers gagneraient en masse jusqu’en mai et seraient encore recouverts de neige à 90% en juin. «Mais aujourd’hui, ils ressemblent déjà à ce qu’ils sont habituellement en août», alerte le professeur en glaciologie. Quant à savoir si cette situation se stabilisera d’ici la fin de l’année, cela dépendra uniquement de la météo. «Plus il y a d’heures d’ensoleillement, plus la température est élevée, plus la neige et la glace fondent rapidement», explique Matthias Huss qui, d’un point de vue professionnel, espère un été frais.

Y a-t-il fondamentalement quelque chose qui puisse ralentir la désintégration de nos glaciers pour les années qui viennent? «La protection du climat», assène le glaciologue qui travaille également à l’Université de Fribourg et à l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage. Selon lui, seule une collaboration à l’échelle du monde entier sur plusieurs décennies pourrait permettre de préserver une partie des glaciers.

«Nous pouvons sauver environ 40%»

«Si l’accord de Paris sur le climat est mis en œuvre, nous pourrons sauver environ 40% de la masse actuelle des glaciers en Suisse», détaille l’expert. Si aucune mesure de protection du climat n’est prise, ils pourraient toutefois avoir totalement disparu d’ici la fin du siècle.

Au final, une situation intermédiaire est la plus probable, prédit Matthias Huss. Comme les efforts en faveur des énergies renouvelables et des autres secteurs environnementaux s’intensifient, il sera possible de sauver une partie des glaciers. Les générations futures pourront donc peut-être encore admirer les glaciers valaisans, ou du moins ce qu’il en reste.

(Adaptation par Jessica Chautems)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la