Les raisons de ce choix
Murat Yakin a boudé les Romands

Denis Zakaria et Edimilson Fernandes sont les deux seuls Romands présents dans l'équipe de Suisse qui partira à la Coupe du monde. Le sélectionneur a favorisé la flexibilité et l'esprit de groupe.
Publié: 09.11.2022 à 13:52 heures
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Dernière mise à jour: 09.11.2022 à 15:02 heures
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Ugo CurtyJournaliste Blick

Le tacle a été d’une précision diabolique. «Chez les Romands, il y aura plus de journalistes accrédités que de joueurs dans l’équipe de Suisse au Qatar.» La pique est signée d’un collègue alémanique, quelques minutes avant l’annonce de la sélection pour la Coupe du monde 2022, ce mercredi matin à Lucerne. Il avait malheureusement vu (très) juste.

Fernandes préféré à Mbabu

Au final, Murat Yakin n’a retenu que deux Romands sur sa liste de 26 joueurs. Du jamais vu en six participations de la Suisse à la Coupe. Denis Zakaria, malgré son temps de jeu limité à Chelsea, et le revenant Edimilson Fernandes seront du voyage.

Le Valaisan revit du côté de Mayence en Bundesliga (sept titularisations). Jamais appelé par le nouveau sélectionneur de la Nati, l’ancien joueur du FC Sion n’a plus porté le maillot national depuis juin 2021.

Kevin Mbabu et Jordan Lotomba ne devraient pas être de la partie au Qatar, à moins d'un forfait de dernière minute.
Photo: Keystone

«Edimilson Fernandes a été préféré à Kevin Mbabu, car il peut être utilisé de manière flexible à différents postes», a justifié le sélectionneur. Le Genevois n’a pas réussi à s’imposer à Fulham et paie un transfert infructueux vers la Premier League.

Seulement deux latéraux dans le groupe

Murat Yakin a aussi choisi de se priver d’un autre défenseur romand, Jordan Lotomba. Le Vaudois est pourtant aligné régulièrement par Lucien Favre à l’OGC Nice.

L’équipe de Suisse partira donc au Qatar avec seulement deux latéraux de métier: Silvan Widmer à droite et Ricardo Rodriguez à gauche. Un poste que le capitaine du Torino n’occupe plus en club cette saison.

«Plus que la flexibilité des joueurs retenus, j’ai aussi des possibilités sur le plan tactique si besoin, s’est défendu Murat Yakin sur ce point. Une défense à cinq est une option. Manuel Akanji peut jouer sur un côté, comme à Manchester City et Fabian Frei est capable de descendre dans l’axe.»

Le duo Jashari – Rieder

Reste que les Romands paient cher ces décisions. Ils étaient encore six à l’Euro 2021 (Zakaria, Mvogo, Mbabu, Fernandes, Omeragic et Lotomba). Entre 1954 et 2018, la délégation romande avait toujours compté au minimum cinq représentants.

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A 20 ans, Ardon Jashari (Lucerne) et Fabian Rieder (YB) représentent l’avenir de la Nati. Leur présence combinée sur la liste des 26 barre la route à un autre profil.

Les Bâlois laissés de côté

Kastriot Imeri, Dan Ndoye, Andi Zeqiri ou Zeki Amdouni doivent se contenter d’une place de réserviste. «Ils ont moins joué lors des derniers matches, ce qui démontre aussi leur état de forme», a expliqué Murat Yakin à propos du trio offensif du FC Bâle. Un argument qui visiblement ne compte pas pour leur expérimenté coéquipier en club, Fabian Frei.

«En revanche, les jeunes comme Jashari ou Rieder ont toujours su répondre présent en Super League, avance le sélectionneur bâlois. Les performances sont un facteur important lorsqu’il s’agit de sélectionner des joueurs pour la Coupe du monde.»

Pas les 26 meilleurs joueurs

Mais le sportif ne fait pas tout si on écoute son assistant Vincent Cavin. «Nous faisons aussi en fonction de nos besoins, détaille le Vaudois. Ce ne sont pas les 26 meilleurs joueurs de Suisse, mais le meilleur groupe. Je me souviens qu’Ottmar Hitzfeld avait déjà eu cette réflexion pour la Coupe du monde au Brésil en 2014, ma première avec la Suisse. Nous avons besoin de personnes qui ont un rôle clair et qui acceptent ce rôle.»

Faut-il y voir la crainte d’un clan alémanique ou des problèmes de communication? «Non, balaie Murat Yakin. Le football est simple et nous parlons tous la même langue sur le terrain.» Vincent Cavin poursuit. «On ne regarde pas de quelle région viennent les joueurs au moment de trancher. Il y a un équilibre à trouver dans le groupe, aussi entre les jeunes et les plus expérimentés.»

Un mauvais signal pour le foot romand?

Enfin, si on prend un peu de recul, est-ce que cette faible présence francophone est un mauvais signal pour le football romand dans son ensemble? Vincent Cavin répond par la négative. Le technicien pointe néanmoins du doigt une première piste d’explication: l’exode parfois prématuré des Romands à l’étranger ou dans des grands clubs du pays.

«Partir très tôt n’est pas toujours une bonne chose, précise l’entraîneur-assistant de la Nati. Il n’y a aucune garantie de faire carrière. Cela dit, et on l’a vu, il y a plusieurs jeunes Romands qui frappent à la porte. Je suis convaincu qu’ils feront partie du futur de l’équipe de Suisse.»

Pour le Qatar, la porte est visiblement restée fermée pour la grande majorité d’entre eux.

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