Contestations en Chine, enlisement en Ukraine
Vu d'Occident, les pouvoirs Russes et Chinois seront plus fragiles en 2023

Leur capacité à réprimer leur population et à faire taire les contestations demeure très forte. Mais si la guerre en Ukraine se poursuit sans issue, et que le monde s'enfonce dans la récession, Vladimir Poutine et Xi Jinping pourraient être les grands perdants en 2023.
Publié: 30.11.2022 à 06:20 heures
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Dernière mise à jour: 30.11.2022 à 09:00 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

C’est le pays que les dirigeants chinois et russe regardent aujourd’hui avec le plus d’inquiétude. Vu de Pékin et de Moscou, l’Iran montre un exemple que le pouvoir, en Russie et en Chine, redoute d’être obligé de suivre.

Une révolte dans les rues. Des foyers de contestation de plus en plus violents. Une jeunesse galvanisée par le fait qu’elle a perdu la confiance dans un avenir meilleur. Et pour y mettre fin, une seule solution: le recours à la force brutale. Avec la certitude de voir tout cela se terminer dans un bain de sang.

2023, le pire des scénarios

Voilà le pire des scénarios pour Xi Jinping et Vladimir Poutine: voir le pays leur échapper soudainement, par la conjonction des difficultés économiques, de l’épuisement social après deux ans marqués par la pandémie de Covid-19, et de révolte contre le verrouillage tous azimuts du pays. Or ce scénario pourrait bien être celui de 2023, en Russie comme en Chine.

Pacifiques ou violentes, les contestations du retour du confinement en Chine vont sans doute déclencher une nouvelle spirale de répression de la part du régime communiste. Mais en 2023, Xi Jinping pourrait se retrouver face à une jeunesse encore plus mécontente.
Photo: keystone-sda.ch

Imaginez une guerre en Ukraine qui se poursuit, sans autres résultats tangibles pour la puissante armée russe que des divisions entières de soldats massés dans les tranchées. Imaginez une reprise de l’épidémie de Covid-19 en Chine qui, malgré la censure, conduit la population à mettre ouvertement en doute le vaccin chinois.

Poids de la colère et des mensonges

Imaginez, enfin, les noms de deux dirigeants de plus en plus associés au malheur de leur peuple. Pour Xi Jinping, le poids du confinement et les mensonges sanitaires à répétition. Pour Vladimir Poutine, le poids de la colère des mères qui voient revenir les cercueils de leurs garçons, broyés par cette interminable «opération spéciale» à l’est de l’Ukraine.

L’année 2022 a peut-être été celle de l’apogée de leur puissance. Les deux dictateurs russe et chinois ont, quelques semaines durant, cru que l’Occident ne leur résisterait pas. Mais si, à l’approche de 2023, la peur changeait de camp?

Retrouvez Richard Werly sur l’Iran dans Le Nouvel Esprit Public

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Cette peur susceptible de tout faire basculer a la forme d’une fissure. En Chine, où les étudiants sont à la pointe des manifestations anti-confinement, cette fissure est générationnelle et urbaine. Elle fracture les grandes villes, ces immenses métropoles, vitrines de la modernité chinoise. C’est là, à Shanghai ou Pékin, que le retour au confinement est jugé insupportable. Bien sûr, la police peut imposer un verrouillage de force. Les étudiants contestataires peuvent être, en quelques jours, jetés en prison ou envoyés en camp de travail.

Restent les images. Reste la colère. Reste le défi. Le nom de Xi Jinping, nouveau grand Timonier, a été hué pile un mois après la fin du 20e congrès du Parti communiste chinois. La preuve est faite que le peuple chinois, aussi soumis soit-il, n’est pas dupe de ce qui se passe dans le complexe de Zhongnanhai à Pékin, le cœur nucléaire du pouvoir où vivent et travaillent les maîtres de l’Empire du milieu.

La blessure russe

Cette fissure est plus visible encore en Russie. Elle a la forme d’une blessure, comme celles ramenées par les soldats revenus du front. L’entourage de Vladimir Poutine est-il encore soudé autour du maître du Kremlin? Rien n’est moins sûr. Celui-ci a besoin d’une victoire militaire, d’un affichage incontestable.

Or en 2023, tout lui coûtera plus cher. Son gaz se vendra moins, pour cause d’embargo occidental. Ses importations lui coûteront plus cher, pour cause de sanctions internationales. Son appareil économique, d’abord résilient, se sclérosera, faute de pièces détachées. Le premier anniversaire du déclenchement de la guerre, le 24 février 2023, pourrait bien être un anniversaire tragique pour celui qui rêve d’être un nouveau Tsar, dont le nom restera accolé au retour d’une «grande Russie».

L’année 2023 peut évidemment être aussi celle de tous les dangers pour les Occidentaux et leurs alliés. Elle est d’ailleurs programmée pour l’être, personne ne le conteste. Danger économique majeur, si l’inflation explose et que la récession déferle comme un tsunami. Danger social, lorsque les populations confrontées au froid réclameront du chauffage en urgence, et exigeront pour cela l’arrêt des hostilités en Ukraine. Danger politique, si les sociétés s’embrasent, chauffées à blanc par les protestations anti-immigration. Danger géopolitique, avec des États-Unis bien mieux placés pour tirer les bénéfices industriels et énergétiques de la guerre en Ukraine que leurs alliés Européens.

Pas d’alternative pour Xi Jinping et Vladimir Poutine

Le risque ne vaut donc pas seulement pour Xi Jinping et Vladimir Poutine. L’an 2023 va ébranler toute la planète. Sauf que les dirigeants russe et chinois, eux, n’ont pas d’alternative. Ils sont les cibles. Ils ne peuvent pas ouvrir les vannes. Ils doivent maintenir fermé le couvercle de leurs régimes.

L’année 2023 sera, à coup sûr, remplie de turbulences et d’ébullitions majeures. Or la Russie comme la Chine, énormes cocottes-minute, sont en train de prouver qu’elles manquent de soupapes pour faire retomber la pression.


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