Faune, énergie, agriculture…
Voici à qui les hivers doux profitent - et à qui ils nuisent

La douceur hivernale de ce début d'année met la nature à rude épreuve. Mais il y a aussi des domaines pour lesquels cette chaleur représente un avantage. Explications.
Publié: 03.01.2023 à 19:08 heures
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Dernière mise à jour: 03.01.2023 à 19:10 heures
Lea Hartmann

Il n’y a pas que les pistes et stations de ski que les hivers chauds mettent en danger. La faune suisse est particulièrement concernée par la douceur de la saison.

Prenez le lièvre blanc, par exemple. Si ce dernier peut habituellement compter sur la neige pour camoufler sa fourrure immaculée, lorsque la température est trop élevée pour assurer un manteau blanc en plaine, il devient une cible bien plus évidente pour ses prédateurs.

Il ne s’agit là que d’un exemple parmi tant d’autres des conséquences des températures douces en plein hiver, comme celles que nous connaissons actuellement.

Un hiver doux peut être dangereux pour les abeilles. Elles peuvent manquer de miel en fin de saison.
Photo: imago images/Frank Sorge
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Un thermomètre dépassant la vingtaine de degrés dans certains endroits de Suisse en début d’année a également des répercussions sur la nature, l’agriculture et l’approvisionnement en énergie. En positif comme en négatif.

Danger pour les arbres fruitiers

«Ce sont les arbres fruitiers qui nous inquiètent le plus», lâche Markus Ritter, conseiller national du Centre et président de l’Union suisse des paysans (USP). Si la chaleur continue de durer, il y a un risque que les arbres bourgeonnent en avance. «Si l’hiver revient ensuite, les cultures peuvent subir de gros dégâts», explique le politicien paysan.

À l’inverse, un hiver doux peut aussi entraîner une floraison trop tardive des arbres. «Certaines plantes ont besoin d’un certain nombre de jours froids en hiver pour que leur horloge biologique fonctionne correctement», détaille Pierluigi Calanca, chercheur à Agroscope. Les pommiers, les poiriers, les cerisiers et les vignes seraient concernés.

Le froid et la neige sont en outre importants pour les sols. Au Tessin, on a pu constater l’année dernière qu’un hiver sec pouvait aggraver la sécheresse estivale, ajoute l’expert. Les réserves d’eau viennent à manquer lorsqu’il n’y a pas ou peu de neige qui fond au printemps.

Les abeilles risquent de manquer de miel

Pour les abeilles, la chaleur hivernale est également dangereuse. «S’il fait chaud longtemps, elles vont se mettre en activité. Mais comme il n’y a pas encore beaucoup de fleurs qui fleurissent, elles doivent se nourrir de leurs réserves de miel», alerte Pierluigi Calanca. En cas de nouvelle vague de froid, elles pourraient soudainement manquer de nourriture.

D’autres insectes se sont aussi mis en mouvement plus vite que prévu, comme les moustiques. «Les chauves-souris qui hibernent dans les cavités des arbres peuvent sortir de leur hibernation à cause de la chaleur, surenchérit Urs Tester, de Pro Natura. Elles doivent chercher un endroit plus frais pour dormir. Cela leur coûte de l’énergie et éventuellement la vie.»

Les gagnants de cette chaleur, en revanche, se trouvent du côté du bétail qui peut profiter des températures plus élevées. «L’année dernière, j’ai pu garder les vaches dehors presque jusqu’à fin novembre parce que l’herbe poussait encore», se rappelle Markus Ritter.

Les prix de l’électricité ont nettement baissé

La douceur de l’hiver est également positive du point de vue de la sécurité d’approvisionnement en énergie. Il faut moins chauffer, les réservoirs d’eau en Suisse et les réservoirs de gaz européens peuvent être préservés. «Nous dépendons de cette énergie en février, mars et avril, lorsque les pénuries sont les plus probables», explique Julien Duc, de l’Association des entreprises électriques suisses (AES).

Alors qu’un mégawattheure d’électricité coûtait encore 413 francs au début du mois, il se négociait à la fin du mois à 265 francs, pointe Julien Duc. Dans certaines régions et à certaines heures, les prix au comptant de l’électricité sont même devenus négatifs, indique le groupe énergétique Axpo. En d’autres termes, ceux qui voulaient de l’électricité n’avaient pas à payer, mais recevaient de l’argent en échange.

Il faut continuer d’économiser l’énergie

«Parmi les raisons principales de cette situation, il y a le temps très doux et en même temps souvent relativement venteux», analyse l’expert d’Axpo Andy Sommer. Cela a eu pour conséquence que l’on n’a eu besoin que de peu d’énergie provenant du charbon et du gaz. Cela réduit quelque peu le besoin d’achat supplémentaire pendant les mois d’été.

Pour l’instant, les clients finaux ne profitent pas des prix plus avantageux, car les tarifs sont déjà fixés en été pour l’année suivante. Pour l’AES, la situation actuelle ne signifie pas non plus que l’on peut désormais arrêter d'économiser de l’énergie. Son porte-parole prévient: «Une détente temporaire n’est pas une fin d’alerte.»

Il vaut toujours la peine d’économiser. En effet, une situation de pénurie d’énergie cet hiver est «toujours possible» si un «enchaînement malheureux» de facteurs, sur lesquels la Suisse n’a aucune influence, devait se produire.

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