Inondations à Cressier
La solidarité renaît sur les gravats de l'apocalypse

Mardi soir, les orages ont dévasté le village neuchâtelois de Cressier. Sans se laisser abattre, les habitants s'organisent pour nettoyer les rues et pour faire face aux nouveaux orages annoncés, entre couvre-feu et évacuations.
Publié: 23.06.2021 à 18:19 heures
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Dernière mise à jour: 28.06.2021 à 16:13 heures
Photo: Darren Vanselow
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Amit JuillardJournaliste Blick

Il fallait contourner quelques interdictions de circuler pour atteindre Cressier (NE), ce mercredi après-midi. Dans le village, il faut toujours contourner, mais des chaînes humaines cette fois. Parfois aider à faire voyager un seau boueux, plein d’eau et de débris, de la main d’un enfant à celle d’une femme. Au loin, des pelles mécaniques imitent les humains. Parmi les gravats, une grosse boule en pierre dépasse. «C’est le haut de la chèvre de la fontaine», nous souffle-t-on. Un peu plus bas, on pose le pied sur une berline noire ensevelie, pour circuler.

Le haut de la chèvre d'une fontaine dépasse au milieu des gravats.
Photo: Darrin Vanselow

Le jour d’avant, l’apocalypse commence par un «bang». Un bruit. Comme un tremblement de terre. Ce mardi 22 juin, à Cressier (NE), la nuit tombe en même temps qu’une pluie torrentielle. Le Ruhaut, petit ruisseau, sort de son lit. La maison de Yann et Laetitia Berger est en première ligne. Ce mercredi 23 juin, ça se voit: les bénévoles fourmillent dans la maison, les mains pleines d’objets ménagers, le front plein de sueur. On écope. On débarrasse. La villa vomit ses meubles dans le jardin. À paysage désolé, solidarité retrouvée.

Des bénévoles sont venus en aide à Yann et Laetitia Berger.
Photo: Darrin Vanselow

«Nous nous sommes réfugiés au galetas»

Au mur, un grand tableau et une ligne de démarcation. La boue est montée haut la veille: 1,4 mètre, peut-être. La cave est remplie de terre. Inaccessible.

Une ligne de démarcation sur les murs de la maison des Berger montre jusqu'où la boue est montée.
Photo: Darrin Vanselow

«Nous étions en bas avec mon épouse et ma première fille, raconte Yann Berger, sur sa pelouse. Quand nous avons vu l’eau monter, nous sommes allés chercher notre deuxième fille de six mois et nous sommes réfugiés au galetas. Nous avons appelé les secours, mais personne n’est venu. J’ai cru que nous allions mourir là. Je me suis dit que c’était injuste pour les enfants de partir comme ça. Ce sont des potes qui sont venus nous chercher et nous avons trouvé un toit plus bas, au milieu du village.» Le ruisseau a maintenant été sécurisé, dit-on.

Yann Berger a cru que lui et sa famille allaient mourir lorsqu'ils se sont réfugiés dans le galetas.
Photo: Darrin Vanselow

Plus loin, sur un muret, une paire de bottes: «Taille 33, servez-vous!» A quelques dizaines de mètres, le torrent a transpercé d’autres bâtisses. «Les vitres ont explosé. L’eau a traversé ces fenêtres en continu pendant dix heures», témoigne Ilir Xheladini, vidéo à l’appui.

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Hier encore, il avait un studio d’enregistrement pour les livres audio destinés aux enfants d’i-liredition, sa maison d’édition. Quelques bouquins ont pu être sauvés, mais il a tout perdu.

Ilir Xheladini devant les décombres de sa maison d'édition.
Photo: Darrin Vanselow
À part quelques livres, il n'a rien pu sauver dans son studio d'enregistrement.
Photo: Darrin Vanselow

Sinistrés réunis au café

Déjà l’orage menace, à nouveau. La protection civile distribue des sacs de sable. Jean-Louis Gyger, aidé de sa fille et de son beau-fils, se barricade. Pour pouvoir regarder le match, sourit cet ancien joueur du club local. Une génératrice a été installée pour alimenter l’ouest du village viticole – «l’un des plus beaux d’Europe, d’habitude!» – où la pierre jaune d’Hauterive résiste à tout.

Jean-Louis Gyger, au centre, entouré de sa fille et de son beau-fils.
Photo: Darrin Vanselow

«Une vingtaine de maisons sont encore sans courant», estime Jérémy Gadomski, responsable construction chez Groupe E, autour de 16 heures. Environ dix de celles-ci devait retrouver la lumière avant la nuit. A midi, les sinistrés se sont réunis à La Taverne du Tilleul et à la pizzeria Pizza Torino, qui ont distribué 250 repas.

19h30. Quelques gouttes retombent sur Cressier. La population a suivi les recommandations des autorités (lire encadré ci-dessous). Sur un mur, des pizzas attendent leur destin. A quelques mètres, des bouteilles d'eau minérale s'entassent. A La Taverne du Tilleul, on mange. Des litres de soupe aux légumes frémissent encore. Prêts pour le lendemain et la nouvelle journée de labeur qui s'annonce.

Leonardo Pereira, de La Taverne du Tilleul, et Sari Fatma, de Pizza Torino, sont prêts à resservir de la soupe aux volontaires et villageois demain.
Photo: Darrin Vanselow
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Bruits de pelle. Au bout de l'outil emprunté aux pompiers, une jeune femme. Seule sur la rue des Saint-Martin. «Je suis arrivée il y a un quart d'heure, explique Elodie Bossel, venue des Geneveys-sur-Coffrane, à 25 minutes de route. Je n'ai pas pu venir durant la journée. Mais mon esprit chrétien m'a montré le chemin ce soir.» Nouveau coup de pelle.

Dans une salle de l'école primaire, quatre pompiers reprennent leurs esprits. Une accalmie. Dans le ciel aussi. Pas partout: au même moment, le Jura bernois voisin est submergé par des pluies torrentielles et des voitures se retrouvent piégées dans des montagnes de grêle à Sonceboz.

Couvre-feu et évacuations

Les prévisions météorologiques annoncent une possible nouvelle vague de précipitations dans le secteur de Cressier. Pour garantir la sécurité des habitantes et des habitants du village, l'Organe de Conduite Régional et les Autorités communales demandent à la population d'évacuer les rues du village dès les premières précipitations et jusqu'à 6h du matin.

De nombreux affaissements de terrain ainsi que des trous se sont formés à la suite de la crue du Ruhaut, ce mardi soir. Avec cette nouvelle vague de précipitations, la rivière pourrait continuer de charrier un nombre important de gravas et de matériaux divers augmentant les dangers pour la population présente dans les rues et aux abords de l'écoulement des eaux, expliquent les autorités.

L'eau est impropre à la consommation pour l'heure, sauf si elle est bouillie. C'est pourquoi beaucoup de Cressiacois sont allés acheter de l'eau pour pallier l'arrêt des robinets. L'occasion aussi pour la police neuchâteloise de saluer l'élan de solidarité de la population pour héberger les personnes qui en ont besoin.

Compte tenu de la situation, la route cantonale en traversée de Cressier restera fermée au trafic jusqu'au début de la semaine prochaine. Une déviation sera mise en place par la route de la Raffinerie et le chemin des Devins.

(ATS/Blick)

Les prévisions météorologiques annoncent une possible nouvelle vague de précipitations dans le secteur de Cressier. Pour garantir la sécurité des habitantes et des habitants du village, l'Organe de Conduite Régional et les Autorités communales demandent à la population d'évacuer les rues du village dès les premières précipitations et jusqu'à 6h du matin.

De nombreux affaissements de terrain ainsi que des trous se sont formés à la suite de la crue du Ruhaut, ce mardi soir. Avec cette nouvelle vague de précipitations, la rivière pourrait continuer de charrier un nombre important de gravas et de matériaux divers augmentant les dangers pour la population présente dans les rues et aux abords de l'écoulement des eaux, expliquent les autorités.

L'eau est impropre à la consommation pour l'heure, sauf si elle est bouillie. C'est pourquoi beaucoup de Cressiacois sont allés acheter de l'eau pour pallier l'arrêt des robinets. L'occasion aussi pour la police neuchâteloise de saluer l'élan de solidarité de la population pour héberger les personnes qui en ont besoin.

Compte tenu de la situation, la route cantonale en traversée de Cressier restera fermée au trafic jusqu'au début de la semaine prochaine. Une déviation sera mise en place par la route de la Raffinerie et le chemin des Devins.

(ATS/Blick)

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Solidarité du Xamax

Neuchâtel Xamax FCS, le club phare du canton, a changé les couleurs de son logo sur Facebook. Le bleu et le jaune, couleurs des armoiries de Cressier, ont remplacé le rouge et le noir. Les footballeurs ont apporté leur aide aux sinistrés durant le week-end qui a suivi l'inondation.

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