Synthèse du 6e jour d'invasion
Les Russes poursuivent les frappes sur des villes ukrainiennes

Les forces russes continuent de bombarder les villes ukrainiennes: la tour TV de Kiev a notamment été touchée. Les sanctions contre la Russie se font toujours plus nombreuses.
Publié: 02.03.2022 à 00:30 heures

Les forces russes ont frappé mardi la tour de télévision de Kiev et Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine, confirmant l'intensification de leur offensive, mais le Pentagone jugeait leur progression vers la capitale «au point mort», entravée par la résistance rencontrée et des problèmes logistiques.

Parallèlement, la pression internationale sur le Kremlin ne faiblissait pas. La Cour internationale de justice (CIJ), plus haute instante judiciaire des Nations unies, annonçait ainsi des audiences les 7 et 8 mars dans une affaire portée devant elle par le gouvernement ukrainien, qui accuse Moscou de planifier un génocide.

Les 27 Etats membres de l'Union européenne ont donné leur feu vert à l'exclusion de «certaines banques russes» du système de messagerie Swift, rouage clé de la finance internationale, et à l'interdiction de la diffusion des médias d'Etat russes RT et Sputnik.

Les bombardements des villes ukrainiennes ont continués durant la journée.
Photo: keystone-sda.ch

Conséquence des sanctions, une procédure de dépôt de bilan va être ouverte concernant la principale filiale en Europe de la plus grande banque russe, Sberbank, a annoncé mardi soir le régulateur bancaire de l'UE.

Villes bombardées

Au sixième jour de l'invasion russe, les bombardements se sont succédé sur Kharkiv, ville de 1,4 million d'habitants proche de la frontière avec la Russie, dont les assaillants essaient de s'emparer. Sur sa place centrale, le siège de l'administration régionale a été en partie détruit, a déclaré le gouverneur Oleg Sinegoubov. Au moins 10 personnes ont été tuées et plus de 20 blessées, tandis que huit autres ont péri quand un immeuble d'habitation a été touché.

Le Premier ministre britannique Boris Johnson a comparé ces frappes aux bombardements meurtriers sur Sarajevo, en Bosnie, dans les années 1990.

Dans la capitale ukrainienne, cinq personnes sont mortes et cinq autres ont été blessées lorsque la tour de télévision a été prise pour cible en fin d'après-midi. Une heure après l'attaque, la plupart des chaînes ukrainiennes semblaient à nouveau fonctionner normalement.

Dans la soirée, de nouvelles explosions ont retenti à Kiev et à Bila Tserkva. Pour sa part, la ville de Jitomir (nord-ouest) a été visée par une frappe aérienne qui a fait deux morts et trois blessés et gravement endommagé 10 immeubles résidentiels, selon les secours ukrainiens.

Un peu plus tôt, l'armée russe avait appelé les civils vivant près d'infrastructures des services de sécurité à évacuer, disant vouloir s'en prendre à elles pour faire cesser «les attaques informatiques contre la Russie».

Changement de tactique?

Le futur assaut russe sur Kiev fait redouter un nombre considérable de victimes dans cette métropole comptant, en temps normal, près de trois millions d'habitants et dotée d'un riche patrimoine historique.

Des photos rendues publiques dans la nuit de lundi à mardi par la société américaine d'imagerie satellitaire Maxar montraient à cet égard un convoi russe s'étirant sur des dizaines de kilomètres et se dirigeant vers la capitale.

Les habitants restants se préparent depuis des jours, érigeant des barricades, creusant des tranchées et confectionnant des cocktails Molotov. Mais pour le ministère américain de la Défense, la situation n'est pas si évidente.

«Nous avons le sentiment général que le mouvement de l'armée russe (...) vers Kiev est au point mort à ce stade», a déclaré un de ses responsables. «Nous pensons que c'est lié en partie à son propre approvisionnement et à des soucis logistiques» et que, «plus globalement», «les Russes sont en train de faire le point pour repenser» leur stratégie.

Sanctions en cascades

«Nous devons arrêter l'agresseur au plus vite», a tweeté le président ukrainien Volodymyr Zelensky après avoir discuté avec son homologue américain Joe Biden.

Dans ce contexte, une réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères des Etats membres de l'OTAN a été convoquée en «présentiel» pour vendredi à Bruxelles, cependant que leurs collègues des Finances du G7 ont discuté mardi de sanctions supplémentaires contre l'économie russe, déjà sous le coup d'une série de mesures d'une ampleur historique.

Quatre des cinq principaux armateurs mondiaux ont cessé de desservir les ports de Russie, tandis que l'opérateur du gazoduc germano-russe Nord Stream 2, dont le siège est en Suisse, a déposé le bilan. Le géant pétrolier italien Eni compte lui se retirer d'un gazoduc reliant la Russie à la Turquie.

Apple a également indiqué avoir suspendu la vente de tous ses produits en Russie, emboîtant le pas à de nombreuses entreprises choisissant de prendre leurs distances avec Moscou.

Le gouvernement russe, qui s'évertue à contrer ces sanctions, préparait quant à lui mardi un nouveau décret pour enrayer la fuite des investisseurs étrangers. Dans le même temps, il faisait bloquer l'accès à une chaîne de télévision en ligne et à une station de radio indépendantes de renom, Dojd et Echo de Moscou, dans le cadre d'un renforcement du contrôle sur l'information.

Conséquence de ces tensions, les Bourses européennes et Wall Street ont terminé en forte baisse. Les prix du pétrole continuaient parallèlement de monter, avant la réunion mercredi de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et de ses alliés (Opep+). Idem pour les cours du blé et du maïs, à un niveau record en Europe.

Les Russes interdits de Mondial

Outre les sanctions économiques, auxquelles s'ajoutent les manifestations de solidarité avec l'Ukraine dans de nombreux pays, la Russie est désormais écartée d'une multitude d'événements culturels et sportifs, du Mondial de football 2022 aux épreuves de cyclisme et à la Coupe Davis de tennis.

Même la Chine, qui n'a jusqu'ici pas condamné l'invasion russe, a exprimé mardi «son profond regret» face au conflit.

Vladimir Poutine semblait malgré tout décidé à poursuivre l'offensive et à mettre fin aux aspirations d'appartenance à l'UE et à l'Otan de l'Ukraine, une ex-république soviétique.

Dans un échange lundi avec le président français Emmanuel Macron, il a posé comme conditions, pour arrêter l'invasion, la reconnaissance de la Crimée en tant que territoire russe, la démilitarisation et la «dénazification» de l'Ukraine. Il avait précédemment qualifié ses dirigeants de «néonazis».

Et ce alors que se déroulaient de premiers pourparlers russo-ukrainiens, qui se sont achevés sur l'unique engagement qu'ils reprendraient «bientôt».

Des centaines de milliers de réfugiés

Depuis le début de l'invasion russe le 24 février, un million de personnes ont été déplacées en Ukraine même et plus de 677'000 sont parties vers les pays voisins, selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés.

La Banque mondiale a annoncé qu'elle préparait une aide d'urgence de trois milliards de dollars pour l'Ukraine, dont au moins 350 millions pourraient être débloqués dès cette semaine.

De longues files de voitures continuaient à se diriger vers la frontière polonaise, à partir de Lviv, la grande ville de l'ouest de l'Ukraine devenue une porte de sortie et un centre de repli pour les Ukrainiens comme pour les ambassades occidentales.

Des femmes réfugiées dans cette cité, laissant les hommes de leur famille «défendre l'Ukraine», se mobilisaient pour les soutenir, donnant leur sang ou confectionnant des filets de camouflage.

(AFP)

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