Le discours lunaire de Gianni Infantino
Une Coupe du monde chaque deux ans pour sauver les migrants?

Dans la perspective du débat sur une Coupe du monde tous les deux ans, le président de la FIFA Gianni Infantino a critiqué l'attitude de l'Europe. Il a argumenté ses propos avec des déclarations lunaires.
Publié: 27.01.2022 à 10:16 heures
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Dernière mise à jour: 27.01.2022 à 10:18 heures
Blick

«Nous voyons que le football évolue dans une direction où quelques-uns ont tout et la majorité n’a rien. En Europe, la Coupe du monde a lieu deux fois par semaine parce que les meilleurs joueurs jouent sur ce continent», a déclaré Gianni Infantino devant le Conseil de l’Europe à Strasbourg. Le président de la FIFA a pris la parole lors du rapport de la commission «Gestion du football: économie et valeurs». Même en Europe, il existe un grand déséquilibre entre les différents championnats. La grande majorité du continent ne voit pas évoluer les meilleurs joueurs et ne participe pas aux meilleures compétitions.

La modification du rythme de la Coupe du monde de quatre à deux ans souhaitée par Gianni Infantino est rejetée avec véhémence par les fédérations d’Europe et d’Amérique du Sud. Mais pour le Valaisan, il s’agit manifestement d’une manière d’empêcher les migrants africains de trouver la «mort en mer».

«Pour que les Africains n’aient plus à traverser la mer»

«Nous devons impliquer le monde entier», souligne Gianni Infantino, en tournant surtout son regard vers l’Afrique. «Nous devons donner de l’espoir aux Africains, afin qu’ils n’aient pas à traverser la Méditerranée pour trouver ici une vie peut-être meilleure ou, ce qui est plus probable, la mort en mer. Nous devons leur offrir des possibilités et de la dignité. Pas avec de la charité, mais en permettant au reste du monde de participer. Peut-être que la Coupe du monde tous les deux ans n’est pas la réponse. Mais nous en discutons.»

Gianni Infantino a choqué avec son discours.
Photo: FIFA via Getty Images

Lors de son discours, Gianni Infantino a également pris la défense du Qatar, pays hôte de la Coupe du monde. L’émirat fait face à des critiques persistantes, notamment en matière de droits de l’homme. «Un changement ne se fait pas rapidement. En Europe, cela a pris des siècles. Grâce à la Coupe du monde et grâce au coup de projecteur, le système a évolué en un temps record, en quelques années seulement, a déclaré Infantino. Il y a encore beaucoup à faire, beaucoup à changer. Nous devons maintenir la pression, mais aussi reconnaître qu’il y a eu des changements.»

«6500 morts? Il y en a trois»

Par ailleurs, Infantino a démenti les chiffres de décès sur les chantiers de la Coupe du monde au Qatar. Selon lui, il est «tout simplement faux» d’annoncer la mort de 6500 ouvriers sur les chantiers. «Il y en a trois. Trois, c’est toujours trop, mais entre trois et 6500, il y a une grande différence», s’est exclamé le patron de la FIFA. Selon lui, les conditions de travail sont comparables à celles qui prévalent en Europe.

Les déclarations du Valaisan suscitent l’indignation. Ronan Evain, CEO de «Football Supporters Europe», a tweeté: «Jusqu’où Infantino peut-il descendre? Instrumentaliser les morts en Méditerranée pour vendre ses projets mégalomaniaques? Je n’ai pas les mots.»

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Tony Burnett, le chef de «Kick It Out» – une organisation qui lutte pour l’inclusion dans le football – explique: «La FIFA est une organisation qui réalise des bénéfices de plusieurs milliards. Ils ont l’argent pour investir dans des opportunités pour les personnes moins fortunées dans le monde entier. C’est pourquoi il est complètement inacceptable de suggérer qu’une Coupe du monde tous les deux ans, prévue principalement pour générer encore plus de profits pour la FIFA, est une opportunité pour les migrants de fuir des pays en guerre pour trouver une vie meilleure.»

«Sorti de son contexte»

Après le raz-de-marée, Gianni Infantino s’est justifié: «Certaines de mes déclarations semblent avoir été mal interprétées et sorties de leur contexte. Je tiens à préciser que les principaux points de mon discours concernaient le fait que toute personne occupant une position de décision a la responsabilité d’améliorer la situation des habitants de notre planète. S’il y a plus d’opportunités – y compris, mais pas seulement, en Afrique –, il faut permettre à ces personnes de les saisir dans leur pays. C’était un commentaire général qui n’a pas de rapport direct avec l’idée de jouer une Coupe du monde tous les deux ans.»

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