La chronique de Mauro Poggia
Rendez-vous au pigeonnier!

Le conseiller aux États genevois Mario Poggia, membre de notre équipe de chroniqueurs, revient cette semaine sur les petits frais grattés ici et là par les prestataires, opérateurs, banquiers ou assureurs.
Publié: 03.05.2024 à 11:19 heures
Mauro Poggia, conseiller aux États MCG

Vous avez sans doute reçu comme moi ces derniers temps des courriers culpabilisants, doublés de courriels incitatifs, parfois même triplés d’appels téléphoniques miéleux.

Nos prestataires et fournisseurs, banquiers, assureurs et sociétés de téléphonie en tête, au nom d’une démarche écologique que chacun peut comprendre, et que je peux partager personnellement, nous expliquent qu’il faut réduire l’émission de papier et qu’il est préférable, car écoresponsable, de recevoir désormais décomptes, informations et factures en ligne. On nous explique même que c’est tellement plus pratique…de les imprimer soi-même, lorsque c’est vraiment nécessaire.

Marges et bonne conscience

Ma mère de 98 ans, habituée depuis toujours à recevoir ses factures dans sa boîte aux lettres, et ne souhaitant pudiquement pas déranger ses proches, n’a pas répondu favorablement à la demande qui lui a été adressée par le câblo-opérateur de la Ville de Genève, commune dont la sensibilité écologique est devenue mythique.

Les opérateurs, fournisseurs ou encore les assureurs n'hésitent pas à ajouter des petits frais ici et là pour leurs prestations. Cela ne plaît pas à notre chroniqueur, Mauro Poggia.
Photo: picture alliance / dpa Themendienst

La punition n’a pas tardé à tomber; la facture suivante fut majorée de 4 francs pour tenir compte du travail «supplémentaire» engendré.

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«L'argument écologique n'est qu'un prétexte!»
»

Que l’on m’explique: jusqu’à maintenant, ce travail, que l’on va certainement bientôt majorer à une thune pour faire chiffre rond (quand on aime ses clients on ne compte pas), était jusqu’ici intégré dans la facture mensuelle. Ce seraient donc les abonnés qui soulagent l’opérateur de ce travail fastidieux qui devraient être récompensés par une baisse équivalente, et non pas inversement ceux qui optent pour le statu quo qui devraient être pénalisés.

L’argument écologique n’est donc qu’un prétexte pour augmenter les marges sous le sceau de la bonne conscience collective.

Des grenouilles dans la casserole

Et tout cela se fait sournoisement, au point que les «grenouilles dans la casserole» que nous sommes devenus, de guerre lasse, acceptent sans sourciller.

Ainsi va le monde, se dit-on. Nous nous substituons gracieusement au personnel des supermarchés en scannant nous-mêmes nos achats, sans doute reconnaissants que l’on veuille bien nous les vendre, sans même obtenir une quelconque compensation. Vous verrez que demain, si vous continuez, par solidarité, ou l’âge avançant, à mettre vos achats sur le tapis roulant, on majorera le ticket pour vous accorder l’insigne honneur de recevoir votre argent comptant. Rendez-vous au pigeonnier!

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