Jamais mieux servi que par soi-même #30
Ski [n.m.]: sport alpin qui consiste à monter… pour redescendre

Le journaliste Malick Reinhard pointe docilement du doigt la maladresse des «valides» face au handicap. Cette semaine, pour la nouvelle année, il s’intéresse au méconnu handiski, qu’il pratique chaque année.
Publié: 01.01.2022 à 15:32 heures
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Dernière mise à jour: 08.02.2022 à 17:44 heures
Malick Reinhard

Mais, alors! Bonne année! Certains vous souhaiteront la santé (on en a bien besoin), d’autres le succès (Eric Zemmour en tête?), et puis les autres vous crieront qu’ils vous envoient «le meilleur» (on ne sait pas trop ce que c’est) pour la nouvelle année.

J’aurais pu vous l’infliger, mais, comme je n’aime pas trop le conformisme, je me suis dit qu’il serait préférable de vous faire bouffer de la neige. Une bonne tonne de neige. Rien de personnel, toutefois. Ni d’hostile. Juste une manière de fêter l’an nouveau dans la poudre. Vous savez, celle qui est en train de fondre et inquiète les responsables de stations. Non, pas celle qui s’est répandue sur les tables basses peu avant minuit, tout à l’heure. Hier.

Amen la glisse

Il est une tradition que mes ascendants mènent depuis des lustres: celle d’aller skier le 1er janvier. Tradition on ne peut plus alpine. On ne peut plus chère. On ne peut plus compromise quand le nouveau-né de la famille est incapable de se mouvoir. «Cloué dans un fauteuil», disent les bonnes gens. Comment peut-il alors espérer dévaler les pistes – et ainsi éviter d'envoyer au casse-pipe la tradition familiale?

Sans doute avec l’aide du handiski. Sport adapté, méconnu, qui permet, depuis un peu plus de vingt ans, aux personnes en situation de handicap, quel qu’il soit, de bouffer de la neige, à égalité avec les autres. Et tout a commencé dans le canton de Neuchâtel. Dieu, pour une fois, n’y est pas pour rien, puisque c’est grâce à lui que Claude-Alain Hofer découvre le handicap, au travers d’une activité catéchétique organisée par sa paroisse.

Vingt-deux ans plus tard, l’installateur sanitaire de formation est à la tête d’Handiconcept. Une association créée spécialement pour permettre aux personnes âgées ou en situation de handicap de pratiquer le ski. À Villars, dans le canton de Vaud, siège social de l’organisation, on se dit carrément précurseur helvétique en la matière.

Garantir un maximum d’autonomie

En 1999, au moment où Claude-Alain Hofer souhaite accompagner des personnes en situation de handicap sur les pistes, ici, en Suisse, rien n’existe. Il se rend alors en France, pays qui s’intéresse déjà à la pratique de ce sport adapté. C’est d’ailleurs, toujours aujourd’hui, une entreprise de l’Hexagone qui produit le matériel adapté aux descentes enneigées.

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Si je vous dis Tandemski, Dualski, Uniski, hormis une vague racine latine qui vous mettra peut-être sur la voie, vous serez relativement pris au dépourvu. Et ne vous inquiétez pas, c’est bien normal: «Nous rencontrons tous types de handicap dans nos activités, prévient Claude-Alain Hofer. Il est donc important de développer des appareils qui garantissent un maximum d’autonomie à ses utilisateurs. Il a donc fallu en inventer plusieurs.»

Ainsi, le Tandemski s’adapte davantage à une population âgée ou lourdement handicapée physiquement. Le Dualski, lui, satisfera une population un tantinet plus «mobile» – atteinte de paraplégie, par exemple – et, enfin, l’Uniski est spécialement conçu pour celles et ceux qui, malgré leur déficience, ont la possibilité de skier par leur propre moyen. Le fondateur d’Handiconcept prévient encore que d’autres techniques d’accompagnement existent pour les handicaps cognitifs, sensoriels ou simplement invisibles.

Une formation de pilotage et d’accompagnement

Mais alors, comment est-ce que l’on fait pour accompagner une personne qui nécessite l’un de ces appareils? Pour Claude-Alain Hofer, qui a développé l’unique formation suisse reconnue pour l’accompagnement en handiski, «il faut être d’abord bon skieur, être connu dans la station de travail et, principalement, avoir de la patience et de l’écoute. Ensuite, chaque moniteur suit une instruction de sept jours, dont plusieurs de pratique, pour savoir piloter les appareils et accompagner les personnes. Avant d’autres sessions de «recyclage» que les moniteurs suivent régulièrement, afin de rester à niveau». Toutes et tous seront rémunérés pour leurs heures d’accompagnement. Aujourd'hui, le Vaudois d’adoption se félicite de pouvoir accueillir 250 bénéficiaires chaque année, grâce à l’investissement de ses douze monitrices et moniteurs.

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On se connaît depuis quasi quinze ans avec Claude-Alain. Celui-ci, avec le concours de huit autres associations spécialisée en Suisse romande, m’a permis d’accéder au ski. Et, ainsi, de ne pas rompre LA tradition familiale. Parce que, franchement, on a déjà connu pire comme tradition. L’été, c’est en parapente et en FTT (pour Fauteuil Tout-Terrain) que je retrouve mes camarades des Préalpes vaudoises. En attendant, je retourne bouffer un peu neige… compromise, certes, par les conditions météo de cette fin de semaine. Allez, salut! –– Quand te reverrais-jeee? Pays merveilleeeuuux!

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