70 ans du CERN
A Genève, von der Leyen présente sa vision de l'Europe nucléaire (ou pas)

La présidente de la Commission européenne est à Genève ce mardi 1er octobre pour le 70e anniversaire de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (le nom officiel du CERN). Mais quelle est sa vision de l'Europe?
Publié: 01.10.2024 à 13:24 heures
La présidente allemande de la Commission européenne est présente à Genève pour le 70e anniversaire du CERN. Elle doit rencontrer Viola Amherd.
Photo: IMAGO/ZUMA Press Wire
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Richard WerlyJournaliste Blick

Comment concilier le besoin énergétique des économies et des populations européennes avec le défi posé par la guerre en Ukraine et l’impératif d’une décarbonation de l’économie? A Genève ce mardi 1er octobre, Ursula von der Leyen, 65 ans, devra apporter des réponses.

Le lieu s’y prête. Il exige même des scénarios concrets puisqu’il s’agit du CERN, l’Organisation européenne de recherche nucléaire dont les installations sont à cheval sur les territoires suisse et français. Le CERN fête, ce mardi, son 70e anniversaire. Une commémoration qu’avait entamée Emmanuel Macron lors de sa visite d’État en Suisse, les 15 et 16 novembre 2023, achevée précisément dans les tunnels bourrés de technologie et d’informatique qui permettent au CERN d’effectuer les simulations les plus sophistiquées sur les atomes.

Le dossier de l’énergie nucléaire est crucial pour l’avenir industriel et écologique de l’Europe. C’est en tout cas ce que pensent seize pays membres de l’Union européenne qui, autour de la France, ont créé en mai 2023 l’Alliance du nucléaire. Qui la compose? La Belgique, la Bulgarie, la Croatie, l’Estonie, la Finlande, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie et la Suède, mais aussi l’Italie avec le statut d’observateur.

Pour ces pays, «l’énergie nucléaire est indispensable, aux côtés des renouvelables, pour mener à bien leur transition énergétique». Avec deux impératifs en conséquence: la construction d’une chaîne d’approvisionnement nucléaire européenne indépendante et la relance de l’industrie nucléaire européenne, en matière de compétences et d’innovation notamment. Ce qui passe, entre autres, par le CERN à Genève.

Fukushima, le tournant

Le problème est qu’Ursula von der Leyen vient du pays qui a déclenché l’offensive contre l’atome civil: l’Allemagne. Le 30 mai 2011, suite à la catastrophe de Fukushima, au Japon, Angela Merkel sonne l’arrêt du nucléaire allemand. «Nous voulons que l’énergie du futur soit plus sûre», déclare-t-elle. Dix ans après, les tours de refroidissement ont été démolies une par une. L’Allemagne comptait 17 centrales nucléaires en activité en 2011. Ses deux derniers réacteurs, Emsland, Isar 2 et Neckarwestheim 2, ont été fermés fin 2023.

Mais attention: la politique a depuis repris ses droits sur ce sujet très sensibles pour les «Verts», membres de la coalition au pouvoir du chancelier Scholz. Le chef de file de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), Friedrich Merz a ni plus ni moins proposé de redémarrer des centrales nucléaires. Avec à l’appui une récente étude éloquente: selon un rapport du Radiant Energy Group, l’électricité allemande est aujourd’hui décarbonée à 50%, contre 74% si le pays n’était pas sorti du nucléaire.

Le cas de la Suisse

La question, qui se pose aussi à la Suisse, est évidemment celle du retournement énergétique engendré par la guerre en Ukraine et la cessation de l’approvisionnement de l’Europe en gaz russe. Le Conseil fédéral, rappelons-le, a pris en 2011, dans la foulée de l’Allemagne, la décision de principe de sortir progressivement de l’énergie nucléaire. La centrale de Mülheberg a été la première à être fermée et déconnectée du réseau électrique en 2019. Mais quid des accords énergétiques entre la Suisse et la France, qui permet aux opérateurs helvétiques de s’approvisionner en énergie via les réacteurs français?

Cartes brouillées

En guise de réponse, Ursula von der Leyen a choisi pour l’heure de brouiller les cartes. Sur le plan politique et industriel, la présidente allemande de la Commission est très liée à la CDU, son parti d’origine, résolue à remettre en cause le pacte vert européen approuvé par les 27 pays de l’UE en 2021. Sur le plan communautaire, elle vient de confier, dans son collège de commissaires, le portefeuille de la transition écologique à l’Espagnole Teresa Ribera, opposante connue au nucléaire avec pour mission d’appliquer le fameux pacte dont le but est de faire en sorte que l’Union européenne atteigne la neutralité climatique en 2050.

Le nucléaire et Ursula von der Leyen? Les premières réponses seront peut-être formulées au bord du Léman…

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