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L'impôt fédéral pourrait coûter plus cher pour financer la 13e rente des aînés

Le financement de la 13e rente AVS reste controversé. Opposée à l'augmentation de la TVA, ainsi qu'à un relèvement de l'âge de la retraite, Elisabeth Baume-Schneider envisage en revanche... un impôt fédéral plus élevé!
Publié: 01.07.2024 à 16:11 heures
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Ruedi Studer

C'est un projet de plusieurs milliards que la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider (EBS) doit mettre en œuvre: la 13e rente AVS sera versée à partir de 2026 – et pour cela, elle doit trouver 4 à 5 milliards de francs. Et ce, chaque année. La magistrate socialiste se concentre sur un financement par des prélèvements supplémentaires sur les salaires, éventuellement combinés à une augmentation de la TVA. Les partis ont encore jusqu'au 5 juillet pour se prononcer sur les deux variantes.

Il pourrait même y avoir une troisième variante, elle aussi basée sur la TVA. Dans ce cas, l'impôt sur la consommation aurait pu être augmenté d'un point de pourcentage, pour des recettes estimées à environ quatre milliards de francs, d'après des documents internes de l'administration consultés par Blick.

Baume-Schneider contre une pure variante de TVA

La perspective d'une augmentation de la TVA n'a toutefois pas convaincu EBS. L'option semble en effet moins justifiée en ce qui concerne le financement de la 13e rente AVS, puisque l'initiative vise au contraire à lutter contre la perte de pouvoir d'achat des retraités. Car un impôt plus élevé sur la consommation entraînerait une hausse des prix et une perte de pouvoir d'achat, en particulier pour les personnes à faible revenu.

A partir de 2026, les seniors pourront espérer toucher une 13e rente AVS.
Photo: imago/Westend61
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Mais pour des raisons démographiques, une nouvelle augmentation de la TVA en faveur de l'AVS pourrait malgré tout s'avérer nécessaire lors de la prochaine réforme de l'AVS. D'autant que certains acteurs économiques souhaitent une augmentation. Lors de la consultation interne à l'administration, le Secrétariat d'Etat à l'économie de Guy Parmelin a fait pression pour que cette augmentation soit intégrée au projet mis en consultation. Le département du ministre de la Justice socialiste Beat Jans souhaitait, lui, une variante uniquement basée sur un pourcentage du salaire: «Cela correspond à un financement solidaire des coûts supplémentaires», a justifié son secrétariat général.

Le DFAE veut repousser l'âge de départ à la retraite

Le département des Affaires étrangères d'Ignazio Cassis a quant à lui insisté sur une solution mixte, combinant des recettes supplémentaires et un relèvement de l'âge de la retraite. Le peuple «ne s'est pas prononcé en soi contre un relèvement de l'âge de la retraite», a insisté le DFAE.

Une proposition rejetée par EBS. Pour financer les coûts de la 13e rente AVS, l'âge de la retraite «devrait être relevé de 2 ans, voire de 2,5 ans pour tous et en une seule fois». Et compte tenu du net refus de l'initiative par les jeunes libéraux-radicaux, un relèvement est actuellement «irréaliste» et mettrait en péril l'ensemble du projet de financement.

Autre option: un impôt fédéral plus élevé

La contribution fédérale à l'AVS est l'autre difficulté du projet. Actuellement, la Confédération prend en charge 20,2% des dépenses annuelles de l'AVS. La Confédération doit injecter chaque année près d'un milliard de francs supplémentaires dans la caisse de l'AVS.

Or ce petit milliard, c'est beaucoup trop pour le Conseil fédéral, dont la participation doit être réduite à 18,7% jusqu'à l'entrée en vigueur de la prochaine réforme de l'AVS. Le Conseil fédéral propose donc prélever ce milliard sur le fonds AVS ou de le financer par une solution de pourcentage salarial/TVA.

Mais EBS a aussi évoqué une autre piste: le fonds AVS devrait certes supporter le milliard supplémentaire pendant une phase transitoire. Mais pendant cette période, il faudrait trouver une alternative de financement à la contribution fédérale, de préférence via... une augmentation de l'impôt fédéral direct. «Cette source aurait l'avantage de moins peser sur les budgets des bas revenus, puisque les 50% des revenus les plus bas n'y contribuent pratiquement pas, alors que les 5% des revenus les plus élevés génèrent les deux tiers des recettes», indique le document interne consulté par Blick.

Une mesure soutenue par Beat Jans, mais pas par le SECO. Elisabeth Baume-Schneider n'a pas non plus réussi à convaincre les partis bourgeois du Conseil fédéral. Toutefois, la perspective d'un impôt fédéral plus élevé n'est pas pour autant complètement abandonnée. En vue de la prochaine réforme de l'AVS, qui devrait entrer en vigueur à partir de 2030, EBS cherche de nouvelles sources de revenus. Outre l'impôt fédéral direct, une taxe sur les transactions financières ou un impôt sur les successions sont par exemple à l'étude: «Ces options peuvent être examinées dans le cadre de la prochaine réforme de l'AVS.»

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