Affiches et clips en France
Parier en ligne sur le foot? Gare au danger pour les mineurs!

Le département Français de Seine-Saint-Denis accueillera en 2024 les Jeux Olympiques d'été de Paris. Mais avec l'ouverture du Mondial de foot, une inquiétude monte: les ravages des paris sportifs.
Publié: 21.11.2022 à 07:59 heures
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Dernière mise à jour: 21.11.2022 à 08:46 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

La Seine-Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris, est le département le plus pauvre de France métropolitaine. Ses quartiers, souvent majoritairement occupés par des populations d’origine immigrée, reviennent régulièrement dans l’actualité en raison des difficultés sociales que rencontrent leurs habitants. Seulement voilà: cette collectivité locale est aussi l’une des plus emblématiques pour le sport en France.

C’est ici que se dérouleront, en 2024, la majorité des épreuves des Jeux Olympiques d’été de Paris. C’est ici que se trouve le fameux Stade de France où «les Bleus» de Zinedine Zidane et Didier Deschamps remportèrent, le 12 juillet 1998, leur première coupe du monde de football. C’est à Bondy, l’une des communes voisines de Saint-Denis, qu’a grandi le prodige du foot français Kylian Mbappé.

Et c’est ici que se trouve, selon les estimations des autorités françaises, la plus grande densité de parieurs sportifs en ligne, surtout parmi les jeunes. D’où le lancement d’une campagne massive d’avertissement contre cette industrie virtuelle. Avec un slogan supposément choc: «T’as vu, T’as perdu».

Même la FIFA, dont le président Gianni Infantino a pris la défense du Qatar avant l'ouverture du Mondial, est consciente du danger: «Le chiffre d’affaires du marché des paris liés au football s’élève à plusieurs milliards. Si ce marché constitue une source de financement pour le football, il représente aussi un risque pour son intégrité» peut-on lire sur son site web.
Photo: freshfocus
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Les chiffres d’abord. Selon l’Autorité nationale française des jeux (ANJ), le chiffre d’affaires des firmes de paris sportifs en ligne sera au minimum, pour le seul Mondial au Qatar, de 530 millions d’euros dans l’hexagone contre 366 millions pendant le Mondial 2018 et 435 millions lors de l’Euro 2020. Un demi-milliard d’euros de mises, souvent placées sur leur téléphone portable par des mineurs (un tiers des parieurs ont entre 15 et 17 ans), alors que la loi l’interdit.

Or, voilà que la Seine-Saint-Denis prend peur. Selon les autorités départementales, 1,3 milliard d’euros sont partis en fumée sur le territoire français, sous forme de paris électroniques perdus, en 2021 (plus de dix milliards sur le plan national). Soit presque l’équivalent du budget départemental de 1,89 milliard d’euros en 2021. Problème: les jeunes empruntent souvent de l’argent pour parier. Ils donnent facilement les coordonnées de leurs comptes bancaires, voire s’arrangent pour donner celles des comptes de leurs parents.

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Un avertissement a donc été préparé par de nombreuses municipalités de Seine-Saint-Denis, et de la région parisienne. On le trouve sur leur site web, et parfois sous forme d’affiches dans les rues: «A l’approche de la Coupe du Monde au Qatar, du 21 novembre au 18 décembre, nous devons être vigilants face aux paris sportifs, tout particulièrement envers les mineurs peut-on lire. Betclic, Unibet, Winamax…

Par leurs publicités sur les réseaux sociaux, ils attirent de plus en plus de joueurs mineurs. Un risque pour ce public très sensible à l’addiction et à qui la loi française interdit de parier. Les paris sportifs peuvent rapidement provoquer des formes d’addiction plus ou moins importantes, en particulier chez les jeunes adultes. De plus, parier, c’est surtout prendre le risque de perdre beaucoup d’argent. Soyez donc vigilants face à ce phénomène, très médiatisé et largement diffusé par de nombreux influenceurs adorés par les jeunes.»

Une inquiétude ancienne

Cette inquiétude n’est pas du tout nouvelle. En 2018, lors de la Coupe du monde en Russie remportée par la France, des campagnes d’information similaires avaient eu lieu. Leurs promoteurs estiment que la loi française de 2010 sur l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne est trop laxiste. Un mineur sur trois déclare avoir joué au moins une fois à un jeu d’argent et de hasard au cours de l’année écoulée.

Or, qui dit Mondial dit accélération des sollicitations publicitaires. «Le but n’est pas de diaboliser les paris sportifs, mais de porter auprès des jeunes, avec leurs codes, un message d’alerte sur les risques du jeu excessif», a justifié Isabelle Falque-Pierrotin, la présidente de l’ANJ, lors d’une conférence de presse pour présenter le clip vidéo et les affiches placardées à ce sujet dans le métro. «Le foot a toujours été le sport préféré des parieurs en ligne, devant le tennis et le basket, a-t-elle ajouté. Certes, le parcours de l’équipe de France est déterminant sur le montant des enjeux, mais l’Autorité s’attend à ce que les paris prennent une grande ampleur pour cette Coupe du monde.»

La colère de Stéphane Troussel

En Seine-Saint-Denis, l’un des plus ardents promoteurs de cette campagne de sensibilisation est Stéphane Troussel, président socialiste du département. «Combien de profits faits sur le dos des jeunes à coups de publicités agressives?», s’énerve-t-il sur son compte Twitter. Dans son département, où la part des moins de 25 ans est la plus importante en France, sa question ressemble à un signal d’alarme.

«Ce Mondial, c’est celui de tous les excès sur les paris en ligne, a-t-il complété dans un entretien à RMC. Alors que la publicité ne devrait pas cibler les jeunes, parce que je rappelle que les paris en ligne sont interdits aux mineurs, on voit bien que les messages de communication visent particulièrement les jeunes. Et les jeunes des quartiers populaires, qui vont espérer pouvoir améliorer leur situation personnelle ou celle de leur famille. […] Il y a des troubles psychologiques, de l’isolement social. Il y a un jeune joueur sur quatre qui a déjà vendu ou emprunté pour continuer de jouer.»

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