Le nouveau sélectionneur de la Nati
Murat Yakin, la force trop tranquille

Murat Yakin sera intronisé en tant que sélectionneur national - et successeur de Vladimir Petkovic - ce lundi. Le génial bâlois était déjà critiqué sur son éthique de travail quand il était joueur.
Publié: 08.08.2021 à 12:18 heures
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Dernière mise à jour: 08.08.2021 à 15:07 heures
Max Kern

La photo de Blick date de 2003: on y voit la star du FC Bâle de l’époque, Murat Yakin, allongé sur un hamac suspendu dans un but. Une pose appropriée pour le défenseur - futur entraîneur de l'équipe de Suisse - qui a toujours été une force trop tranquille.

L’entraîneur du FCB de l’époque, Christian Gross, grand amateur de discipline, est hors de lui lorsqu’il apprend l’existence de cette photo avec le hamac. Aussi parce qu’il existe encore un autre cliché de Murat Yakin en train de manger des ours en gélatine. Les sucreries: son grand péché mignon depuis l’enfance.

Une fratrie en or

Dans la biographie «Les Yakin», écrite en 2004 par le futur directeur du FCB Georg Heitz, Christian Gross avait déclaré: «Murat et moi avons certainement une éthique de travail différente, mais nous avons aussi des choses en commun: comme notre passion pour le football et notre volonté de gagner chaque match».

Murat Yakin pose pour Blick sur un hamac dans le but en 2003.
Photo: Blicksport
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Murat Yakin est né le 15 septembre 1974 à Münchenstein, près de Bâle. Il est le fils d’immigrants turcs. Son demi-frère aîné Ertan Irizik a joué au FC Saint-Gall dans les années 1980 en tant qu’arrière latéral. Son beau-père Mustafa Yakin lui a dit un jour: «Tes frères devraient aller à l’école plutôt que sur les terrains de football».

Le conseil tombe dans l’oreille d’un sourd. Hakan Yakin, brillant maître à jouer gaucher, a joué 87 fois pour l’équipe nationale suisse. Son frère Murat, le défenseur serein, a porté le maillot national à 49 reprises.

Un clash entre Bâle et GC

Été 1992: Murat Yakin, un géant de 17 ans, joue pour Concordia, le club de deuxième zone à Bâle. Lors des barrages de promotion contre le FC Ibach, le défenseur, en proie à des problèmes récurrents à la cuisse, marque le but de la victoire au match aller (1-0). Le directeur sportif de GC, Erich Vogel, est impatient de faire signer ce joueur exceptionnel. Yakin paraphe son premier contrat professionnel dans la foulée.

Le FC Bâle, qui n’est alors pas dans l’élite, ne se laisse pas abattre pour autant. L’aîné Yakin signe aussi avec le club rhénan. Il s’entraîne pour la première fois avec le FCB qui affirme que le défenseur n’avait en fait qu’un pré-contrat à Zurich. Mais l’entraîneur bâlois Friedel Rausch n’est pas convaincu et reproche au gamin «d’avoir cinq kilos de graisse en trop».

GC passe alors à l’offensive. La formation zurichoise emmène Murat Yakin en camp d’entraînement en Suède. Le jour du retour en Suisse, GC gagne 4-1 un match amical contre le Borussia Dortmund d’Ottmar Hitzfeld (avec Stéphane Chapuisat sur le terrain). Le jeune Bâlois joue quelques minutes.

Mama Emine bluffait comme personne

Dans la foulée, il s’assied à la table des négociations dans une salle du stade du Hardturm avec sa mère Emine, qui est bien décidée à ne pas laisser son garçon s’éloigner. Elle envoie balader toutes les conventions de négociations. «Je veux être payée en cash si mon fils doit quitter Bâle», affirme-t-elle. L’affaire est conclue autour de 10’000 francs suisses.

Le président de GC de l’époque, Benno Bernardi, le directeur de l’équipe, Fritz Jucker, Heinz Spross, neveu du mécène zurichois, Werner H. Spross et quelques autres sortent leur porte-monnaie. Ensemble, ils mettent 5000 francs sur la table. Emine Yakin ramasse les billets. «Muri» et sa maman signent. Les 5000 francs restants leur seront transmis dans un deuxième temps.

Bâle - Zurich sans permis de conduire

N’ayant pas encore 18 ans, Yakin fait le trajet entre Bâle et Zurich en voiture pendant six mois. Sans permis de conduire. Et qu’a dit sa mère si protectrice? «Elle m’accompagnait une fois par semaine et priait le reste du temps.»

Murat Yakin a remporté le titre de champion avec GC (en 1995 et 1996) et le club zurichois est devenu la première équipe suisse à participer deux fois à la Ligue des champions. Le but de son défenseur sur un coup franc d’une bonne quarantaine de mètres contre l’Ajax Amsterdam est resté dans toutes les mémoires.

Passé par le VfB Stuttgart, Fenerbahçe Istanbul, Bâle et Kaiserslautern, Murat Yakin est revenu au FCB en tant que joueur en 2001. Il agrandit encore son armoire à trophées: champions de Suisse en 2002, 2004 et 2005 et vainqueurs de la Coupe en 2002 et 2003.

Erich Vogel a ramené son «fils adoptif» à GC en tant qu’entraîneur adjoint en 2007. Un banc zurichois qu’il retrouve dix ans plus tard, cette fois comme coach principal. «Murat n’a jamais été le plus rapide sur le terrain mais il était déjà un tacticien hors pair quand il était joueur, s'est souvenu l’octogénaire. En vrai chef de la défense, il était très à l’aise sur les longues balles. C’était un joueur en avance sur son temps. «Muri» a toujours été quelqu’un qui savait très bien lire ses adversaires.»

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