Président de Vibiscum et de Vevey-Sports
«Eliminer le LS, c'est plus dur que de faire venir Orelsan»

William von Stockalper est président du Vevey-Sports, patron du Vibiscum Festival et boss de FrappeCom Suisse, une société spécialisée dans la publicité. Ce samedi (20h), son club de foot reçoit le Lausanne-Sport dans le cadre de la Coupe de Suisse. Interview.
Publié: 19.08.2023 à 12:27 heures
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Dernière mise à jour: 19.08.2023 à 12:50 heures
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Matthias DavetJournaliste Blick

On vient presque à se demander s'il y a assez d'heures dans la journée pour permettre à William von Stockalper de faire tout ce qu'il doit faire. Président du Vevey-Sports et installé dans la publicité, le Valaisan de 44 ans a décidé l'année dernière de lancer un open-air: le Vibiscum Festival.

Ce week-end, son Vevey-Sports reçoit le Lausanne-Sport dans le cadre du premier tour de la Coupe de Suisse. Blick a décidé d'aller lui rendre visite dans ses bureaux, dans la ville de Charlie Chaplin. Interview entre un fer à repasser et une trottinette électrique.

Qu’est-ce qui est le plus dur à organiser? Le Vibiscum ou un match de Coupe contre le Lausanne-Sport?
Clairement et de loin le Vibiscum Festival, c'est sûr. Si on dit que la Coupe, c'est 1 sur une échelle de 100, le festival se situe à 99.

William von Stockalper a plusieurs cordes à son arc.
Photo: VALENTIN FLAURAUD / VFLPIX.COM

Donc pour vous, c'est presque facile d'organiser cette rencontre contre le LS?
C'est vrai qu'on a une équipe qui est bien drillée ici dans les bureaux pour tout ce qui se rapportent à ces événements. Et je connais le stade comme ma poche, ce qui facilite les choses. Après, on a un très bon outil de travail mais ce n'est pas non plus facile d'organiser les gradins ou les fouilles. On veut aussi du confort en termes de boissons ou d'accessibilité des bars, surtout au vu des canicules.

La première édition de Vibiscum était pour aider le Vevey-Sports en sortie de crise Covid. C’était aussi le cas pour la deuxième édition?
Avec le festival, on a créé une fondation. Et ça a pris une plus grande envergure que le club. Le jour où on a du bénéfice – même s'il faudra quelques éditions pour y arriver –, on veut aider des associations veveysannes, voire de la Riviera ou du canton, qui solliciteraient des besoins. Ce n'est pas que centré sur le club.

Cet aspect, vous le mentionnez à Orelsan et DJ Snake quand vous les faites venir?
DJ Snake, en tout cas, le savait. Pour les autres, les artistes ne savent peut-être pas directement que le festival a été créé dans le but d'aider, mais leur manager est au courant. Pour l'instant, Vibiscum doit s'aider soi-même pour passer le cap de quelques éditions.

Pourquoi mettre sur pied un festival, et pas un repas de soutien comme tout le monde?
(rires) En fait, on avait ce repas de soutien et c'est justement en le mettant sur pied qu'on faisait de l'animation à l'extérieur, dans le jardin du rivage. C'était ça le but de la première édition: faire un truc un peu plus gros, inviter les gens à venir et faire tourner des bars. Puis, avec les artistes qu'on a eus, on s'attendait à quelques milliers de personnes. Ça a pris l'ascenseur un peu par effet domino.

Vous disiez qu’il y a une grande rivalité entre les acteurs qui organisent des festivals. Les relations sont-elles meilleures avec les autres présidents de club de foot?
Oui. Le milieu du football n'est pas le plus noble dans les arrangements, les accords, les transferts et tout ce qu'on a avec les joueurs, managers, etc. Mais c'est vrai qu'entre dirigeants de clubs, il y a un certain respect parce qu'on sait tout le travail qu'il y a derrière. Qu'on soit un club de 5e division ou de Super League, il y a du job derrière, à différents niveaux bien sûr.

Et avec les autres présidents vaudois?
Je les ai appelés pour faire des ballons de match contre le Lausanne-Sport et ils ont accepté. On voit qu'il y a un soutien, de la solidarité, et ce serait le cas en retour s'ils ont un match important. C'est clair que quand on voit une belle affiche comme ce Vevey - Lausanne, on aimerait tous l'avoir dans son club, ce qui est tout à fait humain et normal. Mais il n'y a pas du tout de jalousie. Au contraire, on est content pour les autres. Chacun son tour d'avoir un peu de bonheur.

Revenons un peu dans le passé. Président du Vevey-Sports, ce n’est pas votre premier travail dans le monde du football.
Non en effet, j'avais travaillé au FC Sion, en charge du sponsoring du club. Il y a un petit moment déjà… Ça doit faire bien 15 ans je pense.

C’est comment de travailler avec Christian Constantin?
Très intéressant, parce que qu'on a appris à se connaître et maintenant, c'est quelqu'un que j'apprécie beaucoup comme personne. Et puis je suis toujours proche du FC Sion car je travaille avec ma société pour le club (ndlr: il s'occupe des panneaux LED et de la digitalisation).

Vous en gardez un bon souvenir?
C'était une très belle expérience et ça m'a remis un pied dans le football. Et il y a les aléas de la vie. Je suis aujourd'hui un petit président d'un grand club historique et même un Christian Constantin sait le travail qu'il y a derrière.

Vous avez appris des choses de lui pour devenir président?
Il y a plein de choses dans sa personnalité. Je vais vous raconter une anecdote à ce sujet. Mon premier jour de travail, c'était une séance avec Jean-Claude Biver pour Hublot à Nyon. Il nous expliquait qu'il venait d'acheter les changements de joueurs à l'Euro. J'étais assez jeune, dans la 20aine, et je me retrouvais entre Christian Constantin et Jean-Claude Biver. Ça faisait beaucoup d'émotions.

Et comment s'est déroulé la suite de la journée?
Christian m'a pris dans sa voiture, puis on est allé à l'Université de Lausanne, où il devait faire une présentation. Il y avait 300 étudiants contre lui, et à la fin, il aurait pu vendre des abonnements pour le FC Sion, même à des Lausannois et autres. On apprend donc surtout sur sa personnalité, sa manière d'être, son expérience au niveau des médias, son franc-parler. Il a une belle expérience et il faut lui laisser ça.

Pourquoi être finalement parti du FC Sion?
C'était une période assez compliquée avec le club et avec le directeur général. J'étais aussi très ambitieux à mon âge. Au bout d'un moment, c'est mieux de partir en bons termes que de s'accrocher. Et comme on voit qu'il y a toujours une collaboration avec le FC Sion, c'était mieux ainsi.

Un Valaisan qui décide de reprendre un club vaudois, ce n’est pas trahir sa patrie?
(rires) J'ai beaucoup d'amis valaisans qui vont venir samedi donc ils ne m'en tiennent pas rigueur. Vevey est une ville très ouverte, il y a beaucoup de Valaisans ici. Et puis, j'ai toujours le VS, pour Vevey-Sports, le Valais mais aussi mes initiales. Il y a un petit peu de Valais à Vevey, et inversément (rires).

Aucun de vos proches ne vous en veut?
Non, vraiment pas. Au contraire, j'ai même des amis très conservateurs. Et pour eux, c'est quelque chose de beau, puisqu'ils savent que c'est fait avec le cœur. Je pense que même si j'avais eu un club genevois, ils me l'auraient pardonné.

Comment êtes-vous propulsé à la tête du Vevey-Sports?
Quand le club a fait faillite en 2005, les dirigeants ont recherché à rebâtir petit à petit. Puis ils ont appris que j'avais travaillé au FC Sion, que j'étais dans la publicité et ils m'ont demandé des conseils. Et puis une séance, deux, dix, quinze et je rejoins le comité. Après, j'ai commencé à aider financièrement le club et c'est devenu tout naturel de le reprendre au bout d 'un moment. On s'attache aux gens. Désormais, le Vevey-Sports fait partie de ma famille.

Et quand on vous l'a proposé, vous avez directement accepté ce poste?
Ça n'a pas été tout de suite «Youpi, je reprends un club de football». Mon père venait de décéder et il avait joué au FC Sion et a construit le stade de Tourbillon. Au moment où on m'a proposé, ma mère m'avait donné des vieilles boîtes à trier avec, au fond, un journal pour protéger. Des ses colonnes, il y avait un article de l'époque sur un Vevey - Sion joué devant 6000 personnes au stade de Copet. C'était un signe du destin, car il y avait mes deux clubs.

C'est du bénévolat d'être président d'un club en 1re Ligue?
Oui. Même plus, je dirais que ça va au-delà du bénévolat parce qu'un président à ce niveau met un peu d'argent de sa poche. Mais j'ai aussi appris avec les années à mettre de moins en moins, pour que le club puisse survivre après ma présidence. Pour moi, il doit y avoir au moins deux tiers de sponsoring.

Quel aspect de ce travail vous plait le plus dans ce travail?
Ce que j'adore, c'est au niveau relationnel. Un club de football, c'est comme un festival. On a tout, de la comptabilité, au sponsoring en passant par les relations publiques. Tout est différent et c'est passionnant et palpitant. Avant le match, je vais aussi monter les barrières, mettre la main à la pâte. On passe du plus simple à suer au plus grand en costard cravate. C'est ma personnalité.

Et samedi, vous serez en t-shirt ou en costume?
Ça sera en polo comme je fais toujours speaker. J'adore, j'ai la meilleure place du stade. Oui, j'irai faire les séances et serrer des mains mais, pendant le match, je serai dans ma petite cabane, derrière mon micro.

Vous semblez être un homme très occupé. Gérer un club de foot, ce n’est pas trop?
Entre le festival, le club de foot et la vie privée, c'est vrai que c'était une période vraiment dure pour moi. Heureusement, le club est toujours là et j'ai pu anticiper un peu le travail. En plus, j'ai beaucoup de chance car j'ai un comité qui m'est fidèle depuis plus de dix ans.

D'ailleurs, vous avez été viré de votre équipe de vétérans à Vevey. C'était une grande déception?
(rires) Alors il y a eu un match, mais c'était il y a trois ans. J'ai toujours mon passeport mais c'est vraiment en cas d'urgence. C'est assez rare, mais ça se peut.

En parlant de déception, comment avez-vous vécu la dernière saison?
A la mi-saison, j'étais presque certain qu'on allait un peu jouer en roue libre et ne pas se qualifier pour ces finales. Et on a été agréablement surpris car il fallait un alignement de planète hors du commun lors de la dernière journée pour se qualifier et ça a été le cas. Lors des finales, on n'avait pas de pression – parce qu'on ne s'y attendait pas – et on a été un peu pris par surprise.

Quelles ambitions avez-vous pour Vevey cette saison?
Je prends chaque saison tranquillement. Oui, on a des objectifs. Oui, on veut monter un jour. Mais si ce n'est pas cette année, ce n'est pas grave. Je ne suis pas pressé. Si le comité veut continuer à m'élire, j'ai quelques années pour peut-être réaliser ce rêve.

Mais ce samedi, il y a déjà le match de Coupe contre le LS. Vous croyez votre équipe capable de réaliser l’exploit?
Si je n'étais pas positif, en tant que président, mes joueurs se poseraient des questions. On a les pieds sur terre, on joue contre un club de Super League avec un budget bien plus élevé que le nôtre et des joueurs d'une autre qualité. Mais on n'a rien à perdre, l'exploit peut toujours arriver. Je dis souvent à mes joueurs: «Quand on n'a pas tout donné, on n'a rien donné.»

Qu’est-ce qui est le plus dur? Faire venir Orelsan ou battre le Lausanne-Sport?
(rires) Avec du recul, je vais dire que ça va être d'écarter le LS.

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