Nouveau responsable nommé
«J'aimerais être directeur comme j'étais sur la glace: ouvert au dialogue»

C'est Nicolas Fluri qui va succéder à Andreas Fischer à la tête des arbitres suisses. Le Romand a arbitré 17 ans au plus haut niveau et sifflé lors de JO et Mondiaux. Il revient sur sa vision de l'arbitrage et sur sa manière de diriger.
Publié: 19.07.2024 à 12:20 heures
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Dernière mise à jour: 19.07.2024 à 12:21 heures
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Grégory BeaudJournaliste Blick

Nicolas Fluri a été nommé directeur de l’arbitrage au sein de la Fédération suisse. Le Jurassien de 40 ans succède à Andreas Fischer, parti rejoindre l’organisation d’Ambri-Piotta. Sitôt l’annonce officialisée, l’ancien arbitre de National League et ancien arbitre international a pris le temps de raconter sa vision pour l’avenir des directeurs de jeu dans le hockey suisse.

Tout d’abord félicitations.
Merci beaucoup.

Et félicitations d’avoir tenu ça secret jusqu’au dernier moment aussi.
(Il rigole) C’est un moment important et je suis content que cela se soit passé ainsi.

Nicoals Fluri (à g.) a arbitré durant 17 ans dans l'élite.
Photo: Keystone

J’imagine que lorsque Andreas Fischer a annoncé son départ, tu as rapidement décidé de te profiler pour ce poste. Je me trompe?
Non, tu as bien raison. Après la fin de ma carrière en 2022, j’ai décidé de ne rien faire durant une année. J’ai pris ce temps pour être tranquille. Je savais à l’époque qu’après toutes ces années d’arbitrage, il me fallait un peu de temps. Mais c’est justement durant cette période que je me suis aussi rendu compte que le hockey était ma vie. En plus de 17 ans d’arbitrage au plus haut niveau, j’ai donné et reçu énormément de ce milieu. Donc oui, quand la postulation est sortie, j’ai su que c’était clair pour moi de me montrer intéressé.

Mais tu as toujours été un homme de terrain. Ce passage dans un rôle davantage managérial ne te fait pas peur?
Quand j’ai arrêté ma carrière d’arbitre, je n’avais pas encore de plan précis. Je voulais juste me reposer et voir autre chose. Et puis les choses se sont faites progressivement. J’ai commencé comme coach pour le sport de compétition, puis j’ai été nommé PSO pour les juniors M17 et M20 élites. Ensuite, Danny Kurmann, chef des arbitres de l’IIHF, m’a demandé si je voulais coacher pour la fédération internationale. Cela m’a permis de rester dans le monde du hockey.

Un monde que tu connaissais par cœur.
Oui, mais il faut savoir que je n’ai jamais été arbitre professionnel à 100%. J’ai toujours gardé mon travail à côté. Le monde du sport est très particulier, et il est difficile de trouver un travail qui apporte les mêmes émotions et interactions. Et c’est justement durant cette année de transition que je m’en suis rendu compte. J’avais un super travail et je m’y plaisais… Mais le monde du sport, c’est quand même très particulier.

J’imagine qu’au moment de te «vendre», tu as parlé de ta vision de l’arbitrage et de ce que tu voulais faire de ce département. Comment as-tu convaincu les dirigeants que tu étais la bonne personne?
Je suis quelqu’un d’authentique et je dis les choses comme je les pense. J’ai vu un développement immense de l’arbitrage au fil des années. Je l’ai vécu de l’intérieur. J’ai commencé avec le système à trois arbitres et j’ai dû évoluer vers le système à quatre. Il faut se rendre compte que j’ai arbitré avec Reto Bertolloti au début de ma carrière. Puis, il est devenu mon chef avant Kaufmann, Reiber et Fischer.

De quoi voir toutes sortes de manières de manager.
Exactement. Et je ne parle même pas de l’aspect personnel. Juste les moyens techniques. Lorsque j’ai commencé, il n’était pas question d’analyser ses matches à la vidéo. Il n’y en avait pas (rires). Les seules images dont nous disposions provenaient d’une caméra derrière les buts pour voir si le puck avait franchi la ligne… lorsque l’on voyait quelque chose. Donc, je pense déjà pouvoir comprendre les évolutions nécessaires.

Et d’un point de vue personnel?
Avec les années, j’ai essayé d’apporter quelque chose et surtout de rester qui je suis. J’ai mes idées et je pense savoir quelle manière de manager peut fonctionner. Mon idée principale? Fédérer tout le monde. Quand on est director of officiating, on ne s’occupe pas que des arbitres de National League et de Swiss League. C’est jusqu’en 4e ligue et dans les mouvements juniors. C’est très important de le garder à l’esprit. Tout comme il est important de comprendre la Suisse et ses différences culturelles de chaque région.

Ce qui n’a peut-être pas toujours été le cas, non?
Je ne suis pas là pour parler du passé. Par contre, je suis là pour créer un groupe. Il y a 1400 arbitres en Suisse. Je ne pourrai pas faire un cours avec tout le monde (rires). Mais j’ai envie que chacun se sente important et fasse partie de l’équipe. C’est important que les jeunes qui commencent aient des étoiles dans les yeux en voyant les arbitres pros. Que cela puisse peut-être leur donner envie de faire carrière s’ils le souhaitent. Je vais essayer de m’inspirer de ce que j’ai vécu durant ma carrière et de ma vision de ce métier. Je vais essayer de faire en sorte que tout le monde puisse participer au succès de l’arbitrage en étant le moins pyramidal possible, en responsabilisant les gens. On a un très bon niveau en Suisse.

Pourtant, j’ai l’impression que les critiques sont toujours plus nombreuses. Tu ne le ressens pas ainsi toi?
Non, pas vraiment. Tu sais, j’ai vécu une période où la violence était davantage présente. On a dû fermer le Gothard pour que nous puissions rentrer à la maison sous escorte. Quand tu as vécu ça, tu es prêt à pas mal de choses. Mais pour revenir aux critiques, je trouve important de reconnaître ses erreurs. L’arbitre peut faire des erreurs. Et c’est d’ailleurs un de mes messages. Le match parfait n’existe pas. Même si le public ne s’en rend pas forcément compte, il y aura toujours des petites erreurs ou des imperfections.

Comme?
Un mauvais placement ou un détail qui aurait pu être mieux géré. Je te donne un exemple. Un arbitre peut être mal placé et n’aurait pas vu quelque chose qui aurait pu se passer. Par chance, il n’y a rien eu. Cela ne veut pas dire que le placement n’était pas perfectible. Ce qui est important, c’est d’éviter que cela ne se reproduise. Il faut rester humble et transparent, et avoir une attitude positive face aux erreurs pour les transformer en opportunités d’amélioration.

Durant ces derniers play-off, il y a tout de même eu des erreurs qui ont été un peu moins petites.
Et si cela se reproduit, je ne m’en cacherai pas. Il faut reconnaître les erreurs. De toute façon, les arbitres savent immédiatement s’ils ont fait une erreur. Ils font immense travail d’analyse à la fin d’un match également. Je pense que les gens ne le remarquent pas assez. Mais quand un arbitre fait une grosse erreur, il ne va pas prendre sa douche et rentre à la maison comme si de rien n’était. Il dort mal et quand tu as été arbitre, ça te fait mal au cœur, car tu sais ce par quoi le gars va passer.

Donc ton rôle, c’est aussi de les accompagner.
Oui évidemment. Mais quand je te parlais de verticalité avant, c’est là aussi où je veux en venir. J’ai envie que les gars aient cette motivation intrinsèque et aient cette envie de progresser par eux-mêmes. Il n’y a pas besoin de quelqu’un qui leur dise toujours que faire. Ils sont tous experts s’ils sont en National League. Ils connaissent leur job et les règles sur le bout des doigts. Avoir la bonne attitude avec les coachs, les joueurs, les fans: ça, c’est ce qui m’importe. Expliquer les choses et être transparent, c’est crucial. Si tu es humble et reconnais une erreur, on te pardonne beaucoup de choses.

Tu penses que le fait que tu sois romand ait pu jouer en ta faveur?
Je ne crois pas, non. Je trouverais dans tous les cas dommage que l’on réduise ma candidature à cet unique critère.

Je ne l’ai pas dit dans ce sens.
(Il rigole) Non, je sais bien. Mais bien sûr que cela fait partie de ma culture et je suis fier de mes origines. Je suis un Romand et je trouve chouette que je sois pris à ce poste. J’ai grandi dans la Fédération en provenant d’une minorité linguistique. Est-ce que cela a fait pencher la balance pour moi? Je ne sais pas. Peut-être. Mais je sais comment on travaille dans une fédération avec différentes cultures nationales. À cela s’ajoute encore l’anglais qui a une part importante dans ce milieu. À la fin de ma carrière, j’avais d’ailleurs décidé de ne parler plus qu’anglais avec les joueurs. Cela permettait de mettre tout le monde sur un pied d’égalité. Romand, alémanique ou tessinois. Tout ça pour te dire que je trouve important de créer un écosystème où tout le monde se sente traité de la même manière. Je ne vais pas arriver et parler en français à tout le monde sous prétexte que je suis romand (rires). Ce serait le pire que je pourrais faire. J’aimerais être directeur comme j’étais sur la glace: ouvert au dialogue.

National League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
HC Fribourg-Gottéron
HC Fribourg-Gottéron
1
3
3
2
SC Berne
SC Berne
1
2
3
2
ZSC Lions
ZSC Lions
1
2
3
4
EV Zoug
EV Zoug
1
1
3
4
Lausanne HC
Lausanne HC
1
1
3
6
HC Lugano
HC Lugano
2
1
3
7
EHC Kloten
EHC Kloten
1
1
2
7
Rapperswil-Jona Lakers
Rapperswil-Jona Lakers
1
1
2
9
HC Ambri-Piotta
HC Ambri-Piotta
1
-1
1
10
HC Davos
HC Davos
2
-3
1
11
Genève-Servette HC
Genève-Servette HC
1
-1
0
12
EHC Bienne
EHC Bienne
1
-2
0
12
SCL Tigers
SCL Tigers
1
-2
0
14
HC Ajoie
HC Ajoie
1
-3
0
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