Marc Rosset sur l'affaire Djokovic
«Novak a essayé et a obtenu ce qu'il voulait»

Dans une interview accordée à Blick, l'ex-tennisman genevois Marc Rosset explique pourquoi Novak Djokovic devrait communiquer le plus rapidement possible sur les raisons qui font qu'il est autorisé à disputer l'Open d'Australie.
Publié: 05.01.2022 à 17:17 heures
Cécile Klotzbach

Que pensez-vous de la décision de faire jouer Novak Djokovic à Melbourne?
Marc Rosset:
La situation est compliquée. Les raisons médicales pour une autorisation exceptionnelle sont clairement énumérées. Pour pouvoir juger si tout est légal, Djokovic devrait dévoiler ces raisons. Et il devrait le faire rapidement. J'ai lu que certains hommes politiques ou sportifs, comme Rod Laver, s'étaient déjà exprimés de manière critique.

Comment Djokovic pourrait-il se justifier?
Soit il peut prouver qu'une vaccination antérieure s'est mal passée chez lui, soit qu'il a des problèmes cardiaques. Peut-être qu'il a eu le Covid à l'automne et qu'il n'en a parlé à personne. Si l'un ou l'autre est vrai, l'histoire serait close. Dans le cas de Djokovic, il y a pour moi surtout un problème de communication.

Ce n'est certainement pas juste envers certains autres joueurs...
Bien sûr, mais c'est malheureusement comme ça que ça se passe dans la vie. Il est évident qu'en tant que numéro 1, tu bénéficies d'avantages. Roger Federer en a souvent profité. Peut-être que le tournoi veut absolument voir Djokovic battre le record du Grand Chelem à Melbourne. L'année dernière déjà, il y avait eu cette séparation des classes. La plupart des participants ont dû subir une quarantaine sévère, certains avaient vécu pendant quatorze jours dans une chambre d'hôtel où ils ne pouvaient même pas ouvrir les fenêtres. Et deux ou trois privilégiés ont pu se préparer en beauté à Adélaïde dans des conditions plus qu'agréables. Mais je ne critique pas Djokovic personnellement. Il a essayé et obtenu ce qu'il voulait - ce n'est pas condamnable. Mais est-ce qu'il s'est rendu service? Cela pourrait être dur pour lui, car son cas concerne la santé et la polémique sur la pandémie.

Marc Rosset: «Pour moi, il y a surtout un problème de communication.»
Photo: Keystone

Qu'est-ce qui l'attend?
Son arrivée en Australie sera certainement particulière. En effet, un sondage récent a montré que 80% de la population ne voulait pas qu'un joueur non vacciné puisse se présenter à Melbourne. Il y a là-bas des gens qui n'ont pas le droit de se déplacer dans leur pays depuis le début de la pandémie, qui ont vécu en quarantaine pendant cinq mois d'affilée, qui ont perdu leur travail, qui n'ont jamais pu voir leurs grands-parents dans l'État voisin ou qui n'ont pas pu assister à des funérailles. J'imagine que certains sont choqués qu'un joueur de tennis vienne de l'étranger et bénéficie de règles spéciales.

Cette décision nuit-elle aussi au tennis?
On en parlera beaucoup, et ce n'est pas bon pour le tennis. Le sport n'est pas sans importance, car il donne beaucoup aux gens, mais il ne doit pas se mêler d'économie ni de politique. Et surtout, il ne faut pas le mettre au-dessus de la santé et accorder des passe-droits. Il y a des règles, et elles s'appliquent à tous.

(Adaptation par Matthias Davet)

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la