La génération Chapuisat
La Nati de 1994, une véritable épopée mise en images

Yves Matthey, déjà auteur du très beau «Servette mon enfance» retrace en images, avec le journaliste de la RTS Fred Scola, le parcours de la Suisse à la Coupe du monde 1994. Une qualification qui a décomplexé toute une génération.
Publié: 21.05.2024 à 16:29 heures
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Dernière mise à jour: 21.05.2024 à 16:53 heures
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Tim GuilleminResponsable du pôle Sport

Après le succès de «Servette, mon enfance», le formidable film qu'il a réalisé sur l'histoire du club grenat dans les années 60 et 70 (onzième semaine de diffusion au cinéma, plus de 2000 spectateurs!), voilà qu'Yves Matthey refait à nouveau parler de lui sur la scène footballistique! Ce mardi soir sort en effet au cinéma, à La Chaux-de-Fonds, «L'épopée 94, la Suisse à la Coupe du monde». Le film part en tournée dans toute la Suisse romande et sera diffusé dimanche 26 mai à 22h45 sur RTS 2, après la finale du championnat du monde de hockey. Il sera ensuite disponible sur RTS Play.

L'idée est venue de Fred Scola

Cette fois, il ne s'agit pas d'un projet aussi fort émotionnellement que celui concernant Servette, qui venait vraiment du coeur, mais Yves Matthey s'est tout de même très vite pris au jeu. «En fait, à la base, c'est Fred Scola, qui est un ami, qui s'est approché de moi en me disant qu'il voulait faire un film sur cette épopée, très importante à ses yeux. Il m'a proposé de l'accompagner et j'ai très volontiers dit oui. Et bien sûr, en tant qu'amateur de football, c'est une équipe qui m'a fait vibrer!»

La Suisse de 1994 est en effet entrée dans l'histoire du football suisse, puisqu'elle est celle qui a ramené la Nati à la phase finale d'un grand tournoi, ce qui n'était pas arrivé depuis... 1966! «Comme le dit Eric Lafargue dans le film, pour toute une génération d'amateurs de foot comme moi, l'équipe de Suisse c'était des pives! Jusqu'à cette équipe...», sourit Yves Matthey. 

Cette mythique équipe de Suisse de 1994, le point de départ des succès actuels.
Photo: Getty Images

La victoire face à la France en amical, un tournant

La «génération Chapuisat» a donc mis fin à 28 ans de traversée du désert et soulevé un bel enthousiasme à travers le pays. Le film raconte les débuts de l'épopée, en 1992, et ces deux défaites d'entrée qui ont failli coûter sa place au nouveau coach Roy Hodgson. Le tournant a eu lieu le 27 mai avec une victoire 2-1 en match amical à la Pontaise face à la France avec deux buts de Christophe Bonvin. «Je mets un doublé du pied droit, ce qui ne m'est plus jamais arrivé!», sourit le Valaisan dans le film. Ensuite? Un Roy Hodgson conforté dans sa position, une victoire en Estonie pour lancer les qualifications et un double exploit face à l'Italie, tant à Cagliari (2-2) qu'à Berne (1-0, but de Marc Hottiger).

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Yves Matthey, fidèle à la méthode qui a fait de «Servette, mon enfance» un film très réussi, a retrouvé les acteurs de l'époque et les a réuni, cette fois, autour d'une fondue au Chalet suisse. Christophe Ohrel, Alain Geiger et les autres se rappellent les bons souvenirs et les évoquent face caméra, ce qui donne des moments d'intimité assez épatants.

Des liens indéfectibles entre les joueurs

«Ils ont du plaisir à se retrouver, ce sont vraiment des bons gars. Et ils sont liés par des liens indéfectibles. Avoir fait partie de cette équipe les a soudés pour toujours», explique Yves Matthey, lequel avait une trentaine d'années lors de la Coupe du monde 1994, disputée aux Etats-Unis. Le coup-franc de Georges Bregy face aux USA, la victoire 4-1 contre la Roumanie... Autant de moments entrés dans l'histoire et, quelque part, presque dans le mythe.

Alain Sutter félicite Georges Bregy, lequel vient d'inscrire le 1-0 contre les Etats-Unis d'un maître coup-franc.
Photo: Keystone

Stéphane Chapuisat, qui en a vécu d'autres, dont une victoire en finale de la Champions League, garde toujours une place importante dans son coeur pour ces souvenirs de 1994. «Pour nous, c’était quelque chose de magnifique de nous qualifier et de pouvoir vivre une Coupe du monde en tant que joueur. C’était un grand moment pour nous», explique le Vaudois, contacté par Blick.

Stéphane Chapuisat: «Une aventure très positive»

Même si la Suisse s'est faite sortir en 8es par une équipe d'Espagne bien supérieure (3-0), les souvenirs restent marquants. «Nous voulions aller le plus loin possible et on peut dire que c’est un tournoi réussi. Mais malheureusement les tournois ne se terminent bien que pour une équipe, celle qui finit championne du monde (rires). C’était une aventure très positive. Nous avions réussi un super match face à la Roumanie et cela a été un grand moment, car avec cette victoire, nous avons pu nous qualifier pour les huitième de finale. C’est un des très bons souvenirs de mon aventure en équipe nationale», assure «Chappi».

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La réalisation a donc été confiée à Yves Matthey, avec Frédéric Scola comme journaliste. «Mais nous avons tout fait ensemble, c'est un projet collectif. Nous avons reçu l'aide appréciable d'un monteur de talent, Christophe Gaberel», explique le réalisateur. Le film a été produit par l'émission Histoires vivantes, de la RTS.

Un projet romand, donc, pour une équipe qui est restée dans l'imaginaire comme étant majoritairement «welsche», un constat qu'Yves Matthey souhaite toutefois tempérer. «Pour nous, elle l'était. On a un peu assimilé Dominique Herr, Georges Bregy et même Thomas Bickel... Mais les Alémaniques voient aussi cette équipe comme la leur, avec Roy Hodgson au milieu comme arbitre, si j'ose dire. En fait, la vérité, c'est surtout que le Röstigraben n'était pas un thème.» S'il est vrai que la défense avec Marco Pascolo, Alain Geiger, Yvan Quentin et Marc Hottiger était francophone, et que Stéphane Chapuisat était le buteur, les stars offensives étaient Ciriaco Sforza, Alain Sutter et Adrian Knup, ce qui traduisait un excellent équilibre linguistique.

Christophe Bonvin, «comme s'il y avait été»

Christophe Bonvin, l'homme qui «a sauvé la tête» de Roy Hodgson ce fameux 27 mai 1992, est un personnage important de ce film, même s'il n'a pas disputé la Coupe du monde 1994. «Mais ce n'est pas grave, c'est comme si j'y avais été», sourit-il, trente ans plus tard. «Pour obtenir du temps de jeu avec tous ces grands joueurs, c’était compliqué», dit-il avec lucidité.

«C’était une chance inouie d’être dans cette équipe, avoue-t-il. Heinz Hermann, qui a fait une carrière exceptionnelle et 117 matches en équipe nationale, ne s’est jamais qualifié pour une phase finale. J’ai débuté ma carrière internationale avec lui et je l’ai terminée avec une nouvelle génération, composée d’Hottiger, Sutter, Chapuisat, ... qui m’a permis de vivre ces moments.»

Uli Stielike a posé les bases du succès

Le Valaisan rappelle que «se qualifier pour une phase finale était exceptionnel. À l’époque, une qualification était quelque chose d’inespéré, cela nous a rendu très fier. J’ai vécu la période durant laquelle on était content pour un nul. Ensuite, on entrait sur le terrain pour gagner les matches. Il y a eu un déclic mental, qui a été amorcé par Uli Stielike et qui a été complété par Roy Hogdson. L’amorce a été faite par cette génération extraordinaire dont j’ai eu la chance de faire partie».

Quant à Yves Matthey, qui vient donc de sortir deux films, il ne rêve que d'une chose: des vacances. Mais le réalisateur va vite se remettre au boulot, lui qui prépare la sortie de «Wet dogs», un road-movie, et a déjà sa prochaine idée «foot» en tête: un film sur les «segundos» et ce qu'ils ont apporté au football suisse, de Raimondo Ponte à Murat Yakin, jusqu'aux joueurs actuels, Xherdan Shaqiri et Granit Xhaka en tête.

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