Nouvelle Commission européenne
Ursula von der Leyen, plus que jamais impératrice (allemande) de l'Europe

La présidente de la Commission européenne a présenté ce mardi 17 septembre la liste des 27 nouveaux commissaires qui composeront l'éxécutif communautaire. La Suisse gardera le même interlocuteur: le Slovaque Maros Sefcovic.
Publié: 17.09.2024 à 20:07 heures
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Dernière mise à jour: 17.09.2024 à 23:10 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

Elle a terrassé le seul qui osait la défier. Thierry Breton, 69 ans, l’ex-commissaire européen Français qui vient de claquer la porte, était en effet l’un des rares à s’être publiquement confronté à Ursula von der Leyen. Fort de son bilan depuis cinq ans (mutualisation des achats de vaccins, mise sur pied d’une nouvelle base pour l’industrie européenne de la défense, bras de fer avec les plates-formes numériques américaines), l’ancien ministre des Finances (2005-2007) croyait avoir fait passer son message avec succès.

Las. Emmanuel Macron l’a, ce week-end, lâché en rase campagne. C’est un autre Français, très proche du président, Stéphane Séjourné, qui sera vice-président de la Commission européenne chargé de la «prospérité» et du marché intérieur. A 65 ans, VDL, c’est son surnom en trois lettres, a gagné haut la main. Cette nouvelle Commission européenne sera plus que jamais la sienne, aux ordres de celle qui se comporte de plus en plus comme une «impératrice allemande» de l’Europe.

Gestion verticale

Pourquoi impératrice? Parce que tous les témoignages recueillis à Bruxelles ou dans les capitales des 27 États membres vont dans le même sens. Jamais la Commission européenne, le pouvoir exécutif de l’UE, n’a été gérée de façon aussi verticale. Toutes les affaires qui mettaient en cause VDL, en particulier autour des achats de vaccins anti-covid, ont été étouffées avec succès. Les 26 commissaires européens annoncés aujourd’hui, bien que nommés par leurs gouvernements, ne seront pas une équipe d’individualités.

Ursula von der Leyen est plus puissante que jamais pour son second mandat à la tête de la Commission européenne.
Photo: AFP
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C’est une «Mannschaft» VDL qui a été officialisée, dans laquelle les vice-présidents, supposés constituer son premier cercle, seront souvent surveillés par des commissaires plus anciens et plus compétents. C’est le cas du Français Stéphane Séjourné, 39 ans, supposé supervise les travaux du Letton Valdis Dombrovsky, vétéran des affaires économiques qu’il dirigeait dans la Commission sortante. Un seul nom, d’ailleurs, est sur toutes les lèvres: celui du chef de cabinet d’Ursula von der Leyen: l’Allemand Bjorn Seibert. Plus qu’un vizir, un passage obligé pour obtenir la moindre décision sur le moindre dossier.

Surveillance mutuelle

La présidente allemande de la Commission a tenu parole sur trois dossiers. Il y aura bien un Commissaire européen chargé de la Méditerranée, la croate Dubravka Šuica. Mais que pèsera-t-elle face au vice-président italien Raffaele Fitto, très proche de la Première ministre Giorgia Meloni? Il y aura aussi une commissaire chargée de l’Ukraine, la Slovène Marta Kos (ancienne ambassadrice de son pays à Berne). Mais quid de sa capacité à exister dans l’ombre d’une présidente qui s’est toujours profilé sur ce dossier très stratégique? Il y aura bien, enfin, un vice-président français de la Commission. Mais que vaut la défense des entreprises et du marché lorsqu’une autre personnalité, la portugaise Maria Albuquerque, aura en charge les services financiers?

La vérité est que la France a perdu. Perte de compétence, tant le commissaire sortant Thierry Breton avait réussi à mobiliser les efforts et à s’imposer comme un chef de file. Perte de poids politique, car Stéphane Séjourné, après un seul mandat au Parlement européen, et la présidence du groupe libéral-centriste Renew, n’a pas laissé sa marque. Perte personnelle enfin, car Emmanuel Macron, ce président qui avait initialement contribué à choisir Ursula von der Leyen, n’apparaît plus en mesure de contenir l’appétit de pouvoir de cette dernière, très proche de son parti conservateur allemand (la CDU, bien placée pour revenir au pouvoir à l’issue des législatives de septembre 2025) et très atlantiste, donc peu portée sur une souveraineté stratégique qui assumerait des désaccords avec les États-Unis.

La Suisse et Sefcovic

La Suisse, affairée à négocier le prochain paquet d’accords bilatéraux avec la Commission européenne, conservera le même interlocuteur: le slovaque Maros Sefcovic, désormais en charge des relations commerciales. Plutôt une bonne nouvelle, car ce portefeuille correspond à ce que Berne a toujours défendu: une approche pragmatique avant tout destinée à conforter les échanges économiques entre l’Union et la Confédération. Or sur ce point, l’impératrice Ursula von der Leyen a, jusque-là, démontré son accord et sa volonté d’avancer.

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