Un chef obsédé par la qualité
Chez Kytaly, Edoardo Petricca sublime les classiques italiens

Il n'y a pas que les pizzas chez Kytaly: l'enseigne fait aussi restaurant, avec un chef qui met sa technique au service des grands classiques italiens. Dégustation.
Publié: 20.08.2022 à 13:18 heures
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Dernière mise à jour: 23.08.2022 à 14:15 heures
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Fabien GoubetJournaliste Blick

Kytaly, c'est une pizzeria et un restaurant italien sis dans le quartier de banques à Genève. Y trouve-t-on les meilleures pizzas de Suisse? Possible. L'enseigne est en tout cas régulièrement classée parmi les meilleures pizzerias européennes par le guide «Where to Eat Pizza», qui recueille plus de 1000 adresses dans le monde. Il faut dire que certaines pizzas à la carte ont été créés par Franco Pepe, l'homme derrière la meilleure pizzeria du monde en 2016 selon ce même guide, et qui a obtenu de nombreuses autres distinctions.

Mais c'est pour discuter pasta et non pizza que je me suis rendu chez Kytaly. J'y ai rencontré l'un des chefs, Edoardo Petricca, qui s'est fait une spécialité de revisiter les classiques de la gastronomie italienne. Revisiter? Plutôt sublimer, car on ne joue pas (trop) avec les classiques.

Classiques premium

Originaire de Sora, dans la région de Rome, Edoardo Petricca est en charge des plats qui sortent des cuisines de Kytaly. Formé à la Chef Academy en Ombrie, passé par les fourneaux de Niko Romito, chef triplement étoilé dans son restaurant Reale, à Castel di Sangro dans les Abruzzes, il applique son expérience et sa technique pour sortir des classiques en version premium.

«La cuisine italienne, c'est une cuisine simple, qui a du goût et véhicule les histoires des familles, glisse le chef de Kytaly, Edoardo Petricca. J'ai voulu la reproduire, mais en y apportant plus de technique et de légèreté.»
Photo: Fabien Goubet

Les fameux spaghettis «cacio e pepe», délice simplissime en trois ingrédients (spaghettis, pecorino, poivre) deviennent sous sa houlette «cacio, bufala e pepe», dont les pâtes cuisent pendant très exactement cinq minutes dans le petit lait de bufflonne dans lequel barbotent habituellement les mozzarella di bufala. «Cela imprègne les pâtes et leur donne du goût, et ça nous permet d'utiliser le petit lait qui serait parti à la poubelle», explique le cuisinier.

Utiliser un maximum les produits compte lorsque comme ici, tout vient d'Italie, des tomates aux vins. «Nous utilisons un maximum de produits DOP [l'équivalent italien de l'Appelation d'origine contrôlée AOP] importés d'Italie, explique le manager Marco Magnolini. Nous sommes intransigeants là-dessus: si parfois nous ne parvenons pas à nous faire livrer un ingrédient, alors on ne prépare pas le plat qui le contient. C'est une manière de nous démarquer. Ce que l'on cherche, c'est recréer une expérience de restaurant la plus fidèle à l'Italie».

On ne touche pas aux recettes

Et ne vous avisez pas de demander de mettre un plat à votre goût en changeant un ingrédient ou pire, en commettant un crime de lèse-majesté tel que demander du parmesan dans un plat aux fruits de mer: «C'est non, assurent les deux hommes en choeur. On peut enlever un ingrédient si on ne l'aime pas, mais on ne peut pas en ajouter. Il faut protéger les recettes». J'applaudis, et leur fais remarquer que je commence à avoir faim.

Edoardo me prépare d'abord une belle burratina (une burrata constituée d'une seule grosse boule) servie avec des poivrons rôtis et une crème d'anchois de Cetara, petit port de Campanie réputé pour la qualité de ses produits. La burratina est gonflée comme un ballon, sa peau ne résiste guère au tranchant de mon couteau et laisse se déverser un savoureux nectar de lait de bufflonne, que la crème d'anchois vient complimenter à merveille.

Photo: Fabien Goubet

Tomates à l'honneur

J'enchaîne avec des pipe rigate aux tomates et au thon - autrement dit une version d'un autre classique italien, les pâtes à la sauce tomate «pasta al pomodoro». Normalement, celles-ci consistent en une bonne sauce tomate, avec un peu de basilic. La version d'Edoardo Petricca va plus loin, sans dénaturer l'essence de la recette. Ses «quattro pomodori, basilico fritto, limone canditto» consistent en une lettre d'amour à la tomate écrite sous quatre formes: en coulis bien épais, lisse et brillant, rôties avec des tomates San Marzano poussant sur les pentes du Vésuve, confites avec des tomates cerise douces et sucrées, et enfin en poudre de tomates séchées, utilisées comme condiment.

Photo: Fabien Goubet

Autant vous dire que si vous aimez la tomate, il y en a. C'est d'un rouge sang profond, ça sent la tomate, et surtout ces quatre préparations concentrent les saveurs comme rarement: revoilà le goût des tomates de mon enfance, le plaisir de la découverte d'une assiette de pâtes étant gamin ou celui des assiettes englouties dans ma chambre d'étudiant, sauf que désormais il y a de la ventrèche de thon et des petits «bonbons» de citron confit en sus.

Séduit et convaincu, j'ai quand même accepté une soupe de fraise en dessert - elle était si brillante que je me voyais dedans comme dans un miroir, et si gourmande que j'avais l'impression de plonger ma cuillère dans un pot de confiture, comme un gamin bravant les interdits familiaux.

Photo: Fabien Goubet

C'est surtout sur le plat principal que j'ai compris la démarche d'Edoardo Petricca: des ingrédients premium et des techniques avancées pour rendre hommage aux plats qui ont bercé son enfance. Sa passion pour la cuisine lui est d'ailleurs sans surprise venue de sa famille, en regardant sa grand-mère préparer des plats dans une trattoria. «La cuisine italienne, c'est une cuisine simple, qui a du goût et véhicule les histoires des familles, glisse le chef. J'ai voulu la reproduire, mais en y apportant plus de technique et de légèreté.» Pari tenu.
Kytaly
Boulevard Georges Favon 12, Genève

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