La carrière de la Bernoise
Simonetta Sommaruga n'a jamais été une soldate de son parti

Durant douze ans au gouvernement, Simonetta Sommaruga a connu une carrière riche en dossiers. La présidente durant l'année Covid (2020) a été victorieuse sur l'asile, mais sa plus amère défaite restera la loi CO2. Rétrospective.
Publié: 02.11.2022 à 18:14 heures
Pascal Tischhauser

Et voilà que Simonetta Sommaruga s'en va. Après Ueli Maurer, c'est une deuxième membre du gouvernement qui démissionne en quelques semaines. Dans le cas de la socialiste, cela n'était pas prévu. C'est même un peu abrupt, a-t-elle déclaré sincèrement lors d'une conférence de presse où elle a dû lutter avec les larmes qui lui montaient aux yeux.

«Il y a deux semaines, mon mari a eu une attaque cérébrale», a expliqué la Bernoise devant la presse. Un choc pour le couple, mais aussi une prise de conscience pour Simonetta Sommaruga que la vie ne pouvait plus continuer ainsi. Après douze ans d'engagement total dans sa fonction de conseillère fédérale, elle aspire à revoir ses priorités. Elle s'engagera jusqu'au dernier jour, mais celui-ci aura lieu le mois prochain.

Voilà douze ans, donc, que Simonetta Sommaruga a succédé à Moritz Leuenberger. L'Emmentaloise aux origines tessinoises et née à Zoug (!) a passé ses neuf premières années gouvernementales au Département fédéral de justice et police (DFJP). Depuis trois ans, elle dirigeait celui de l'Environnement, des Transports, de l'Energie et de la Communication (DETEC).

Simonetta Sommaruga se retire du Conseil fédéral.
Photo: keystone-sda.ch
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Frondeuse à ses débuts

Deux fois présidente de la Confédération (2015 et 2020), la pianiste de formation s'est fait connaître du grand public en tant que protectrice des consommateurs. De 1993 à 1999, elle avait été directrice de la Fondation pour la protection des consommateurs (SKS), puis sa présidente de 2000 à 2010.

Sa carrière nationale a débuté en tant que protectrice des consommateurs. Ici avec la directrice de la SKS, Sara Stalder.
Photo: DR

Avant son élection au Conseil fédéral, Simonetta Sommaruga a siégé pendant sept ans au Conseil des Etats pour le canton de Berne, après avoir été conseillère nationale. Elle n'a jamais été un soldat du parti — elle a même très vite créé des remous dans la formation politique en raison du «Manifeste du Gurten», presque une tentative de putsch au PS.

Victoire sur l'asile...

Son plus grand succès en tant que conseillère fédérale restera l'accélération des procédures d'asile, entrée en vigueur le 1er mars 2019. Une victoire contre son camp, presque: elle a réformé le système malgré la résistance de la gauche.

Grâce aux procédures plus rapides, la plupart des demandeurs d'asile savent aujourd'hui plus rapidement s'ils peuvent rester en Suisse ou non. C'est l'une des raisons pour lesquelles notre pays enregistre actuellement nettement moins de demandes d'asile que des pays comparables comme l'Autriche.

Premier coup de pioche pour la construction du nouveau centre fédéral d'asile sur le site Duttweiler à Zurich, en 2018.
Photo: Keystone

... et défaite sur le climat

La Bernoise a eu moins de succès en tant que ministre de l'Environnement. Le 13 juin 2021, le peuple a dit non à la loi CO2 par 51,6% des voix. Ce dimanche-là, la socialiste avait été visiblement affectée: la déception se lisait sur son visage. Or, lorsqu'il s'agissait de politique et non de la santé de son mari, Simonetta Sommaruga ne laissait que rarement les émotions l'envahir.

Le climat, mais aussi l'énergie: lorsque la Russie a attaqué l'Ukraine le 24 février et qu'il est apparu que l'électricité et le gaz risquaient de manquer l'hiver prochain, Simonetta Sommaruga a dû redoubler d'efforts et actionner les leviers les plus divers pour éloigner le spectre d'une pénurie d'énergie.

Simonetta Sommaruga a beau avoir inauguré des panneaux solaires au Lignon, à Genève, son passage en tant que ministre de l'Énergie n'a pas laissé que des victoires.
Photo: Keystone

La conseillère fédérale s'est ainsi assurée des capacités de stockage de gaz liquide aux Pays-Bas et a conclu un accord de solidarité avec l'Allemagne et l'Italie pour la livraison réciproque d'énergie en cas de pénurie. Ces deux accords n'ont néanmoins pas encore été ratifiés.

Le dossier énergétique reste ouvert

Simonetta Sommaruga a également mis en place avec succès une réserve hydroélectrique. Il y a un côté ironique: ce mercredi coïncidait avec l'annonce par le Conseil fédéral que le spectre d'une grave pénurie d'électricité s'éloigne cet hiver. Tout comme les contingentements et les coupures de réseau.

La ministre de l'Energie a éclipsé cette bonne nouvelle, mais cela lui permet de partir la conscience tranquille: elle ne laisse pas à sa successeuse ou à son successeur une Suisse en pleine crise énergétique. Mais les chantiers restent nombreux, en particulier dans le domaine de l'énergie. Notamment ce défi: comment la Suisse peut-elle respecter le climat tout en devenant plus indépendante énergétiquement?

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