Diplomate à vélo
Roberto Balzaretti, l'ambassadeur suisse sur deux roues

L'ambassadeur de Suisse à Paris a entrepris un Tour de France à vélo très diplomatique. Objectif à chaque étape: expliquer la Confédération helvétique à ses interlocuteurs hors des sentiers battus. Un Tour de France pas seulement cycliste.
Publié: 01.07.2022 à 15:38 heures
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Richard WerlyJournaliste Blick

Il roule pour la Suisse. Sur deux roues. Par étapes. Mais sans avoir à se battre pour le maillot jaune. Alors que les coureurs du Tour de France cycliste s’élancent ce 1er juillet à l’assaut des routes hexagonales depuis… Copenhague, la lointaine capitale du Danemark, l’ambassadeur de Suisse en France, Roberto Balzaretti, 57 ans, prépare ses prochains kilomètres de bitume qui le mèneront, du 4 au 8 juillet, de Grenoble en Arles.

Une véritable étape pour un vrai coureur: le diplomate tessinois, bien connu à Berne pour avoir été le chef négociateur du défunt projet d’accord institutionnel entre la Confédération et l’Union européenne, est un fan de vélo. La preuve: le 7 juillet, il s’attaquera aux pentes du Mont Ventoux!

Rouler pour la Suisse

Rouler pour la Confédération est sa mission diplomatique de tous les jours. Pourquoi avoir, alors, décidé de quitter l’hôtel de Bézenval, la superbe résidence des ambassadeurs helvétiques à Paris, près des Invalides, pour les routes des provinces françaises? «J’aime l’idée du contrepied. Ce n’est pas là que l’on attend, spontanément, un ambassadeur de Suisse. Et pourtant, le vélo est une excellente introduction. Tout de suite, le fait de parcourir le pays à deux roues nous met au niveau des gens. On a immédiatement un sujet en commun», raconte-t-il à Blick, à quelques jours de son départ pour les contreforts des Alpes.

L'ambassadeur de Suisse à Paris, Roberto Balzaretti (à droite), parcourt la France à vélo, au plus près de la population.
Photo: DR
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Roberto Balzaretti, cycliste accompli dans le privé, ne mélange toutefois pas les genres. Il l’avoue avec humilité. Son vélo est électrique. Son coup de pédale est facilité. Ses étapes d’environ deux cents kilomètres chacune sont entrecoupées d’arrêts et de portions faites en voiture, car un véhicule balisé «En route avec la Suisse» le suit de près. Pédaler, c’est communiquer. «Je pars à la rencontre des Suisses de France, des entreprises françaises, et de tous ceux que notre pays intéresse, poursuit-il. Je ne recherche pas l’exploit sportif.»

Un Tour de France «qualité suisse»

Avouons-le: on s’en doutait un peu. Bonne pioche en tout cas que ce Tour de France «qualité suisse», en cette année où la compétition officielle fera un détour par les routes confédérées, lors de sa huitième étape, de Dole à Lausanne. Mieux: le lendemain, le 9 juillet, la première étape de montagne partira d’Aigle (VD), là même où Roberto Balzaretti a entamé son propre périple à la fin mars. Bien joué.

Profiter d’un événement sportif phare, et l’intérêt des Suisses pour le vélo, pour valoriser une mission diplomatique toujours menacée par l’éloignement des réalités concrètes. «Expliquer, communiquer, mais aussi surprendre pour mieux convaincre: n’est-ce pas là la base du métier d’ambassadeur», nous interrogeait-il jeudi 30 juin au téléphone, à quelques heures de la traditionnelle fête suisse annuelle qui, pour des raisons de vacances d’été, ne se tient pas le 1er août du côté de Paris. «Je découvre que les Français aiment et connaissent assez bien la Suisse. L’avantage du vélo, c’est qu’il permet de raconter de belles histoires. Certains maires ou autres élus locaux proposent parfois de m’accompagner. Je fais des haltes dans les écoles, les universités… On mesure mieux, à deux roues, l’impact de nos politiques et la proximité de nos relations.»

Deux ans pour pédaler à travers la France

Les vacanciers helvétiques de juillet-août en France ne croiseront pas obligatoirement leur ambassadeur en train de pédaler. Après l’étape de la semaine prochaine qui le mènera en Arles, où une journée suisse aura lieu le 5 juillet dans le cadre des rencontres annuelles de la photographie, Roberto Balzaretti attendra la rentrée pour repartir à l’assaut des départements français.

Prochaines étapes pour 2022: Strasbourg-Bâle, Marseille-Monaco en novembre (l’ambassadeur est également accrédité pour la Principauté) puis La Rochelle-Lorient, sur la façade atlantique. En 2023, son vélo pourra être aperçu du côté d’Angers, du Havre et de Lille. Avantage: l’éloignement de Paris rapproche. «L’étape Bordeaux-Pau, bien loin de la Suisse en Nouvelle-Aquitaine, m’a montré que la Confédération irrigue partout. Les entreprises suisses sont présentes sur l’ensemble du territoire français. Les Suisses (ndlr: ils sont près de 200'000 en France, première communauté helvétique à l’étranger) aussi», complète l’ambassadeur.

Invitation à Ignazio Cassis

Et le maillot jaune? Si celui du vrai Tour de France tombera peut-être sur les épaules d’un des coureurs suisses en lice (Marc Hirschi, Stefan Bissegger, Stefan Küng et Silvan Dillier), quid de celui de la diplomatie? On imagine déjà les questions de ses collègues auxquelles devra répondre Roberto Balzaretti lors de la prochaine conférence des ambassadeurs suisses au mois d’août. Le vélo est-il plus agréable que ses négociations passées à Bruxelles? «J’imagine que certains m’interrogeront. Je répondrai que j’avais le choix: j’aurais pu parcourir la France en train, à pied, à cheval. Le tour de France à vélo, sur une période de deux ans, avait plus d’avantages. Cela me permet d’être dans la réalité des relations bilatérales.»

Avis à un autre Tessinois, le président de la Confédération et chef du Département fédéral des affaires étrangères, Ignazio Cassis: pensez à prendre votre vélo, lors de votre prochain passage en France. Avec ou sans maillot jaune!

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